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Du 30 avril au 18 mai 2013, 20h, mercredi à 19 h, 11 et 18 mai 16h
CombatCombat
Texte de Gilles Granouillet
Mise en scène Odette Guimont
Avec Carl Béchard, Danny Carbonneau, Odette Guimond, Isabelle Leclerc et Yannik Parent (musicien)

Combat se déroule dans une petite ville de banlieue française minée par le chômage, qui survit grâce à l’abattage des animaux. Un homme invite sa soeur à assister à la remise d’une médaille attribuée à leur mère partant à la retraite. Maintenant sans emploi après avoir travaillé lui-même dans cet abattoir, marié à une bouchère qui le fait vivre, il lance un appel au secours à sa soeur en l’incitant à revenir sur les lieux de ses origines. Menant désormais une vie bourgeoise aisée, celle-ci se retrouvera plongée dans un drame familial qu’elle souhaitait oublier. Obnubilée par son passé, elle commettra un crime sanglant et gratuit. Qui sera condamné? Celle qui avait réussi à se sortir de ce milieu? Ou celui qui a toujours rêvé de le faire?

Originaire de Saint-Étienne en banlieue de Lyon, l’auteur dépeint une société postindustrielle atteinte par la grande crise économique des années ’70. Reconnu comme l’un des représentants de la nouvelle dramaturgie européenne, il a écrit plus dʼune vingtaine de pièces, certaines traduites en plusieurs langues.

Le Réverbère Théâtre l’a fait connaître au Québec, lors de la création mondiale de La Maman du petit soldat, à la Salle intime du Prospero à l’automne 2009. L’auteur a proposé Combat à la compagnie, pour sa création américaine.


Scénographie Elen Ewing et Geneviève Lizotte
Bande son Yannick Parent
Lumières David-Alexandre Chabot
Assistance à la mise en scène Florent Siaud et Emilie Coulombe
Photo Bernard Dubois

Rencontre avec les artistes après la représentation du 8 mai

Une production de Réverbère Théâtre


Prospero
1371, rue Ontario est
Billetterie : (514) 526-6582

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 Critique
Critique

par Sara Fauteux


Crédit photo : Bernard Dubois

Un homme écrit à sa sœur en adressant au public les mots des lettres qu’il lui destine. Il désire l’inviter à assister à la remise de médaille de leur mère, à l’abattoir où elle travaille. Il pèse ses mots, se reprend, modifie ses formulations, trahissant ainsi toute la nervosité, l’importance et l’admiration qu’il porte à cette sœur. Ce faisant, il enfile un costume défraichi et mal ajusté qui nous laisse voir exactement le genre d’homme qu’il est : désoeuvré et aussi soumis et abattu qu’assoiffé de pouvoir.

Cette première scène de Combat a de quoi capter l’attention. On apprécie d’emblée le jeu remarquable de Carl Béchard qui incarne avec précision le personnage tordu du frère.  Durant ces premières minutes, la musique live de Yannick Parent accompagne parfaitement le tableau, en marquant un rythme inquiétant, comme des petites gouttes d’eau irrégulières.

Malheureusement, la suite de la représentation fonctionne beaucoup moins bien. Le reste de la distribution s’avère passablement moins convaincante, nous privant d’une grande partie de l’intérêt du texte. De plus, à mesure que le spectacle avance, l’ambiance sonore devient de moins en moins intéressante et de plus en plus illustrative. Tout est commenté d’une musique, d’un son, et les effets réussis sont noyés dans cette conception sonore omniprésente.

Mais plus dommage encore, la mise en scène d’Odette Guimond donne l’impression d’avoir fait une lecture erronée de la pièce. Dans ce drame psychologique, la sœur, après son passage à la remise de médaille de la mère, sera victime d’une folie passagère à la gare et assassinera un homme. Pour la protéger, ou pour donner de la substance à sa propre vie, son frère avouera le crime et se fera emprisonner à sa place. Plus que sur l’anecdote, on devine que Combat repose davantage sur la construction d’une atmosphère sombre, sur un humour décalé et sur des relations malsaines entre des personnages prisonniers de leur misère.

Or, cette ambiance n’est qu’à moitié installée et ne fonctionne pas vraiment. Mise à part quelques scènes où l’on réussit à transmettre ce malaise, dans l’ensemble, la mise en scène esquive les enjeux qui permettraient de révéler l’étrangeté de cet univers. Elle s’accroche plutôt à un réalisme inutile qui alourdit la représentation. La relation extrêmement ambiguë entre le frère et la sœur est à peine perceptible alors qu’elle parait centrale et qu’on devine une abondance d’éléments qui auraient permis d’exploiter la perversion du lien qui les lie.

A-t-on tenté de faire une lecture davantage psychologique, réaliste du texte en évitant de mettre l’accent sur l’aspect caricaturé et décalé des personnages? Si c’est le cas, l’expérience se révèle un échec, car le public ne goute pas ce qu’il devine de savoureux dans le texte de Granouillet, tout en n’arrivant pas à cerner la proposition de Guimond. La seule chose qui sauve cette production est définitivement la performance réjouissante de Carl Béchard, qui réussit à lui seul à nous transmettre le malaise profond de son personnage.

07-05-2013