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12-13-14 mars 2014, 20h
Mayday RemixMayday Remix
De Mélanie Demers
Avec Jacques Poulin-Denis, Brianna Lombardo, Angie Cheng, Nicolas Patry, Chi Long, Renaud Lacelle-Bourdon + poirier
Et autres artistes invités surprises

Avec Mayday remix, la chorégraphe et interprète Mélanie Demers conçoit un projet taillé sur mesure pour l’Usine C. Elle déconstruit le répertoire de sa compagnie Mayday et en offre des morceaux choisis à des artistes invités. Libre à eux de revisiter, réinterpréter, pervertir ou corrompre le matériau proposé ! Imaginée comme un parcours où chaque station révèle une partie du tout, la soirée se fractionne, se fragmente et se recompose constamment pour créer l’effet d’un kaléidoscope. Mayday remix investit et investigue toutes les sphères possibles pour répandre la danse dans tous les espaces de l’Usine C. Relecture insolite et esthétique des deux œuvres Junkyard/Paradis et Goodbye, Mayday remix est un objet artistique indéfinissable entre matériau composite et bricolage poétique.

À peine cinq ans auront été nécessaires à la compagnie québécoise Mayday pour gagner une reconnaissance internationale grâce à des œuvres sensées et sensibles, politiques et poétiques. Éprises d’une grande liberté d’esprit et de préoccupations très contemporaines, les créations de Mélanie Demers impressionnent par leur lyrisme cru, qui questionne l’état du monde et les responsabilités individuelles. De la plus atypique des manières, Mayday remix vient clore un cycle de travail pour se tourner vers l’avenir.


Création lumières Alexandre Pilon-Guay
Conseillère artistique Anne-Marie Jourdenais
Coordonatrice Suzie Larivée
Crédit photo Xavier Curnillon

Régulier 30$ / Ainés 27$ / Réduit 24$
Durée 90 min environ

Production Mayday
Coproduction Usine C
Mélanie Demers est une artiste en résidence à l’Usine C avec le soutiendu Conseil des arts du canada
Présentation Usine C


Usine C
1345, avenue Lalonde
Billetterie: (514) 521-4493

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 Critique
Critique

par Pascale St-Onge


Crédit photo : Mathieu Doyon

Il n’aura fallu que quelques années à la chorégraphe Mélanie Demers avant d’acquérir une réputation internationale par l’entremise de ses créations chez Mayday, sa compagnie. Présentement résidente à l’Usine C, la jeune femme a laissé le champ libre à différents amis artistes, venus de tous les milieux, afin qu’ils revisitent l’ensemble de son œuvre et le remixe, plus particulièrement les spectacles Junkyard/Paradise et Goodbye.

La soirée se déploie comme un grand déambulatoire entre les murs du théâtre. Performances, DJ set, œuvre littéraire et œuvres scéniques, le tout dure un bon deux heures où il nous semble manquer d’yeux pour tout voir. Chacun des invités transforme, décompose ou massacre une œuvre déjà riche en soi pour en faire un nouvel objet.

Pour ouvrir la soirée, les Fermières Obsédées offrent une courte performance teintée des divers motifs des chorégraphies de Mélanie Demers : Le Discours ! Une performance bruyante, odorante et surprenante qui donne le ton à la soirée, puisque plusieurs des éléments se retrouveront également dans les autres propositions.

La metteure en scène Catherine Vidal revisite Junkyard/Paradise en axant sa démarche sur l’attrait que Demers porte à la friction entre des esthétiques opposées dans ce spectacle. Avec les interprètes originaux, certains extraits de la chorégraphie sont reconstitués, bien que tout est poussé à un nouvel extrême, d’abord du côté du paradis avec cette flore colorée artificielle à laquelle une interprète se fond, mais aussi du côté sale du dépotoir par cette scène finale où tous les interprètes se « tartinent » de Nutella jusqu’à la démesure.

Un entracte nous donne l’occasion de profiter du travail de Catherine Gaudet, qui, à l’aide de Francis Ducharme, occupe les toilettes de l’étage du théâtre pour en faire deux installations étranges. Dans les toilettes des femmes, des poupées recouvrent tous les murs et l’interprète Caroline Gravel se fond à l’ensemble en nous regardant avec des yeux aucunement rassurants. Un beau malaise. Du côté des hommes, Francis Ducharme occupe l’espace des urinoirs en chantant à tue-tête, installé comme un déchet humain. Une expérience en soi. Au rez-de-chaussée, Poirier remixe les musiques des spectacles de Mayday pendant que nous sont distribués des pamphlets rédigés par Catherine Ledoux. D’autre part, Xavier Curnillon nous propose la parodie d’un documentaire animalier où sont étudiés les danseurs de Junkyard/Paradise. Vous pouvez visionner le court métrage au bas de la critique.

Pour clôturer la soirée, la tâche de revisiter Goodbye est donnée à nul autre qu’Olivier Choinière. Sa touche est d’ailleurs plus perceptible que dans toutes les autres propositions et il nous fait passer un moment mémorable. Celui-ci va au-delà du matériau de Mélanie Demers et ouvre carrément une réflexion sur le procédé du remix lui-même. Par l’entremise de la chorégraphie originale, Choinière laisse entrevoir un massacre de la chorégraphe, présente en scène avec eux, par les interprètes. En cherchant à expulser le public à tous les moyens, c’est d’abord du spectacle lui-même que Choinière cherche à se départir. Les interprètes sont prisonniers de ce spectacle qu’ils tentent de délaisser ; ce n’est que par le rejet du matériau et du créateur qu’on peut travailler. Ce qui semble intéresser Choinière comme matériau n’est finalement nul autre que le remix du remix. Jacques Poulin-Denis offre par ailleurs une performance grandiose et hilarante dans ce morceau.

Les œuvres de Mayday ouvrent déjà la porte à l’interdisciplinarité. Avec Mayday Remix, c’est un réel manifeste en ce sens que nous offrent Mélanie Demers et ses collaborateurs issus des arts visuels, de la musique, du théâtre, du cinéma et finalement de la littérature. C’est un nouveau souffle rafraîchissant pour le milieu montréalais, mais aussi audacieux et des plus agréables pour son public. Une soirée mémorable.

24-03-2014