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Du 19 mars au 6 avril 2013, mardi au samedi à 20h15, mercredi 19h15, 30 mars 16h15
HypnoHypno
Texte de Simon Boudreault
Mise en scène Luc Bouffard
Avec Geneviève Beauchemin, Martin Grenier, Martin Tremblay (en remplacement de Francis Martineau) et Marie-Hélène Gosselin

Un hypnotiseur charismatique qui se donne en spectacle… assisté de sa fidèle épouse qui n’a aucune idée de la réalité dans laquelle elle se trouve… Un fanatique admirateur à la recherche d’une femme légère… son épouse, animée d’une soif de vengeance, réclame des comptes à notre homme de scène…

Voilà notre quatuor de personnages! À travers la rencontre loufoque de ces quatre « pôles », Simon Boudreault, auteur de plusieurs comédies grinçantes (Sauce brune, Soupers, D pour Dieu?) pose ici un regard profondément humain sur les obstacles rencontrés au cours d’une vie. Vaut-il mieux ranger les mauvais souvenirs au rayon des oubliettes afin de vivre une existence sans anicroche? Ou bien vivre pleinement, avec le lot de conséquences qui en découlent?

Être ou ne pas être… conscient! Voilà la question!


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Scénographie Cloé Alain-Gendreau
Régie et éclairages Nadine Jodoin 
Son Guillaume Sauriol-Lacoste
Crédit photo - Marie-Anne Lemire

Une production Tsunami Théâtre


Prospero, salle intime
1371, rue Ontario est
Billetterie : (514) 526-6582

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 Critique
Critique

par Daphné Bathalon


Crédit photo : Marie-Andrée Lemire

Pour sa toute première production, la compagnie Tsunami Théâtre avait produit en 2004 Vague de fond, signé par le dramaturge et comédien Simon Boudreault. Elle renoue avec son écriture en présentant Hypno à la salle intime du Prospero jusqu’au 6 avril. La pièce, écrite en 2006, s’interroge sur notre besoin inconscient d’être pris en charge pour atteindre une certaine forme de bonheur, même au prix de ne plus être soi-même.

François Erikson est le Prince de l’hypnose. Il donne des spectacles devant un public conquis par ses grands talents d’hypnotiseur. Mais dans sa vie privée, tout ne tourne pas aussi rondement : sa femme semble étrangement détachée de la réalité, un admirateur le poursuit jusque chez lui, et la femme de ce fan obsessif menace Erikson de dévoiler son grand secret s’il ne fait pas tout ce qu’elle lui demande…

Fidèle à son style, Boudreault propose une pièce à la fois absurde et acide, qui mêle allègrement l’humour au drame, le rire au dilemme moral (on se souviendra du terriblement percutant Sauce brune). Hypno pose de fait deux grandes questions : celle de la quête du bonheur et celle des limites de l’hypnose. Les personnages d’Hypno en viennent à croire que l’hypnose peut régler tous leurs problèmes, mais découvrent tout aussi rapidement qu’elle en cause des nouveaux. Au fond, l’hypnotiseur ne peut contraindre sa victime à faire quelque chose qu’elle ne serait pas prête à faire... La trame temporelle totalement éclatée laisse petit à petit apercevoir les secrets des personnages ainsi que leurs motivations, pas fondamentalement mauvaises.

Remplaçant au pied levé le comédien Francis Martineau (il a appris la nouvelle à peine dix jours avant la première), Martin Tremblay s’en tire bien vu les circonstances. Il offre une interprétation nuancée et sensible du personnage de l’hypnotiseur pris au piège de ses propres manipulations, aussi bien intentionnées soient-elles. Seuls quelques petits accrochages lors de la première, surtout quand le rythme des répliques accélère, ont trahi son manque de pratique. Il lui manque également encore un peu d’assurance dans les extraits du spectacle de l’hypnotiseur insérée dans la pièce. Des faiblesses qui s’atténueront probablement au fil des représentations.


Crédit photo : Marie-Andrée Lemire

Si l’arc dramatique fonctionne bien, la mise en scène s’appuie davantage sur la comédie au détriment  des moments dramatiques, qui auraient mérité plus d’attention. Les échanges entre Erikson et sa femme, Sandrine, en sont un bel exemple. Entre eux, on ressent l’amorce d’un drame, qu’on effleure à plusieurs moments avant le dénouement. Leur secret, caché derrière un bonheur apparent, est d’une grande force dramatique, mais son dévoilement est affaibli par une fin trop précipitée et un peu de cabotinage. Tout déboule d’un seul coup sans que le public ait le temps d’apprécier les gestes et les regards plus douloureux. En l’état, les séquences comiques du second couple, formé de Victor et de Rogère (efficaces Martin Grenier et Marie-Hélène Gosselin), font de l’ombre au Prince et à sa femme. La construction de la pièce, censée nous mener peu à peu au drame final, en souffre. Certains ajustements seront, de toute évidence, nécessaires, notamment pour laisser au public le temps de rire avant de mieux le plonger dans le drame.

La pièce, décrite comme une comédie dramatique fantastique, cherche pour l’instant un équilibre entre ces trois pôles. Encore imparfait, le spectacle n’en est pas moins prometteur. Il pose un regard lucide sur notre perpétuel besoin de contrôler nos vies pour parvenir à être heureux tout en nous faisant rire… parfois jaune.

21-03-2013