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29-30 septembre et 1er octobre 2016, 20h
Yo, Carmen
Conception, direction et chorégraphie María Pagés
Textes María Zambrano, Akiko Yosano, Marina Tsvetáyeva, Marguerite Yourcenar, Margaret Atwood, Belén Reyes, Cécile Kayirebwa, Forug Farrojzad, Widdad Benmoussa, María Pagés
Danseurs María Pagés, Isabel Rodríguez, María Vega, Lucía Campillo, Sonia Franco, Macarena Ramírez, Natalia Alcalá, José Barrios, José Antonio Jurad

La légendaire María Pagés transcende le personnage mythique de Carmen dans une ode vibrante à la féminité. En compagnie de 8 danseurs et de 7 musiciens, elle s’impose encore et toujours comme figure emblématique mondiale du flamenco. De l’opéra de Bizet, elle garde une fine ligne mélodique et l’accompagne d’airs populaires qui l’ont inspirée. Et de cette bohémienne au funeste destin, elle fait surgir la femme plurielle et authentique. En 10 tableaux sculptés par la lumière, elle brosse le portrait d’un éternel féminin libre des préjugés et des convenances. Les corps ardents des danseuses ondoient, se cambrent et s’ancrent dans le sol tout en le martelant. Les bras fendent l’air dans d’infinies volutes. Les voix emplissent l’espace : chansons livrées par deux chanteuses, paroles scandées à l’unisson ou poèmes de femmes récités en plusieurs langues. Flamboyant.


Chanteurs Ana Ramón, Loreto de Diego
Guitare Rubén Levaniegos, José Carrillo “Fyty”
Percussion Chema Uriarte
Violoncelle Sergio Menem
Violon David Moñiz
Musique George Bizet, Sebastián Iradier, Rubén Levaniegos, Sergio Menem, David Moñiz, María Pagés
Conception des éclairages Pau Fullana
Création des costumes María Pagés
Assistant à la chorégraphie José Barrios
Teinture des matériaux et peintures Taller María Calderón
Réalisation des costumes Ángel Domingo
Plancher de danse Harlequin Liberty

Durée 1h20

Tarif : à partir de 36,50$

Rencontre post-spectacle avec les artistes
Vendredi 30 septembre 2016

Production María Pagés Compañía

Danse Danse


Section vidéo


Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts
Place des Arts
Billetterie : 514-842-2112 - placedesarts.com
 
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Critique

Les Carmen féministes de María Pagés


Crédit photos : David Ruano

Trois ans après Autorretrato, la reine du flamenco María Pagés est de retour à Montréal avec son plus récent spectacle Yo, Carmen (Moi, Carmen, en français).  Un titre qui évoque l’opéra Carmen de Bizet, lui-même tiré de la nouvelle de Prosper Mérimée.

Alors que la Carmen de Mérimée tombe sous les coups de couteau de son soupirant macho, Yo, Carmen résonne comme un vibrant et joyeux hymne féministe. Pour la Sévillane, qui s’est produite dans le monde entier, Carmen est toutes les femmes et toutes les femmes sont Carmen.

La créativité est au rendez-vous lors de ce spectacle d’une heure vingt, qui débute par un tableau où les danseuses entièrement habillées en noir se confondent avec l’obscurité de la scène. Seuls leurs éventails blancs se détachent de cette noirceur pour virevolter dans les airs, en continuité avec la modernité que María Pagés insuffle au flamenco depuis qu’elle a fondé sa compagnie en 1990. En dix tableaux, Pagés et ses six danseuses, accompagnées de ses sept musiciens, jouent avec les codes traditionnels de la féminité – la maternité, le placotage entre femmes ou encore leurs sacs à main – pour en montrer toutes les facettes. Ces symboles peuvent paraître un peu réducteurs, mais María Pagés a tenu à représenter les femmes dans leur vie quotidienne, sans jugement.

Au final, les artistes offrent une puissante ode à la femme dans toute sa richesse et sa diversité en incarnant des femmes qui lisent, rient, font le ménage, s’amusent, sont coquettes, pleurent… « Être femme, c’est vivre et vivre pour de vrai », clame María Pagés, qui appelle à libérer les femmes du carcan des crèmes de beauté prescrites par les médias et le marketing. Signe de ce souci d’authenticité, les danseuses sont parées de robes couleur chair, sans artifice, que María Pagés a elle-même dessinées. Leurs corps en mouvement sont mis en valeur par de simples, mais beaux jeux de lumière.

C’est également un plaidoyer pour l’égalité entre les sexes que la troupe nous livre. Un message qui se trouve renforcé par la sobriété de la mise en scène et de la musique, composée de chants andalous, d’airs de Bizet et de mélodies jouées à la guitare, au violon et au violoncelle.

La féminité à laquelle rend hommage María Pagés est aussi plurielle, en témoigne ce solo qu’elle interprète en mode garçonne, vêtue d’un pantalon et d’un haut noir.

Il est difficile de ne pas se laisser embarquer dans ce spectacle tant le plaisir de danser, et de vivre, de María Pagés est communicatif. Libre, envoûtante et charismatique, la virtuose, initiée au flamenco par le grand Antonio Gades, danse avec une énergie aussi ardente que sincère.  À 53 ans, celle qui est également chorégraphe bouge avec toujours autant de grâce et de fougue.

01-10-2016