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Du 3 au 28 novembre 2015 - supplémentaire samedi 28 novembre 2015, 20h
19841984
Texte George Orwell
Nouvelle adaptation de Robert Icke et Duncan Macmillan
Traduction Guillaume Corbeil
Mise en scène Édith Patenaude
Avec Véronique Côté, Maxim Gaudette, Eliot Laprise, Justin Laramée, Eric Leblanc, Alexis Martin, Claudiane Ruelland, Réjean Vallée

Dans un régime dirigé par Big Brother, Winston Smith est chargé de réécrire l'Histoire dans le cadre de son travail au ministère de la Vérité. Il demeure, à chaque instant susceptible d'être traqué par la Police de la Pensée. Malgré cela, il tente de comprendre la motivation de la didacture totalitaire mise en place. Il commence à écrire un journal afin de laisser une trace du passé et de la vérité.

Il tombe amoureux de Julia, ils s'aiment et font l'amour clandestinement. Avec elle, il rêve d'un soulèvement. Ils croient fermement au mythe d'une Fraternité clandestine dirigée par le charismatique O'Brien qui unirait les résistants. Il sait également que tôt ou tard, il devra payer le prix de tous ces « crimes » envers le Parti. À moins qu'il réussisse à rencontrer O'Brien.

Cette adaptation théâtrale de 1984, d'une redoutable efficacité, tire le suc du roman culte de George Orwell. Elle met en évidence la société de surveillance, la réduction des libertés individuelles mais aussi tous les mécanismes mis en place par l'homme pour cadenasser la pensée. Un classique criant d'actualité dans une mise en scène enlevante d'Édith Patenaude.


Scénographie : Patrice Charbonneau-Brunelle
Costumes : Karine Mecteau-Bouchard
Éclairages : Jean-François Labbé
Musique : Mykaëlle Bielinsky
Vidéo : Louis-Robert Bouchard
Assistance à la mise en scène : Caroline Boucher-Boudreau

Mardi et mercredi 19h30
Jeudi au samedi 20 h
Les samedis de la première et deuxième semaines : 20h.
Les samedis de la troisième et quatrième semaines : 16h.
Le dimanche entre la deuxième et la troisième semaine : 15h ;
À noter qu'il n'y a pas de représentation le mardi de la quatrième semaine.

Coût : entre 30$ et 55$ selon les jours et les forfaits

Les Étincelles 
Lors des ateliers créatifs Les Étincelles, les enfants de 6 à 12 ans se familiarisent avec le théâtre en participant à des exercices sur des thèmes aussi variés que le conte, la marionnette, le réchauffement d'acteur ou encore la comédie musicale. Du théâtre dans sa forme la plus ludique, joyeuse et spontanée. Ils sont accompagnés d’une équipe d'animateurs chevronnés, dont le scénographe Vano Hotton, le musicien Frédéric Lebrasseur et les comédiennes Marjorie Audet, Amélie Boisvert, Mélissa Bolduc et Dominique Deblois. À la fin de la représentation de la pièce (1984, Quills, Lapin Lapin et L’orangeraie), les parents rejoignent les enfants dans la salle de répétition pour découvrir leurs créations.

Horaire
Cinq ateliers différents seront présentés à deux reprises par production pendant la saison théâtrale 15/16 du Trident. Ces ateliers ont lieu durant une représentation d’après-midi de la pièce à l’affiche. Les dates des prochains ateliers Les Étincelles sont les suivantes :

  • Samedi 28 novembre 2015, à 15 h 30 (pendant une représentation de 1984 de George Orwell);
  • Dimanche 24 janvier 2016, à 14 h 30 et samedi 6 février 2016, à 15 h 30 (pendant des représentations de Quills de Doug Wright);
  • Dimanche 13 mars 2016, à 14 h 30 et samedi 26 mars 2016, à 15 h 30 (pendant des représentations de Lapin Lapin de Coline Serreau);
  • Dimanche 8 mai 2016, à 14 h 30 et samedi 21 mai 2016, à 15 h 30 (pendant des représentations de L’orangeraie de Larry Tremblay).

Plus d’informations et inscriptions
418 643-6389
www.letrident.com

Tarif
Le coût de l'atelier est de 10 $ par enfant. Les places sont limitées. 
Les adultes bénéficient d'un rabais de 15 % sur l'achat de leurs billets de spectacle à l'unité. Une formule d'abonnement est également disponible.

Coproduction Le Trident et Théâtre Denise-Pelletier


Théâtre du Trident
269, boul. René-Lévesque Est
Billetterie : 418-643-8131 - 1-877-643-8131

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Critique

Crédit photo : Stéphane Bourgeois

Loi C-51. Edward Snowden. Dépendance à l’écran télé, de l'ordinateur ou des téléphones intelligents. GPS qui nous suit partout. Déstructuration et appauvrissement du langage causés, entre autres, par les SMS. Télé-réalité. Propagandes sur Internet. Système de sécurité étendu et envahissant - une caméra de surveillance pour 15 habitants en Angleterre. Le récit dystopique 1984 de George Orwell, que l’on pouvait qualifier encore récemment de roman pionnier de la science-fiction moderne, quitte de plus en plus son côté fantastique pour s’approcher étrangement d’une certaine réalité contemporaine. Il s’impose de plus en plus comme l’avertissement qu’Orwell dédiait à ses compatriotes, en 1949 : inquiété, entre autres, par le système soviétique, le Parti Unique et les camps de rééducation, marqué par la Deuxième Guerre mondiale, Orwell avait imaginé ce conte philosophique pour mettre en garde les gens contre le totalitarisme de l’époque. Aujourd’hui, 1984 fait partie de la culture populaire et s’avère, par ses thèmes et ses théories, terrifiant d’actualité. Ce n’est plus une lubie, Big Brother is watching.

