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Du 15 novembre au 3 décembre 2016
Je crois ?
Texte Emmanuel Bourdieu
Mise en scène Benoit Rioux
Avec Samuël Côté, Marie-Pier Labrecque, Florence Longpré, Simon-Pierre Lambert

Une sœur et son frère, Pauline et Jean, décident un jour de parler en inversant le « je » et le « tu ». Toi c’est moi, moi c’est toi ! Ce jeu enfantin qu’on pourrait croire inoffensif aura des conséquences inattendues puisqu’arrivé à l’âge adulte Jean se retrouve subitement sans accès à ses propres pensées. En revanche, il peut désormais lire les pensées des autres. Cette étrange pathologie le condamne à n’avoir de connaissance sur lui-même que par le biais d’autrui, à se percevoir de l’extérieur. Dans un monde où l’on doit être le premier à partager et à s’exprimer, peu importe le sujet, même si on ne le maitrise pas, est-ce qu’un être au paroxysme de l’altruisme, porté uniquement vers les autres, peut survivre ? Ou bien sera-t-il utilisé et vidé jusqu’à n’être plus qu’une enveloppe corporelle ? Un texte sur la perte d’identité, les rapports de force et sur l’amour qui emprunte parfois des chemins peu fréquentés.


Tarif Scène principale
Régulier : 35 $
Senior (65 ans et +) : 28 $
30 ans et - :  26 $
Dans la solitude des champs de coton 38 $

Tarif Salle intime
Régulier : 28 $
Senior (65 ans et +) : 25 $
30 ans et - :  23 $

Tous les prix incluent les taxes.
Aucun frais de service pour l’achat de billets au guichet
Commande en ligne et téléphonique : 3$ de frais de service par billet.

Horaire scène principale :
Mardi, jeudi, vendredi à 20h
Mercredi à 19h
Samedi à 16h

Horaire salle intime :
Mardi, jeudi, vendredi à 20h15
Mercredi à 19h15
Samedi à 16h15

Production La Shop Royale - Facebook


Section vidéo


Salle intime du Théâtre Prospero
1371, rue Ontario est
Billetterie : 514-526-6582

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Critique

Pour sa première production, la compagnie de la Shop Royale a choisi de monter Je crois ? d’Emmanuel Bourdieu, fils du célèbre sociologue français Pierre Bourdieu. Dans un décor simple constitué d’un espace où le mur et le plancher sont recouverts d’une tapisserie fleurie, un banc est intégré au décor, permettant de cacher les accessoires qui seront utilisés à différents moments de la pièce. Le metteur en scène Benoît Rioux a choisi de donner toute la place au jeu des acteurs et au texte très dense qu’ils doivent livrer. Il a également décidé de faire jouer les comédiens dans une langue française pointue que l’on a perdu l’habitude d’entendre sur les scènes québécoises.




Crédit photo : Maxim Paré-Fortin

Alors qu’ils sont enfants, Pauline apprend un jeu à son frère Jean, qui consiste à remplacer « je » par « tu » et « tu » par « je » dans toutes leurs conversations. Si l’exercice semble a priori ardu pour le jeune garçon, la rigueur avec laquelle il apprend à se prêter au jeu en vient à le déposséder de son intériorité. Incapable d’avoir un avis sur quoi que ce soit, voire même de comprendre la nature de ses sentiments amoureux, il doit se fier aux réactions biologiques de son corps (chair de poule, augmentation de son rythme cardiaque, essoufflement, transpiration) pour savoir comment il se sent. À l’inverse, son empathie et sa compréhension des autres sont exacerbées au point où Jean arrive à lire tout ce qu’ils ressentent, simplement en les observant. Même le passé de parfaits inconnus se dévoile à lui lorsqu’il les voit sur des photographies.

Les quatre comédiens sont très justes, à commencer par Marie-Pier Labrecque dans le rôle de Pauline. Son jeu nuancé la rend crédible autant lorsqu’elle joue la grande sœur autoritaire et manipulatrice que lorsqu’on la sent brisée par la distance que Jean semble vouloir mettre entre eux lorsqu’il se marie avec Muriel. Même lorsque Pauline se retrouve dans une posture plus passive, son langage non verbal est éloquent. La tension amoureuse et sexuelle qu’elle développe pour son frère est très claire, même avant qu’elle finisse par l’embrasser vers la fin du spectacle. Florence Longpré ajoute une touche d’humour à la pièce en dotant le personnage de Muriel d’une superficialité risible alors qu’elle prononce sans cesse le même discours-fleuve. La rigueur avec laquelle elle maintient son jeu décalé et caricatural rappelle les redoutables talents d’improvisatrice de la comédienne. Samuël Côté relève sans doute le plus grand défi d’interprétation, puisqu’il lui revient d’incarner le personnage de Jean, principal porteur du message philosophique de la pièce. Si son jeu est parfois un peu trop appuyé – notamment lorsqu’il joue l’enfant dans les premières minutes de la pièce – il rend bien le trouble qui habite son personnage. Simon-Pierre Lambert complète la distribution par son rôle de Simon, plus secondaire, mais tout aussi efficace que les autres personnages.

Avec Je crois ?,La Shop Royale relève le défi de rendre intelligible une pièce riche et complexe. Or, cette première production donne envie de porter attention aux prochains  projets de cette compagnie très prometteuse et de voir dans quel type de répertoire elle puisera ses prochaines créations.

20-11-2016