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Du 8 au 19 avril 2014, mardis à 19 h, du mercredi au samedi à 20 h, samedis à 16 h
Tu iras la chercherThe Dragonfly of Chicoutimi
Texte : Guillaume Corbeil
Mise en scène : Sophie Cadieux
Avec : Marie-France Lambert

Une femme rentre chez elle. À la porte de son appartement, à cet instant précis, elle se dit qu'elle pourrait abandonner son travail et tout quitter. Partir à Prague. Pour donner un sens à sa vie. Sans avertir personne. Avec l'intention de ne donner aucune nouvelle et de rester à l'étranger assez longtemps pour être déclarée disparue.

TU IRAS LA CHERCHER est un monologue qui porte sur la notion d’identité. Une femme part à la recherche d’elle-même avec cette impression persistante d'être en retard sur sa vie.L’histoire est racontée à la deuxième personne par l'actrice, si bien que le spectateur se retrouve lui aussi à poursuivre cette femme et à partager son désir de tout quitter. La vérité de ce récit se trouve peut-être à mi-chemin entre le spectateur et l’actrice, dans l’imaginaire.

Lors de la première saison de sa résidence d’artiste à ESPACE GO, Sophie Cadieux a fait entendre les mots de TU IRAS LA CHERCHER lors d'une série de lectures qui nous a permis de découvrir quatre versions différentes du texte, dans quatre lieux distincts, par autant d'actrices. Aujourd'hui, pour faire de ce texte intimiste un nouveau terrain d’exploration, elle a convié la comédienne Marie-France Lambert à plonger avec elle dans un projet de création pour lequel elle signera sa première mise en scène.

Né en 1980 dans le village de Coteau-Station, Guillaume Corbeil a terminé en 2011 une formation en écriture dramatique à l’École nationale de théâtre du Canada. En 2010, il signait une biographie du metteur en scène André Brassard, parue aux éditions Libre Expression. Il est aussi l’auteur d’un recueil de nouvelles, L’art de la fugue, et d’un roman, Pleurer comme dans les films. La saison dernière, le Théâtre PÀP présentait avec succès sa pièce CINQ VISAGES POUR CAMILLE BRUNELLE, dans une mise en scène de Claude Poissant.


Section vidéo


Équipe de création
Marie-Aube St-Amant Duplessis
Max-Otto Fauteux
Anne-Marie Levasseur
Ginette Noiseux

Tarif :
Régulier 35$
30 ans et moins 27$
65 ans et plus 28$

Rencontre avant le spectacle
Jeudi 13 mars 2014
Guillaume Corbeil, auteur
Sophie Cadieux, metteure en scène

Une production de ESPACE GO


Espace Go
4890, boul. Saint-Laurent
Billetterie : 514-845-4890

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Dates antérieures (entre autres)

FTA 2010 (création)
Du 22 février au 19 mars 2011, supplémentaire 12 mars, Espace Go

 
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 Critique
Critique

par Sara Fauteux

Concerné par la problématique du français en Amérique du Nord, Larry Tremblay écrit en 1995 The Dragonfly of Chicoutimi. Pour parler de lui-même et de sa langue, il utilise un anglais dont la structure est calquée sur celle du français. Retrouvant la parole après un épisode traumatisant, Gaston Talbot n’a plus que cette langue étrangère et commune à la fois pour raconter son histoire incertaine entre rêve et réalité.

Cette pièce culte de Larry Tremblay a été créée il y a plus de 15 ans, dans une mise en scène de l’auteur. Lors de la quatrième édition du FTA au printemps dernier, Claude Poissant en proposait une relecture pour la première fois depuis que Jean-Louis Millette avait immortalisé le personnage de Gaston Talbot. Vu l’accueil très chaleureux du public, la pièce est présentée à nouveau, et ce, jusqu’au 19 mars 2011, à l’Espace Go. Dans cette production, Dany Broudeault, Mani Soleymanlou, Patrice Dubous, Étienne Pilon et Daniel Parent incarnent les multiples facettes de ce personnage et les différents aspects de l’oeuvre.

La scénographie d’Olivier Landreville isole les comédiens dans des espaces clos et suspendus, définissant cinq univers distincts.  Pour ceux, comme moi, qui n’ont pas assisté à la création du spectacle, ne pouvant ainsi comparer les productions, il est pertinent de se demander si l’utilisation de plusieurs comédiens pour ce monologue ne rend pas le personnage de Talbot encore plus insaisissable. Ces voix qui s’entremêlent brouillent les pistes et rendent peut-être plus difficile d’entrevoir et de saisir l’homme derrière les mots. Mais cette vision a le mérite d’explorer et de tenter d’en réinventer la portée théâtrale et politique.

