Mon(Theatre).qc.ca, votre site de théâtre
Le nom
Du 3 au 21 avril 2018

Une adolescente sur le point d’accoucher revient chez ses parents après une longue absence. Ce jeune garçon qui l’accompagne, est-il vraiment le père de son enfant ? Comment expliquer l’insouciance de la mère et l’étrange silence du père à qui on a omis d’expliquer la situation ? Au cours d’une désespérante tentative de trouver un prénom à l’enfant à naître, les deux adolescents constatent le fossé qui les sépare.

Dans ce huis clos familial, tous entretiennent une apparente normalité. Pourtant, rien n’est normal. Une mystérieuse tension sous-tend ces êtres décalés, inadéquats, sans repères… Le paradoxe de notre humanité se révèle délicatement, entre ironie et gravité.

Jon Fosse est reconnu comme l’un des plus grands dramaturges de notre époque. Ses pièces sont montées partout dans le monde par des artistes tels que Patrice Chéreau, Thomas Ostermeier, Claude Régy. Il est temps que la nordicité de son œuvre éminemment moderne retentisse à nouveau ici.


Texte Jon Fosse
Mise en scène Dominique Leduc
Avec Simon Beaulé-Bulman, Alex Bergeron, Annick Bergeron, Aurélie Brochu Deschênes, Myriam Debonville, Stéphane Jacques


Crédits supplémentaires et autres informations

Conseil dramaturgique et assistance Myriam Stéphanie Perraton-Lambert
Décors Jean Bard
Création sonore Éric Forget
Costumes Linda Brunelle
Éclairages Cédric Delorme-Bouchard

Mardi 20h, mercredi 19h, jeudi-vendredi 20h, samedi 16h

Rencontre avec le public : 11 avril

TARIFS
Scène principale - régulier 35$, sénior 65 ans et + 28$, 30 ans et - / membres 26$
Scène intime - régulier 28$, sénior 65 ans et + 25$, 30 ans et - / membres 23$
Les prix incluent les taxes, commande en ligne ou par téléphone : frais de service de 3$ par billet

Production La grande butte


Entrevue

Un ventre, l’indicible et des paysages nordiques : entrevue avec Dominique Leduc et Annick Bergeron pour Le Nom

Par Olivier Dumas


Crédit photo : Myriam-Stéphanie Perraton-Lambert

Dans Le Nom de Jon Fosse, Dominique Leduc et Annick Bergeron scrutent avec leurs camarades les secousses d’une écriture étrange et nordique.  

Un jeudi de début du printemps, Dominique Leduc termine une répétition de la pièce Le Nom de l’écrivain norvégien Jon Fosse. Elle explique à ses interprètes le difficile équilibre à trouver entre le silence et les phrases elliptiques de la partition. Sous les traits de la mère, Annick Bergeron cherche les nuances possibles d’un simple regard, qui doit se décliner à ce moment-là, «moins dans la honte et davantage dans l’humilité».
[lire la suite]


______________________________________
Critique disponible
            
Critique

Dernière pièce à l’affiche pour la saison 2017-2018 du Prospero, Le Nom de Jon Fosse, selon la traduction de Terje Sinding, semble avoir suscité l’intérêt de plusieurs alors que, le soir de la première, un flot de spectateurs envahissait le hall d’entrée du théâtre. Dès l’ouverture des portes, la salle n’a pas tardé à s’emplir pour le plus grand plaisir de la metteure en scène. Visiblement heureuse d’introduire le spectacle en expliquant brièvement son processus de création, Dominique Leduc donna le ton à une soirée à la fois rassembleuse, mais, aussi, étrangement solitaire. Après avoir constaté que l’éclairage vaporeux avait gagné en opacité et que la trame sonore annonçait déjà la tension dramatique avant même le début de la représentation, voilà que le public a le temps nécessaire pour admirer le décor assez intrigant de Jean Bard sans le moindre mouvement. En accord avec l’écriture énigmatique de l’auteur norvégien, cet instant de réflexion ne sera que le premier de nombreux autres, semblables. Malgré leur récurrence qui peut déranger un public non averti, ces moments particuliers paraissent autant favoriser une expérience commune qu’une confrontation à l’individualité de son propre intellect.

