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Du 23 au 27 avril 2013, 20h, 28 avril 15h
GoodbyeKiss & Cry
Belgique
Idée originale Michèle Anne De Mey et Jaco Van Dormael
Chorégraphie et NanoDanses Michèle Anne De Mey et Gregory Grosjean
Mise en scène Jaco Van Dormael
Création collective Michèle Anne De Mey, Gregory Grosjean, Thomas Gunzig, Julien Lambert, Sylvie Olivé, Nicolas Olivier, Jaco Van Dormael
Texte Thomas Gunzig
Scénario  Thomas Gunzig et Jaco Van Dormael

Après avoir créé l’événement la saison dernière, Kiss & Cry fait une seconde halte à l’Usine C, après une tournée triomphale au Brésil, au Chili, au Liban et en France.

Une femme, seule sur le quai d’une gare, se demande où vont les gens quand ils disparaissent de notre vie, de notre mémoire. Elle se met à penser à tous ces disparus évanouis dans les brumes de l’existence. Où sont-ils ? S’ouvre alors littéralement le tiroir des souvenirs…

Captation d’images et projection simultanée, ballet chorégraphique conçu pour les mains, Kiss & Cry réussit le pari de révéler l’envers du décor sans en briser la magie. Au contraire, en dévoilant leurs bricolages et secrets de fabrication, les créateurs Michèle Anne De Mey et Jaco Van Dormael insufflent à la représentation une poésie et une fragilité inédites. Sous les yeux des spectateurs, des doigts se transforment en patineurs, quelques gouttes d’eau deviennent un océan, le souffle d’un homme se fait vent furieux.

Miniaturisation, illusions d’optique, orfèvrerie du détail, chansons nostalgiques : l’imaginaire inaugure ici une nouvelle manière de raconter aux frontières des genres. Préparez-vous à recouvrer votre âme d’enfant devant cette œuvre à la maîtrise féérique.

Kiss & Cry est porté par un collectif belge qui bouscule les normes des disciplines artistiques et façonne un spectacle chaque jour différent. À l’origine du groupe, on retrouve Michèle Anne De Mey, chorégraphe notamment de Sinfonia Eroica et 13 Reasons… (to sing), et Jaco Van Dormael, cinéaste encensé pour ses films Toto le héros, Le huitième jour et Mr. Nobody


Section vidéo
une vidéo disponible


Lumière : Nicolas Olivier
Images : Julien Lambert

Production : Charleroi/Danses, Centre chorégraphique de la Communauté française, le manège.mons/Centre Dramatique et Les Théâtres de la Ville de Luxembourg

Présentation : Usine C avec le soutien du Consulat de France à Québec


Usine C
1345, avenue Lalonde
Billetterie: (514) 521-4493

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Dates antérieures (entre autres)

Du 25 au 29 avril 2012, Usine C

 
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 Critique
Critique

par Pascale St-Onge

Que reste-t-il de nos amours?

Après une première série de représentations, l'équipe de Kiss & Cry nous revient à l'Usine C, un retour attendu avec impatience et enthousiasme. Avec raison, car l'étrange spectacle mêlant cinéma, danse et théâtre d'objets est un véritable enchantement visuel, un spectacle intelligent et divertissant sur tous les points.

Assise au banc d'une gare, une vieille femme confronte sa mémoire défaillante et tente de reconstituer les souvenirs des cinq histoires d'amour qui ont constitué sa vie. La mémoire devient une véritable trame, un combat difficile qui transparaît dans chaque image, parfois incomplète vu les morceaux manquants, créée de toutes pièces par l'équipe en scène. La valeur de chaque souvenir est mise à l'épreuve, rapidement on se demande quel souvenir, quel moment survivra au temps et à notre mémoire? Que reste-t-il de nos amours après des décennies, après les joies, les peines... Qui marquera notre mémoire malgré ses failles? Kiss & Cry devient donc les brides de ce qu'il reste, des extraits d'une vie entière qui se tiennent en un seul spectacle et dont les plus marquants sont insoupçonnés.

