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Du 15 mai au 16 juin 2012
Une vie presque normaleUne vie presque normale
Livret de Brian Yorkey
Musique de Tom Kitt
Mise en scène Denise Filiatrault
Direction musicale Pierre Benoît
Traducton Yves Morin
Avec Geneviève Charest, Véronique Claveau, Jean Maheux, Benoît McGinnis, Renaud Paradis, Isabeau Proulx Lemire

Les Goodman vivent en banlieue, comme une famille normale. Dan essaie d’être un bon mari et un bon père, Gabe a tout ce dont une mère peut rêver pour son fils et Nathalie essaie d’être une fille parfaite, même si ce n’est pas facile. Il y a cependant une ombre au tableau : Diana, épouse et mère, n’arrive pas à faire le deuil de son fils décédé seize ans plus tôt. En quête d’équilibre, elle vit avec intensité les hauts et les bas de son quotidien dans un milieu qui est peut-être à la source de son mal de vivre. Pendant que son mari s’interroge et que sa fille vit ses premiers émois amoureux, Diana tente de se prendre en main. Comment décidera-t-elle de faire face à son avenir?

Après sa création en 2008, Next to Normal – le titre original de Une vie presque normale – a donné lieu à diverses productions aux États-Unis, en Norvège, en Finlande et plus récemment, en Australie. Le livret de Brian Yorkey et la musique de Tom Kitt ont valu plusieurs prix à cet opéra pop, dont le plus récent est le prix Pulitzer, en 2010. La mise en scène enlevante de Denise Filiatrault mettra en valeur le talent de Geneviève Charest, Véronique Claveau, Jean Maheux, Benoît McGinnis, Renaud Paradis et Isabeau Proulx Lemire, entre autres.

Avec un humour noir et une musique électrisante, Une vie presque normale nous montre comment une famille presque comme les autres navigue dans les eaux tumultueuses de la perte d’un enfant. Si cet opéra pop chante et fait vivre les joies et les tourments des Goodman, il amène aussi les spectateurs dans un univers musical riche et dynamisant.


Section vidéo
deux vidéos disponibles

   

Assistance mise en scène : Marie-Hélène Dufort
Direction musicale Pierre Benoît
Décors Jean Bard
Costumes Suzanne Harel
Éclairages Claude Accolas
Accesoires Alain Jenkins
Maquillages et coiffures Jean Bégin
Design sonore Martin Léveillé

Une production de 9207-7569 Québec inc.


Rideau Vert
4664, rue Saint-Denis
Billetterie : 514-844-1793

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 Critique
Critique

par Olivier Dumas


Crédit photo : Jean-François Hamelin

Depuis plus de deux décennies, Denise Filiatrault multiplie les succès populaires et financiers en reprenant pour le public québécois des comédies musicales de Broadway. Pour la fin de la présente saison du Rideau Vert, elle propose la version française de Next to Normal, Une vie presque normale. Malgré certains éléments moins concluants, le résultat se révèle très divertissant, très humain et très touchant. 

Récipiendaire d’un prix Pulitzer pour son sujet, le spectacle traite de réalités lourdes comme la maladie mentale, la difficulté d’assumer le deuil d’un enfant et les dilemmes personnels de l’adolescence. Les enjeux se situent à des années-lumière de destinées singulières, opulentes ou excessives des précédentes réalisations de Denise Filiatrault comme Sweet Charity, Neuf ou My Fair Lady. L’histoire d’Une vie presque normale se penche sur les problèmes des Goodman, une famille nucléaire de classe moyenne du pays de Barack Obama. Incapable de vivre dans le moment présent, la mère Diane se remémore son fils disparu seize années auparavant. Tiraillée entre ses sentiments fraternels et un désir de rébellion, Nathalie, la fille unique, essaie d’être parfaite, plonge tête première dans la musique, et rencontre un charmant garçon qu’il l’éveillera aux premiers émois amoureux. Dan, le père, tente d’être l’époux le plus attentionné qui soit. Mais le drame frappe à la fin du premier acte, alors que Diane se retrouve hospitalisée. Parviendra-t-elle à se reprendre en main?