En coproduction avec le Théâtre Denise-Pelletier, le Trident frappe un grand coup en présentant en première mondiale une percutante adaptation de 1984, signée Robert Icke et Duncan Macmillan, génialement traduite par Guillaume Corbeil. L’une des plus brillantes idées de cette adaptation est de mettre en contexte le récit du roman dans sa propre ligne du temps. On se retrouve plusieurs années après la mort de Winston Smith, où des lecteurs discutent du livre avec beaucoup d’émotion. Smith semble exister dans ce monde en même temps que dans le sien, faisant le pont entre la pseudo-réalité du bouquin et celui du futur ; une utilisation d’une rare intelligence des appendices du livre intitulé « Les principes du novlangue », la réelle fin du livre, qui décrit peut-être le sort du monde après la mort de Smith, si l’on sait lire entre les lignes.


Crédit photo : Stéphane Bourgeois

La mise en scène d’Édith Patenaude, qui donne quelques sueurs froides, est d’une redoutable efficacité : elle place le spectateur dans une situation d’hyper passivité, lui faisant avaler tout ce qu’elle veut bien lui montrer. Durant presque toute la représentation, les scènes sont captées par une caméra et retransmises sur écran géant au-dessus de la scène. Comme de nombreux moments sont joués loin du public, en retrait ou cachés, ces images sont le seul lien possible entre les acteurs et la salle. L’idée colle totalement au récit, créant une relation de voyeurisme exacerbé et une distance non négligeable entre les spectateurs et les personnages ; une certaine apathie s’installe dans l'auditoire, qui se disloque, explose et disparaît entièrement lors des scènes de torture, en avant-plan, à la fin de l’histoire. Louis-Robert Bouchard à la conception vidéo, Larry Rochefort à la direction photo et Eliot Laprise qui manipule la caméra font un travail extraordinaire : il y a une réelle qualité cinématographique qui se déploie sur grand écran, avec de superbes plans de caméra, éblouissant (et trompant) l’œil du spectateur attentif - impossible de quitter des yeux cet écran qui magnifie les gestes des personages. La scène est plongée dans une pénombre pesante et mystérieuse, métaphore de l’aveuglement des humains dans cette société endoctrinée. Mais sans lumière, point d’image : la retransmission vidéo est donc possible grâce aux éclairages de Jean-François Labbé, qui utilise des projecteurs pour isoler les personnages et les extirper doucement de la noirceur, ou de puissants néons verticaux qui créent un effet futuriste saisissant, aveuglant la salle lors de moments plus intenses.   


Crédit photo : Stéphane Bourgeois

La scénographie de Patrice Charbonneau-Brunelle offre trois espaces distincts : côté jardin, une longue table de type cafétéria où se rencontrent Winston et les camarades Syme et Parsons ; au centre, un espace vide, avec quelques colonnes qui semblent soutenir l’énorme écran, qui se transformera en chambre secrète, lieu de rendez-vous pour les ébats interdits de Julia et Winston ; côté cour, des étagères de métal, recréant sommairement la boutique de l’antiquaire où Winston trouve son journal et une boule de neige musicale, fragment d’un passé maintenant disparu, oublié. La musique électro de Mykalle Bielinski (Photosensibles), qui rappelle parfois les trames sonores de films de science-fiction à la Blade Runner, appuie avec efficacité le rythme parfois suspendu, parfois tendu, de la pièce.

Maxim Gaudette endosse d’admirable façon le rôle de Winston Smith ; d’abord doutant, puis persuadé de sa haine envers le Parti, on le sent toujours décalé, entre le rebelle qu’il devient et l’être fantomatique, en marge de sa société, désireux de laisser une marque du passé aux générations futures - une idée interdite par la Police de la Pensée, qui torture et tue les compatriotes qui osent réfléchir (ainsi). Claudiane Ruelland joue une Julia vivante, inspirante, résistante, qui veut jouir de la vie. Alexis Martin est diablement parfait dans les habits d’O’Brien : peu d’acteurs auraient pu incarner avec autant d’élégance et d’intransigeance ce personnage calculateur et sans cœur, à la rhétorique implacable, totalement dédié au Parti. Véronique Côté, Jean-Michel Déry, Eliot Laprise, Justin Laramée et Réjean Vallée complètent joliment la distribution.

Sommes-nous libres, comme Winston n’a jamais pu l’être, ou sommes-nous devenus esclaves d’un système qui n’a que changé d’apparence ? En jouant avec les éléments du livre culte d’Orwell, dont la perception de la réalité et de la vérité, la pièce pousse encore plus loin les interrogations qui sont au cœur du roman ; cette version de 1984 s’avère des plus réussies et aurait certainement plu à l’écrivain anglais.

06-11-2015