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Du 1er au 30 novembre 2014
VenusSocial Studies
By Tricia Cooper
Directed by Paul Van Dyck
Starring Jaa Smith-Johnson, Patricia Summersett, Emily Tognet, Jane Wheeler
A New Age single mother takes in a boarder, a lost boy of Sudan, just as her adult daughter returns home to cocoon after a failed marriage. Her other daughter, a teenager, decides to chronicle the recent immigrant's story as a class project and in the course of learning about his incredible ordeal, develops a schoolgirl crush. Cultural differences and thwarted expectations make this a charming and stingingly truthful story of four people trying to do the right thing.

Set and Costume Design Evita Karasek
Lighting Design Jody Burkholder
Stage Manager Melissa Tordjman
Apprentice Stage Manager Melanie St-Jacques

Tuesday to Saturday - 8:00PM
Saturday - Sunday Matinees - 2:00PM, Wednesday Matinee – Nov. 19-26 - 1:00PM

Centaur Productions


Centaur Theatre
453, St-François-Xavier
Box office : 514-845-9810

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 Critique
Critique

par Geneviève Germain


Crédit photo : Andrée Lanthier

Entre 1983 et 2005, plusieurs dizaines de milliers de jeunes Soudanais, souvent devenus orphelins, ont fui la guerre dans leur pays pour tenter de trouver refuge ailleurs. Ces jeunes, surnommés les « lost boys of Sudan », ont souvent été témoins d’atrocités et en ont vécu aussi. Ils arrivent donc à la fois démunis par leur statut précaire de réfugiés, mais aussi marqués par des années de carences et par une culture bien différente de celle de leur pays d’accueil. Qu’arrive-t-il lorsqu’une famille canadienne décide d’aider un de ces jeunes maintenant devenu homme? La simple volonté de vouloir comprendre et aider est-elle suffisante? C’est ce sujet complexe qu’explore l’auteure originaire de Winnipeg, Tricia Cooper, dans sa toute première pièce intitulée Social Studies.

C’est avec une écriture tout en humour que l’auteure a abordé ce sujet délicat. Il faut dire que Tricia Cooper a d’abord écrit des comédies à sketch avec la Royal Liechtenstein Theatre Company et est également une habituée du circuit du Festival Fringe. En entrevue pour le Centaur Theatre, elle avoue que l’histoire est inspirée d’un fait vécu de sa vie : en retournant vivre quelque temps chez sa mère à Winnipeg, celle-ci lui annonce qu’elle a invité de jeunes Soudanais à vivre chez elle. C’est exactement ce que vit le personnage de Jackie dans sa pièce. Toutefois, le reste de l’histoire est fictif. Jackie (Eleanor Noble) vient de se séparer et souhaite trouver du réconfort auprès de sa famille. À son grand désarroi, sa chambre a trouvé un nouveau pensionnaire, Deng (Jaa Smith-Johnson), jeune Soudanais que sa mère Val (Jane Wheeler) souhaite aider, et l’autre chambre est déjà occupée par sa sœur adolescente, Sarah (Emily Tognet). Loin de retrouver toute l’attention à laquelle elle croit avoir droit, Jackie se méfie de ce nouveau venu et manigance pour retrouver sa place.

Dès le début de la pièce, la mise en scène de Paul Van Dyck contribue à démontrer l’immense fossé entre la vie confortable de cette famille winnipegoise et le vécu cauchemardesque des enfants qui ont vu la guerre. Des images de ces jeunes mal nourris, de bombes et d’explosions, sont projetées sur les murs du décor de la scène, maison typique de classe moyenne, sur l’air de « Happy Together ». Déjà, on met le doigt sur le malaise qui grandit au fil de la pièce, soit cette volonté d’en quelque sorte compenser pour ces années de misère alors que le manque à gagner, et la guérison à atteindre, sont immenses. Deng est dépeint comme un jeune homme poli, à la posture droite et rigide, invariablement souriant et toujours repentant lorsqu’il fait des erreurs. Val lui offre les clés de sa voiture, l’accès illimité à sa maison et lui ouvre grand son garde-manger. En même temps, Val tient un tout autre discours envers sa fille Jackie à qui elle refuse les clés de sa voiture en lui disant que ce serait bien qu’elle prenne l’autobus,  émet des commentaires sur le fait qu’elle ne paie pas l’épicerie et souligne qu’elle devrait élaborer un plan pour retrouver un emploi. Pourtant, tous deux finissent par faire faux pas : Deng en cumulant les mensonges et Jackie en s’achetant un VUS de luxe alors qu’elle n’a aucun moyen financier.

Une des forces de Social Studies est que la pièce dépeint des personnages aux bonnes intentions, mais résolument bourrés de défauts, les rendant ainsi plus humains. Elle soulève également plusieurs questions de taille sur la consommation, l’honnêteté, la famille et les écarts culturels sans tomber dans la généralisation ou le misérabilisme. Toutefois, l’humour de type « sitcom » de l’auteure semble parfois pousser les acteurs à mettre trop d’emphase sur certaines répliques ce qui exagère certains de leurs traits et prises de position, les rendant plus caricaturaux. D’ailleurs, malgré l’effort porté sur ces « punchlines », plusieurs des répliques tombent à plat et auraient gagné à être plus nuancées pour rappeler la profondeur et la complexité du sujet abordé.

Même si le jeu n’est pas toujours égal ni juste, c’est d’abord et avant tout l’originalité de l’histoire qui retient notre attention. La proposition de la jeune auteure canadienne Tricia Cooper offre un terreau fertile de réflexion et permet d’aborder efficacement un sujet sérieux avec un peu plus de légèreté.

10-11-2014