Fait intéressant, l’univers dans lequel baigne Une vie presque normale trouve à la fois plusieurs échos dans les psychés états-uniennes et québécoises. Son contenu s’inscrit dans la tradition du musical américain où les chansons jettent un baume sur le cœur devant les épreuves individuelles et collectives. Le spectateur veut se sentir réconforté et rassuré dans une société économiquement et idéologiquement vacillante. Nous reconnaissons le flair de la metteure en scène d’avoir repéré le fort potentiel mélodramatique qui touche toujours ici une corde sensible chez plusieurs personnes. Dans ce drame intimiste où les énormes difficultés triomphent du mal, les violons se font entendre sans beaucoup de subtilités, mais de manière efficace. Pendant deux heures entrecoupées d’un entracte, les intrigues se regardent et s’écoutent agréablement sans temps mort. Plus ramassée, la deuxième partie comporte plus de moments forts et intenses.


Crédit photo : Jean-François Hamelin

Si la version originale de la comédie musicale s’est démarquée par l’audace des thématiques abordées dans ce type de répertoire, son univers a été maintes fois exploité par le petit et le grand écran. Parfois, on se croirait dans un téléroman psychologique des années 1990, notamment lors des scènes entre la fille et son prétendant, ou encore dans les échanges entre la mère et son médecin. Mais le ton demeure toujours juste, entre les rires et les larmes. Par ailleurs, le public, nombreux le soir de la première médiatique, a semblé être interpellé par la production comme en a témoigné l’ovation à la tombée du rideau.

La conception sonore de la pièce accompagne l’action sans toutefois la transcender. Traduites en français par Yves Morin, les paroles des chansons expriment bien dans une langue quotidienne les états d’âme des protagonistes. Par contre, aucune pièce ne se démarque du lot ou ne risque de laisser des traces dans nos oreilles.La musique de Tom Kitt rappelle curieusement celle de Romano Musumarra, compositeur entre autres de Cyndi avec Luc Plamondon, dans ses numéros plus soft-rock. Les moments musicaux sous un ton plus doux rappellent les mélodies d’un David Foster. Mais le sens mélodique n’est pas aussi accrocheur que chez un Cole Porter, un Gershwin ou un Michel Berger pour citer des maîtres dans le domaine.

Heureusement, ce sont le talent, la ferveur et l’énergie des acteurs-chanteurs qui permettent à Une vie presque normale de révéler ses plus beaux atouts. Dans le rôle de la mère, Geneviève Charest sait rendre toutes les nuances de cette femme courageuse devant des épreuves déchirantes.En époux dévoué, Jean Maheux, possède une voix remarquablede justesse et de sensibilité, arrimant à la fois la force et la fragilité de son personnage.Très remarquée par ses prestations dans les revues annuelles du Rideau Vert, Véronique Claveausurprend par son talent dans un rôle plus dramatique malgré une tendance à surjouer parfois les émotions. Leurs partenaires de jeu, Benoît McGinnis et Renaud Paradis sont également très crédibles. En fils fantôme, Isabeau Proulx Lemirese démarque par l’étendue de son registre vocal et son aisance physique.

La direction d’acteur de Denise Filiatrault est encore une fois impeccable et irréprochable. Avec son dynamisme, elle confère une énergie à ses spectacles en amalgamant tous les ingrédients en un ensemble cohérent. Par contre, il peut être décevant de constater que son travail sur cette production ressemble énormément à celle présentée sur les planches de Broadway. Plusieurs similitudes se remarquent dans les éclairages, ses couleurs et les différents lieux répartis sur deux paliers. Pour un spectacle créé à la fin des années 2000, une approche plus différente de la création aurait témoigné d’une véritable relecture et une vision plus personnelle d’une œuvre aux multiples possibilités.   

À la sortie du théâtre,après deux heures trente et des poussières, on retient de cette Vie presque normale beaucoup d’émotions, des applaudissements nourris et des interprètes à la passion chevillée au corps qui compensent toutes les faiblesses.

20-05-2012