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Du 21 janvier au 1er février 2014, supplémentaire 1er février 20h
VentreVentre
Texte Steve Gagnon
Mise en scène Denis Bernard
Assistance à la mise en scène Adèle Saint-Amand
Avec Marie-Soleil Dion et Steve Gagnon

En pleine nuit, dans les décombres d’un appartement. Dehors, c’est le chaos, il y a des files énormes à l’entrée des bars. Partout, les femmes et les hommes sont soûls, les radios diffusent des tounes de la Compagnie Créole. Dehors, c’est insupportable. Elle défonce la porte et entre. Elle se retrouve face à son ex-copain. Elle a eu une aventure avec quelqu’un d’autre, il est parti. Elle revient pour exorciser quelque chose. Ils ont tous les deux la chair et le coeur à vif. C’est l’histoire d’un pacte pour la résistance, contre la noirceur. C’est l’histoire d’une société, d’un peuple mené par la peur, qui manque de refuges.

Avec Ventre, nous nous dressons pour nous opposer à la tranquillité et au silence. En cette période où l’amour nous glisse entre les doigts, où les médias nous prennent pour des imbéciles, où la politique est davantage de la business, nous avons décidé que nous ne participerions plus à la noirceur collective.

Par quoi pouvons-nous répondre à tout le cynisme ambiant ?

Quels moyens avons-nous de résister à toute la mort, à toute la résignation, à toutes ces défaites qui nous entourent ?


Décor, costumes et éclairages Lucie Bazzo
Musique Uberko

Une production Théâtre Jésus, Shakespeare et Caroline


Premier Acte
870, de Salaberry
Billetterie : Réseau Billetech 418-694-9656

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Dates antérieures (entre autres)

Du 7 au 23 janvier 2013, Petite Licorne

 
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 Critique
Critique

Collaboration spéciale de Guillaume Garcia


Crédit photo : Premier Acte

Une histoire de tromperie, c’est moche, c’est triste, c’est noir. Abimé et étouffé par la morosité et le pessimisme ambiant, un couple va pourtant tenter de repartir, de pardonner. Face à l’amoncèlement des nouvelles de catastrophes naturelles, économiques et du mur dans lequel fonce le monde, l’amour et la confiance restent les seules armes que possèdent les deux personnages de la pièce Ventre, deuxième volet d’une trilogie entamée par Steve Gagnon.

L’appartement est dégueulasse, jonché de canettes de bière et de bouteilles de vodka. Les murs décrépis embrassent un espace chaotique, symbole de la déchéance morale et amoureuse que vit le personnage masculin de Ventre. Une jeune femme défonce la porte de l’appartement et commence un monologue, sorte d’argumentaire en forme d’excuses, pour demander le pardon de l’être aimé, mais trompé.

Le texte est cru. Ça parle de sperme, de sucer, de lécher, de tout ce qui liait le couple avant l’escapade extraconjugale de Madame, qui est allé chercher l’expérience d’avoir un autre dans elle, juste pour voir.

De discussion entre les deux êtres blessés, il n’y a pas. On a plutôt à faire à deux monologues, deux murs se renvoyant la balle de la discorde.

Sorti de sa baignoire, sorte de cocon glacé qui lui permet de se remettre les idées en place et de supporter la douleur et la chaleur insupportable infligées par la trahison, le jeune homme ne parvient pas à oublier. Le pardon est difficile à donner.

Les tableaux se succèdent, les titres s’affichent au mur et nous retracent le parcours de ces deux jeunes dans la vingtaine, pas vraiment encore sortis de l’adolescence et pas vraiment prêts à devenir des « grands ».

Face au mutisme de son ex, la jeune femme lui rappelle les bons moments passés ensemble, les rires, les pleurs, le sexe et l’attirance de leur corps l’un pour l’autre. On sent la carapace de l’homme se percer. On peut être aigri, déçu, mais comment contrôler ses pulsions, ce magnétisme qui nous pousse dans les bras de l’autre?

