Mon(Theatre).qc.ca, votre site de théâtre
30-31 octobre et 1er novembre 2013, 19h
Brimful of AshaA Brimful of Asha
Texte et interprétation Asha et Ravi Jain
Mise en scène Ravi Jain

« On ne choisit pas les membres de sa famille, alors pourquoi choisirait-on sa femme ? », se demande Asha, une mère indienne installée au Canada. Elle et son mari commencent d’ailleurs à s’inquiéter pour leur fils Ravi, toujours célibataire. Ainsi, quand celui-ci part en voyage en Inde, ils jugent que c’est le moment opportun pour lui faire rencontrer des épouses potentielles ! Avec ce spectacle présenté avec succès à Toronto, Ravi Jain nous invite à découvrir sa version maison de la grande histoire des conflits culturels et générationnels. Voici donc une mère et son fils réunis dans un décor de cuisine, prêts à confronter leurs opinions sur le mariage. Entre odeur de samosas et musique indienne, le public devient le témoin privilégié de leur joute verbale jubilatoire. Avec une spontanéité et un humour désarmants, A Brimful of Asha raconte une situation rocambolesque et bien réelle, dans laquelle chacun saura se reconnaître.

Ravi Jain est acteur, metteur en scène, producteur et éducateur. Il est également directeur artistique de la compagnie torontoise Why Not Theatre, réputée pour ses explorations narratives et ses créations multimédias. En 2012, il reçoit le prix Pauline McGibbon récompensant un artiste de la scène ontarienne en début de carrière qui s’est distingué par son talent prometteur et son potentiel d’excellence.


Section vidéo


Décors et costumes Julie Fox
Lumières et projections Beth Kates (Playground Studios)
Vidéos additionnelles Kate Fraser et Nabil Shash (Heartist Productions)
Coproduction Artistique Why Not Theatre

Régulier 25$ / Ainés 23$ / Réduit 20$
Durée 90 min
Un repas indien sera servi après la représentation, au coût de 15$, réservation via la billetterie de l'Usine C

Avec le soutien de Toronto Arts Council, Ontario Arts Council et du Conseil des arts du Canada
Présentation Usine C


Usine C
1345, avenue Lalonde
Billetterie: (514) 521-4493

Facebook Twitter
 
______________________________________
 Critique
Critique

par Ariane Cloutier

Ravi Jain et sa mère Asha nous accueillent chaleureusement dès notre entrée dans la petite salle du café de l’Usine C comme s’ils nous recevaient dans leur cuisine, en nous serrant la main, en nous offrant un samossa et en nous invitant à prendre place. On sent de prime abord que nous aurons droit à un spectacle qui sort des normes du théâtre traditionnel pour se rapprocher d’une performance beaucoup plus personnelle, inclusive. Durant la prochaine heure, Ravi et Asha (qui est la véritable mère de Ravi et non une actrice professionnelle) nous racontent avec beaucoup d’humour, à tour de rôle et parfois en s’entrecoupant la parole, leurs versions d’une histoire qui leur est arrivée à tous les deux.

Il s’agit de l’histoire d’une mère qui voudrait bien voir son fils marié selon les traditions jaïnistes (une des multiples religions indiennes, apparentée au bouddhisme) et de ce fils qui tente d’effectuer ses propres choix de vie, selon ce que l’on appelle communément le libre arbitre.

« You have not come here to see a play, you have come here to help us sort out a dispute » (vous n’êtes pas venus ici pour voir une pièce, vous êtes venus pour nous aider à régler une dispute) est la prémisse de la pièce. On nous avertit également que tout est vrai. Seulement, il y a parfois des divergences d’interprétation des faits entre les deux protagonistes. D’un côté, Asha, digne mère dévouée émigrée à Toronto immédiatement après un mariage arrangé en Inde, souhaiterait plus que tout au monde que son fils se marie. Pour elle, c’est une question de respect de la tradition et des valeurs familiales ; il en va de la réputation de leur famille en Inde, voire du salut de leurs âmes (selon ce que j’en ai compris, si un Jaïniste ne se marie pas, il brise un des chainons du cycle de la vie et pourrait ainsi causer sa non-réincarnation ou, pire, une réincarnation régressive). De l’autre côté, Ravi, jeune comédien torontois dans la fleur de l’âge, entend bien continuer de vivre sa vie comme il le désire et épouser, mais en temps voulu, la femme que lui désignera son cœur.

Ravi se retrouve donc en constant conflit avec ses parents, qui par toutes sortes de manigances essaient de le pousser au mariage : en recueillant les « bio data » de centaines de jeunes femmes de bonne famille, en organisant des rencontres et en allant même jusqu’à mettre une annonce dans un journal local en Inde. Patiemment, Ravi tente d’expliquer à sa mère qu’il veut faire ses choix, et que sans être en rupture totale avec les traditions familiales et religieuses, il s’est forgé une identité qui correspond davantage à des valeurs personnelles. Entre autres choses, il ne souhaite pas épouser une jeune femme seulement parce que sa famille possède de grandes richesses. Aussi, il entend continuer sa carrière de comédien, même si chacune de leurs connaissances en Inde lui demande à chaque voyage pourquoi il ne reprend pas l’entreprise familiale bien établie. Il s’agit en fait d’un conflit intergénérationnel marquant les différences entre les valeurs traditionnelles indiennes et certaines valeurs nord-américaines progressistes. La pièce soulève un questionnement très intéressant sur l’immigration et la dissolution partielle de l’identité ethnique entre la première et la deuxième génération au sein de la même famille.

La véritable histoire derrière A Brimful of Asha n’est pas une histoire de conflit, mais une histoire de tendresse. Elle relate une relation mère-fils par moment tendue, mais toujours ouverte à l’autre, à la discussion. C’est un spectacle délicieux, drôle et touchant, à voir absolument.  Pour clore la soirée, un repas indien végétarien est offert après le spectacle, authentique jusque dans le souci de décorer les tables de fleurs en plastique.

Le ton de la pièce est chaleureux, juste et extrêmement drôle. Dans un processus créatif consultatif, Ravi Jain et sa mère ont fignolé cette œuvre à travers une quarantaine de représentations en un an, avant d’arriver au scénario présenté aujourd’hui. Une grande place est toujours laissée à l’improvisation, même s’il existe maintenant une structure narrative.

Fondateur de la compagnie torontoise Why Not Theatre, Ravi Jain aremporté en 2012 le prix Pauline McGibbon pour son « talent prometteur et son potentiel d’excellence ». La compagnie offre des formations de jeu et présente en ce moment trois spectacles : Spent, Iceland et A Brimful of Asha. Rencontré après le spectacle, Ravi  Jain s’est dit très honoré d’être invité à présenter cette pièce à l’Usine C, où il vient chaque année en tant que spectateur du Festival TransAmérique.

01-11-2013