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Du 20 janvier au 4 février 2012, 20h
Parenthèse des solsticesLa parenthèse des solstices
Texte Marc Donati, en collaboration avec l’équipe du spectacle
Mise en scène Michel Forget
Avec Gabriel Paré, Geneviève Boivin-Roussy

La vie de Michael et de Sophia appartient au rythme ininterrompu des solstices. Une succession de noirceur et de lumière sans parenthèse. Le père de Michael vient de rencontrer sa mort. Sophia a rendez-vous avec la sienne. Sur une toile leur servant de correspondance, ils imagineront ensemble leur relation improbable.

La naissante compagnie Les viscères présente un théâtre symbolique, explorant différentes facettes de la maladie mentale par le mouvement et l'art visuel. De ce processus de création est née une réflexion sur la mort et l'héritage familial.


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Conseiller dramaturgique : Martin Bellemare
Assistance à la mise en scène, direction de production et régie : Marjorie Lefebvre
Éclairages et direction technique : Marie-Josée Petel
Décor et costumes : Fannie Breton-Yockell
Conception sonore : Simon Rivest
Crédit photo: François Godard

Carte Premières
Cartes Prem1ères
Date Premières : du 20 au 27 janvier
Régulier : 20$

Carte premières : 10$

Une création Les Vicères


Studio Jean-Valcourt du Conservatoire d'art dramatique de Montréal
4750, avenue Henri-Julien
Admission : 514-790-1245

 
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 Critique
Critique

par Ariane Cloutier

La thérapie par l’art


Crédit photo : François Godard

En entrant au studio Jean-Valcourt du Conservatoire d’art dramatique de Montréal, ce qui nous frappe immédiatement est une forte odeur de peinture. Sur scène nous sera présenté un spectacle à mi-chemin entre la performance d’art visuel et théâtrale. La nouvelle compagnie Les Viscères propose un audacieux théâtre de création multidisciplinaire, né d’une collaboration entre artistes de la relève dont le noyau principal est constitué de diplômés de diverses promotions de l’Option-Théâtre du Cégep Lionel-Groulx. Le metteur en scène, Michel Forget, et l’auteur, Marc Donati, reconnaissent avoir travaillé en synergie avec les comédiens Geneviève Boivin-Roussy et Gabriel Paré, se livrant à une interprétation commune de la pièce par des séances où l’improvisation était de mise.

Puisant son inspiration dans le théâtre de l’antiquité grecque et dans le monde qui lui est contemporain, le jeune collectif dessine une œuvre métissée et intuitive. À mi-parcours, la pièce nous propose un tableau classique habilement réinventé dans lequel Andromède consulte l’Oracle au sujet de son avenir. Faisant écho à la quête d’identité et de sens qui consume les personnages contemporains, cette scène est probablement représentative de l’essence du spectacle. Sophia (interprétée avec sensibilité par Geneviève Boivin-Roussy) l’artiste se prenant pour Andromède jusqu’à vouloir s’approprier sa mort tragique, est confrontée à un spécimen humain plus commun — Michael (Gabriel Paré, joué avec une retenue qui parfois éclate). Tous deux, mues par une passion commune pour la peinture, se croisent dans un moment de mal-être alors qu’ils cherchent désespérément un sens à leur vie, obsédés par leur image personnelle et leur héritage familial. Ils alimentent leur quête de vision de tout ce qui leur tombe sous la main : tarot, livre de psycho-pop, numérologie, luminothérapie; on sent que tout ce cirque de symboles préfabriqués les éloigne davantage de leur être propre qu’une simple introspection. Construite en grande partie en monologues parallèles, la pièce nous livre la (non) rencontre de deux êtres isolés, telle une performance psychanalytique dans laquelle ils retournent leur intérieur vers le public et attribuent l’origine de leurs problèmes à leur lignée. Ces personnages en dérapage tentent absolument de trouver un sens profond à leur rencontre, sens qui s’avère être très différent selon l’interprétation de leur moi intime.

La scénographie, qui présente une pièce ouverte dont les murs sont en point de fuite forcée, intègre d’une façon semi-abstraite plusieurs éléments narratifs de la pièce, permettant de rassembler en un lieu unique les différents environnements du texte. Le mobilier et les accessoires utilisés dans mise en scène s’y trouvent dupliqués, dénaturés et intégrés de façon non figurative au tableau global de la scène. Comparativement aux mises en espace plus minimales auxquelles nous sommes habitués dans le théâtre actuel, cet espace semble quelque peu surchargé. La scène dévoile un éclairage apparent qui nous réserve d’agréables surprises, quelques éclairs de génie qui nous font découvrir le décor d’un nouveau point de vue. Sur un fond de couleur toile naturelle, la peinture vive explose sur le mur, le plafond, le plancher, collant à la fois aux vêtements et même à la peau des interprètes, suivant le rythme de leurs émotions. Le décor évoluera au fil des performances.

Le texte, d’une écriture fortement imagée, verse dans l’autodérision par sa matière première : les artistes tourmentés, la dramatisation « à la grecque », l’incompréhension authentique des individus, le besoin de l’autre comme béquille psychologique, pour pallier à la fois ses propres faiblesses et la cruauté du monde. Tous ces éléments sont présentés dans un enchainement de situations improbables. L’environnement sonore contribue énormément à lier les scènes et donner de la crédibilité aux lieux. Ces jeunes créateurs, bouillonnant d’idées nouvelles, actualisent astucieusement des thématiques millénaires en s’appropriant à la fois les technologies modernes et les techniques d’expression plus traditionnelles. En revanche, nous sentons qu’ils sont en processus de définition de leur langage créatif. Le résultat, quoique réussi, nécessiterait quelques coups de ciselage supplémentaire afin de prendre sa pleine valeur.

Ce spectacle d’une grande originalité nous révèle des talents à surveiller avec la plus grande attention.

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