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Du 10 au 28 novembre 2015
Papiers mâchés
Textes et mises en bouche David Paquet

L’auteur David Paquet, seul en scène, offre à son public complice une soirée de chaleur et de connivence sous la forme d’un stand-up poétique qui dénonce, questionne, examine et plonge le spectateur dans un univers fantaisiste et surréel.

Ses textes livrés dans l’ordre ou dans le désordre, selon l’humeur de la soirée, souvent caustiques, mais désarmants d’humour et d’humanité, forment une mosaïque d’histoires courtes, de perles philosophiques et poétiques, de bizarreries et de vérités de biscuits chinois.


Oeil extérieur Karine Sauvé
Directrice de production Manon Claveau
Conseillère à la scénographie Julie Vallée-Léger
Éclairages Marie-Aube St-Amant Duplessis

les mardis à 19 h
du mercredi au samedi à 20 h

Rencontre avec l’équipe à l’issue de la représentation du 17 novembre

Création du Crachoir et de David Paquet


Section vidéo

    

 
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Critique

Attention ovni créatif


Crédit photo : Catherine Aboumrad

Je voulais tellement être dans tes bras que j’ai fini par être dans tes jambes… Sous la plume de David Paquet coulent les images poétiques. Il a la figure de style habile et la métaphore qui le démange, et ses beaux mots décrivent avec couleurs un réel blafard. On pourrait écouter sa prose longtemps, les yeux fermés. Pourtant, sur scène, c’est tout un poème : s’il se défend d’être comédien, il use de son corps et de l’espace avec technique, enchaînant mimiques appuyées, danse lascive et chant à gorge déployée.

Ses Papiers mâchés sont un ovni de scène, une création hybride qui mêle le théâtre - pour la profondeur du propos et le sens - à l’humour - pour le rire et la légèreté. Le résultat est aussi déstabilisant dans la forme que dans le fond, décousu, sans lien apparent ; on avance à l’aveugle sans jamais savoir où l’on va. Comme dans la vie ? David Paquet raconte des anecdotes drôles du quotidien, façon stand-up, puis enchaîne sans transition sur une réflexion sur la mort ou le capitalisme dans une tirade toute théâtrale...

On rit de son humour cynique, voire noir, on réfléchit ; le sketch suivant brise l’ambiance avec un thème sombre et mélancolique, puis l’humour revient, irrévérencieux. Le besoin de la validation des autres, la condition des gais dans le monde, l’envie d’un monde meilleur, la drague… C’est un grand huit d’humeurs, un vide-poche d’historiettes. Il touche aussi à tout dans la forme : il nous parle, puis slamme, déclame, improvise, récite, conte, raconte, rit ; en joual, en beau français, en anglais, en franglais, en mots laids.

Pépites poétiques sur scène épurée

La salle ? Devant quelques rangées de sièges, des tables plus intimes où les spectateurs se font face autour d’une bougie, comme dans un bar - les breuvages sont d’ailleurs à vendre tout au long du spectacle. Sur scène, rien, sinon une chaise, et un beau jeu de lumières en clair-obscur. Un vide qui laisse la place au corps et à la voix pour s’exprimer. On est vraiment dans l’ambiance d’un one-man-show à l’anglo-saxonne, loin de l’univers du rideau rouge et du décorum de théâtre.

«Je ne fais jamais les premiers pas, car j’ai peur de m’enfarger…» Si son «je» reste fictionnel, le texte a une forte teneur autobiographique, et David Paquet assume ses mots. C’est justement pour cela qu’il monte sur scène pour la première fois, lui qui est d’habitude caché derrière les mots. Diplômé du programme d’écriture dramatique de l’École Nationale de Théâtre, il a d’ailleurs reçu en 2010 le Prix du Gouverneur général et le Prix Michel Tremblay pour Porc-Epic, et a poursuivi sa création avec deux autres pièces.

Pour Papiers mâchés, il écrit, coproduit, met en scène et joue. Et c’est plutôt une réussite pour cette première création de l’artiste, en résidence depuis cette année au Théâtre d’Aujourd’hui, et ce, jusqu’en 2017. Un spectacle qui sème ses pépites poétiques et philosophiques comme autant de petites phrases spirituelles (le théâtre) enveloppées dans des biscuits chinois (l’humour pétillant). Il offre d’ailleurs une phrase à chaque spectateur à la fin ; pour nous souvenir de ressentir avant de chercher à réussir. Et d’oser sortir des sentiers battus ?

11-11-2015