C’est dans cette ambiance que la comédienne Myriam DeBonville, attriquée de vêtements tout en loques, s’avance lentement vers la lumière des projecteurs. Une fois éclairée de profil, l’interprète de la jeune fille enceinte attend un second moment avant de briser la glace avec assurance. Elle s’adresse alors au public avec le regard vide ; le doute demeure à savoir si, pour Dominique Leduc, les personnages imaginés par Jon Fosse sont conscients ou non de leur état fictif. Sans vraiment comprendre le sens des paroles à première écoute, l’auditoire se sait tout de même complice d’un moment de confidence qui suffit pour mettre en place la situation narrative. À travers un mélange de divers reproches et d’affirmations quelque peu disparates, la protagoniste résume la fable de la pièce de manière assez claire. Accouchant sous peu, cette dernière revient dans la maison de son enfance où le père de l’enfant à naître viendra la rejoindre. Ensemble, ils tenteront de trouver un nom à ce bébé malgré leurs problèmes de communication et cette manie particulière que tous ont d’ironiser la venue au monde du nouveau petit être.

Supportés par le travail des concepteurs Cédric Delorme-Bouchard à l’éclairage et Éric Forget à la conception sonore, les personnages arrivent sur scène, au fur et à mesure, accompagnés d’un coup de vent comme pour révéler l’impact de chacun dans cet univers sur le bord de l’écroulement. Légèrement incliné vers l’avant avec une largeur qui rétrécit vers le bas, l’élément central de l’espace scénique, qui sert d’entrée et de sortie au salon familial, propose une image magnifiquement effrayante par son aspect surréaliste et imposant. Aidée par l’allure froide que lui confère son arrière-plan bleuté, cette structure devient vite une source d’angoisse devant l’illusion de sa fragilité. Une preuve de la grande maîtrise de Bard qui a su faire croire à la mobilité d’un élément pourtant bien fixe. Même chose pour Delorme-Bouchard qui semble chercher à convaincre l’assistance de la tangibilité de la lumière en la faisant devenir maîtresse du degré de distinction des formes par le spectateur. C’est elle qui décide qui sera éclairé et jusqu’à quel point ! Comme dans la vie, ce n’est pas le mouvement des hommes qui détermine le moment et l’endroit où il y a de la lumière, mais l’inverse. Un moyen bien pensé de montrer comment l’impalpable au théâtre peut s’avérer plus représentatif de la réalité que son contraire.

À l’opposé, les costumes de Linda Brunelle apparaissent plutôt sobres et ternes omis celui du personnage de la sœur, incarnée par la pétillante Aurélie Brochu Deschênes, qui détonne autant dans son allure que dans son attitude. Néanmoins, cela n’empêche pas Annick Bergeron et Stéphane Jacques de gagner le cœur des spectateurs, interprétant presque toute l’ironie du texte à eux seuls. Simon Beaulé-Bulman et Alex Bergeron qui complètent la distribution sont, sans être époustouflants, de beaux modèles de naïveté et d’insouciance aux regards perçants qui brillent sous la lumière, mais complètement vides de sens. Être capable de résumer l’écriture de Fosse aussi simplement témoigne de l’efficacité des deux années de travail pour la metteure en scène et les productions La grande butte. Il est évident qu’en ce début d’avril, Dominique Leduc et son équipe peuvent se féliciter d’avoir réussi à faire sorte que Le Nom de Jon Fosse s’éclaire dans l’esprit tourmenté de ceux et celles qui oseront aller à la rencontre de ce vent froid norvégien.

04-04-2018
 
Théâtre Prospero
1371, rue Ontario est
Billetterie : 514-526-6582

Youtube Facebook Twitter