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Du 28 novembre au 23 décembre 2016, du lundi au jeudi 19h, vendredi 20h
Supplémentaires mercredi 14 décembre à 21h30, jJeudi 15 décembre à 21h30, samedi 17 décembre à 16h
Le spectacle
Texte Sonia Cordeau, Simon Lacroix et Raphaëlle Lalande
Mise en scène et interprétation Sonia Cordeau, Simon Lacroix, Raphaëlle Lalande et Yves Morin

Une rencontre improbable avec un robot qui rêve d’être comédien. Un retour en arrière au 18e siècle alors que Marie-Antoinette, désireuse d’en apprendre davantage sur le styrofoam, ira jusqu’à couper des têtes pour parvenir à ses fins. Une conférence portant sur les êtres humains de demain qui deviendront eux-mêmes Internet : les êtres hurnet. Un monologue de Shakespeare d’une grande modernité. Entre deux parties de golf au ciel, une importante leçon de vie de René Angélil. Un appel à l’aide de Pierre Lebeau.

Après avoir fouillé le vrai, le terroir et les racines dans Oh Lord, le Projet Bocal fait maintenant une incursion dans le faux, les robots et le futur. Le spectacle traite entre autres des vêtements en métal, de styromousse et de la difficulté à communiquer alors que la grande majorité de la population est maintenant aux prises avec le TDAH.

Après Le Projet Bocal en 2013 et Oh Lord en 2014, Le spectacle est le tout dernier opus proposé par l’équipe composée de Sonia Cordeau, Simon Lacroix et Raphaëlle Lalande. Sa version finale fait suite à un laboratoire d’exploration présenté lors de La Dizaine de La Manufacture en juin 2016.


Section vidéo


Décor, costumes et accessoires Elen Ewing
Éclairages Jérémie Boucher
Conception vidéo Jean-François Bienvenue
Conception sonore Simon Lacroix
Crédit photo Hugo B. Lefort (Hugo B. Lefort | Li.photographie)

Régulier 32,25$
65 ans et + 27,25$
30 ans et – 22,25$

Tête-à-tête : jeudi 8 décembre

Production Projet Bocal en codiffusion avec La Manufacture


La Petite Licorne
4559, avenue Papineau
Billetterie : 514-523-2246

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Critique

Peu de démarches artistiques au Québec se rapprochent du travail créatif insolite du Projet Bocal, trio formé de Sonia Cordeau, de Simon Lacroix et de Raphaëlle Lalande. Avec Le spectacle, la compagnie propose une troisième création protéiforme et parfois carrément insaisissable, qui tient parfaitement la route tout en nageant profondément dans l’absurde.

Impossible ici de résumer la pièce (même le programme ne s’y risque pas), tant les sketchs ionesquesques se chevauchent, s’interrompent, voire se télescopent. Les spectateurs ont ainsi droit à des séquences de Fort Boyard, à la visite de l’au-delà de René Angélil, aux passages d’un mystérieux robot du futur, et même à une rencontre improbable entre Marie-Antoinette et un Garou voyageur temporel.Tenter de s’accrocher à la logique du Spectacle, c’est comme essayer de rattraper le fil d’un rêve au réveil : dès qu’on pense en saisir un bout, le reste s’évanouit aussitôt dans les brumes. D’ailleurs, dès les premiers instants de la représentation, les trois créateurs pleins d’autodérision donnent voix aux pensées probables de leurs spectateurs (Est-ce que j’ai éteint mon téléphone? Oh, tiens, le décor est blanc. Hein, ils ont parlé en même temps! Je suis pas sûr d’aimer ça, ce show-là, etc.).

Le spectacle adopte la forme mouvante de la réflexion. Incessant, l’esprit humain bondit d’une idée à l’autre, d’un concept au suivant sans arrêt ni parfois logique. De la même façon, les sketchs de Cordeau, Lacroix et Lalande semblent de prime abord passer du coq à l’âne, mais se répondent en fait par un mot, une question, un geste, si bien qu’on se laisse glisser avec plaisir d’un sketch à l’autre, acceptant les détours, les retours et les pas de côté. Derrière cet éclectisme, Le spectacle demeure cohérent, s’appuyant sur l’humour absurde pour se demander, entre autres, si la styromousse protège nos précieux outils technologiques, qu’est-ce qui nous protège, nous?

La mise en scène, cosignée par les trois interprètes et le musicien Yves Morin, roule à plein régime. Sous des dehors de simplicité et d’excentricité la plus complète, elle met en valeur l’absurdité assumée du spectacle tout en soulignant les apartés des artistes lorsque ceux-ci, dérogeant à l’ordre préétabli, s’arrêtent pour réfléchir à leur démarche artistique. Tout n’est pas absurde, les créateurs s’interrogent sur la clarté de leurs messages et sur leurs messages eux-mêmes, allant jusqu’à se dire, dans une flèche bien aiguisée lancée au milieu artistique, qu’il leur faudrait, en fait, « parler d’un sujet ». « Savez-vous ce qui marche le plus? Une histoire, parce qu’après la fin, on peut aller faire autre chose », déclare même l’un d’eux.

Les quatre interprètes (Morin se joignant au trio) maintiennent un rythme rapide, passant d’une émotion à l’autre en un instant, d’une idée à la suivante en un clignement d’yeux. Ça aurait pu être étourdissant, mais c’est simplement fascinant.

Dans un monde souffrant de plus en plus d’un grave déficit de l’attention, cernés par des technologies de communication qui réduisent de plus en plus notre capacité de concentration, nous, « être hurnets » en devenir, ne pouvons faire autrement que de voir dans cette productiondébridée notre propre abrutissement. Le spectacle remet brillamment en question notre rapport à la technologie. Heureusement qu’on peut encore en rire!

01-12-2016