Les deux monologues s’enchainaient sans succès, mais les frôlements, les caresses, réussissent là où les mots avaient échoué à soigner les maux. La reconquête est lancée.

Le jeu physique des comédiens tient un rôle important dans la pièce Ventre. La jeune femme est énervée, arpente furieusement l’appartement, frappe dans les canettes de bière, souhaite le contact physique avec son ex-amant, tandis que lui reste dans son coin, crachant sa haine à distance.

La lourde atmosphère pousse le spectateur dans ses derniers retranchements ; on est au coeur de leur intimité. On éprouve de la gêne à se retrouver témoin du mélange des corps. On les voit se déshabiller, se toucher pour mieux se retrouver, leurs corps ne pouvant se dire non.

Ceux qui ont déjà perdu et retrouvé un même amant plusieurs fois comprendront. Le monde n’est pas aussi noir qu’on veut nous le faire croire.

31-01-2014



par Véronique Voyer

Le cœur au Ventre


Crédit photo : Daphné Caron

Cette urgence, ce ton impératif de ceux qui sont prêts à tout par amour, marque la pièce Ventre. Ainsi, un couplese met à nu, écorché vif par l’impardonnable. De minuit à l’aurore, elle insiste sans relâche pour retourner dans ses bras. Lui? Il tente de ne pas flancher.

Cette pièce constitue le deuxième volet de la trilogie théâtrale du comédien et dramaturge Steve Gagnon. Après La montagne rouge (SANG), il continue son exploration sur le même thème, soit la séparation amoureuse. Ventre, c’est un crescendo d’émotion, de manque, de douleur, de passion et d’espoir qui nous plonge au cœur d’un couple en crise. Le sujet n’a rien de drôle, ce qui n’empêche pas le dramaturge d’écorcher la culture de masse avec une ironie désarmante. L’humour ponctue un désarroi plutôt extrême, car si cette pièce est relativement courte, elle n’est pas dénuée d’intensité. Évidemment, le propos n’a rien de fleur bleue, mais il reste tout de même très lumineux.

Mise en scène par Denis Bernard, l’action se partage entre un bain, une porte et un lit complètement démoli. Les déplacements sont marqués de colère, de peurs et d’inconfort, bref, de tout ce qui vient lorsqu’une relation à long terme entre en crise. Après quatre ans d’amour, l’adultère se glisse dans le couple. Si la peur de se faire mal est palpable chez les deux protagonistes, le couple ne parvient pas à vivre l’un sans l’autre.

Il est dur d’aimer et de croire dans une époque chaotique. Pour illustrer le propos, la jeune femme (Marie-Soleil Dion) se questionne : pourquoi ils disent qu’on était 75 000 à manifester alors qu’ils y avaient 200 000 personnes dans les rues? Comment expliquer que 1.2 million de Québécois écoutent l’Auberge du chien noir? Quels sont nos lieux collectifs ? Alors que les nouvelles atroces nous inondent via les médias, le besoin viscéral de ce couple persiste, ils continuent de croire et de s’aimer.

La jeune amoureuse esseulée propose à son copain (Steve Gagnon) d’oublier son cœur et sa tête, le temps que leurs mains fassent le reste. C’est donc par les extrémités que les deux corps se retrouvent. Cette soif sensorielle se déclenche quand l’amour vacille : plus faim, plus soif, plus d’énergie, plus envie de rien. Leurs mains sont au cœur d’une quête de sens que la logique et les émotions embrouillent. La jeune comédienne insiste à coup de souvenirs heureux, de regrets, de voyage, de blagues de boites à lunch, mais aussi, tente le tout pour le tout avec sa peau ; alors qu’elle devrait être fragile, dénudée, c’est lui qui est ébranlé, jusqu’au plus profond de son être.

Ces mains qui explorent et se souviennent sont l’un des titres qui apparaissent en cursive au fond de la scène entre chaque tableau. Les titres ponctuent cette nuit où les souvenirs, l’infinie tristesse, la joie immense, la déception et la trahison se rencontrent, le temps d’une nuit.

11-01-2013