Comme plusieurs l’ont mentionné, la question de la langue et celle de l’identité soulevées dans la pièce résonnent différemment aujourd’hui. Le Québec n’est plus seulement confronté au fait anglais, mais à toutes les cultures. Pour ce texte traitant d’identité, la multiplication des voix est un choix judicieux et révélateur. Gaston Talbot, qui cherche en quelque sorte à se définir à travers les mots, se trouve confronté à plus d’une réalité, plus d’un univers, plus d’un corps. La mise en scène de Poissant permet d’illustrer la question du rapport à l’autre, très vivante au Québec, de manière pertinente. Mais aussi et surtout, elle permet d’explorer différents mécanismes de performance à partir d’un texte. Le travail de chorale effectué par le metteur en scène révèle de nouveaux aspects du discours du personnage et  amène le spectateur à questionner ce qu’il entend et ce qu’il connaît de la pièce. Il s’agit là de la plus grande réussite de ce spectacle qui a la curiosité et l’audace de chercher plus loin et différemment afin de voir ce que le théâtre peut encore révéler, ébranler.

02-03-2011

par Daphné Bathalon (FTA 2010)

Absent des scènes québécoises depuis que le comédien Jean-Louis Millette avait incarné de mémorable manière le personnage de Gaston Talbot, The dragonfly of Chicoutimi adopte, pour cette mouture 2010, la forme d’une pièce chorale. Le metteur en scène Claude Poissant a pris le parti de diviser ce long monologue en un texte pour cinq comédiens. Chacun interprète une facette de cet homme qui, après une période d’aphasie survenue à la suite d’un cauchemar, se réveille en ne parlant plus qu’anglais. Il s’exprime par petites touches successives, revenant sur ses pas, rajustant quelques éléments de son récit. Ainsi, cinq voix s’entrechoquent et s’entremêlent pendant les 75 minutes que dure la représentation. Bien vite, on réalise qu’elles parlent un anglais étrange, peu naturel et calqué sur la syntaxe française.

On ne sait jamais ce qui est vrai de ce qui est faux dans le récit de Gaston Talbot, il passe en effet son temps à affirmer une chose, puis à se rétracter quelques minutes plus tard. Ainsi, si d’emblée il nous affirme : « I travel a lot », il admet ensuite qu’il n’a jamais quitté Chicoutimi et qu’il a dit cela pour rendre son histoire plus intéressante. Cette contradiction au sein même du personnage est ici soulignée par le profond clivage entre les différentes versions de Gaston ainsi que par leur séparation physique. La vérité n’a finalement aucune importance, car c’est d’abord avec lui-même que Gaston cherche à reprendre contact.

Séparés par des cloisons, les Gaston sont confinés dans leur univers étriqué : un cadre décoré à leur image et qui, dans le noir, semble suspendu au milieu de nulle part. Tout en étant statique, du fait de la scénographie « en boîtes » signée Olivier Landreville, la mise en scène de Poissant nous donne pourtant une impression de mouvement par des jeux d’éclairage vifs et colorés provenant de différentes sources. Et, bien qu’il n’y ait d’abord aucun contact physique entre les comédiens, il y a clairement interaction entre les versions de Gaston tout au long de la représentation grâce au découpage précis du texte et à son enchaînement très efficace. Le rythme est excellent ; la partition pratiquement sans accroc.

Une grande part de la réussite de cette nouvelle proposition revient aux acteurs. Outre le grand travail de groupe nécessaire à ce genre de production, une telle chorale exige précision et maîtrise du texte, ce dont toute la distribution fait preuve. Encore plus important, même si le personnage est subdivisé en cinq caractères, aucun ne verse dans le cliché, l’interprétation est juste, bien dosée, le jeu de l’un venant souligner celui de l’autre dans une parfaite synchronie.

Qu’on ait vu Millette dans ce rôle extraordinaire ou qu’on soit de ceux qui n’ont pas eu cette chance, la proposition audacieuse de Poissant se révèle une expérience pertinente, différente, mais tout aussi forte que celle de 1995. The dragonfly of Chicoutimi porte indubitablement la marque du Théâtre PàP et c’est tant mieux!

01-06-2010