Les codes scéniques sont ici bien dérangés puisque décortiqués, remis en question et recomposés de toutes pièces avec des inspirations diverses. C'est donc ainsi que se mêlent le cinéma en direct et les microchorégraphies de mains, qui se réfèrent elles-mêmes directement au théâtre d'objet. Le spectacle devient un exploit technique de toute l'équipe, car le moindre faux pas d'un technicien ou acteur pourrait gâcher une scène entière. Aussi, les qualités du cinéma sont mises au service du récit, narré par la voix hypnotique de Thomas Gunzig ; la musique, parfaitement bien choisie, a un pouvoir indéniable sur l'image, tout autant que sur le mouvement.

Le plaisir du spectateur, qui se laissera facilement emporter par les histoires de cette vieille femme, se trouvera aussi dans son choix d'observer la création technique de l'image sur scène, ou son résultat à l'écran. Rapidement on décèle l'inventivité à l'origine du succès de cette création collective. Petit clin d'oeil à la magnifique finale, totalement en harmonie et cohérente avec l'ensemble de la démarche, transcendant les codes que la représentation avait elle-même instaurés.

Au défi technique de l'oeuvre relevé avec brio par toute l'équipe, c'est une histoire touchante et abordée de façon ludique par les chorégraphies pour mains, charmantes à souhait. Les raisons du succès de la tournée de ce spectacle deviennent évidentes après quelques minutes à peine et se confirment alors qu'on réalise que le temps est passé si vite, que la représentation s'est déroulée en un éclair. Si cette vieille femme se questionne sur l'avenir de ses souvenirs, le public, quant à lui, n'aura pas à s'inquiéter que ce spectacle marquera sa mémoire.

28-04-2013


par Ariane Cloutier (2012)

Jaco Van Dormael, Michèle Anne De Mey et leur troupe nous présentent en première nord-américaine le très singulier spectacle Kiss and Cry à l’Usine C. Le cinéaste Van Dormael et la chorégraphe De Mey jouent dans des tons qui leur sont familiers : l’univers onirique, le détournement d’objets enfantins et hors d’échelle, les phénomènes naturels ainsi qu’une très grande sensibilité aux mécanismes humains.

L’appellation Kiss and Cry est une expression empruntée au patinage artistique, désignant l’espace où, le plus souvent assises sur un banc, les patineuses attendent avec impatience l’appréciation des juges sous le regard des caméras et des spectateurs. Sur scène, nous observons plusieurs maquettes, lieux de tournage qui serviront à créer sous nos yeux un film, parfois à la limite de l’abstraction, projeté en arrière-scène. Plusieurs caméras nous dévoilent progressivement ces lieux imaginaires, abstraits ou représentatifs, habités de figurines minuscules et de souvenirs. Les deux protagonistes sont une main de femme et une main d’homme évoluant avec la grâce de danseurs suivant la musique.

La trame principale est celle de l’évolution de la mémoire, racontée à travers cinq histoires d’amour qu’une vieille dame se remémore, assise sur un banc à la gare. Cette réflexion poétique, articulée par une narration adaptée d’un texte fort et imagé de Thomas Gunzig, commence avec la question : où vont les gens quand ils disparaissent de notre vie, de notre mémoire ?

Au moyen d’habiles stratagèmes techniques, de mécanismes scéniques, d’un éclairage finement travaillé et de jeux de focus, la caméra nous entraîne de manière tout à fait fluide d’un micro-univers à l’autre. Le soin extraordinaire porté aux maquettes et l’utilisation de meubles, d’objets du quotidien, de jouets, d’éléments naturels (eau, sable, terre, etc.) situent ce film, créé en direct, très près du cinéma d’animation.

La trame sonore, incluant du bruitage en direct et des compositions originales, est parsemée de quelques chansons connues, dont de Charles Trenet. Ces interventions musicales et le très habile jeu des mains donnent parfois une teinte humoristique à ce spectacle, qui sinon aurait pu sembler trop nostalgique. Bien que des changements de rythme auraient été souhaitables pour dynamiser le spectacle, le rythme lent et les mouvements fluides de la caméra nous entraînent dans un état méditatif qui nous permet de réfléchir aux questionnements universels évoqués par la narration.

Les auteurs et interprètes de Kiss and Cry font preuve d’une grande créativité et d’ingéniosité pour nous dévoiler un monde peu exploré, celui des lieux de mémoire. Une prestation unique, alliant la danse, le cinéma et le théâtre d’objet, à voir absolument.

28-04-2012