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Festival TransAmériques - 3 et 4 juin 2017, 19h
inaudible
Danse
Conception et mise en scène Thomas Hauert
Création et interprétation Fabian Barba + Thomas Hauert + Liz Kinoshita + Sarah Ludi (en remplacement de Albert Quesada) + Gabriel Schenker + Mat Voorter

Le roi est mort et les bouffons dansent sur un concerto éclatant. La règle de leur jeu espiègle : mimer les moindres notes, accents, rythmes et couacs de la musique, quitte à danser la tête en bas. Révélant le corps insolite des partitions auxquelles ils obéissent, ils nous font entendre l’inaudible.

Avec cette étonnante création, le chorégraphe d’origine suisse Thomas Hauert s’inspire du « mickeymousing », une technique de cinéma où chaque élément de la bande-son vient souligner l’action à l’écran. Ici renversé, le principe crée une chorégraphie extravagante où chaque mouvement se modèle à la matière sonore. Les six interprètes incarnent le jazz coloré et nerveux de George Gershwin, qu’ils offrent en contraste au bruitisme ténébreux et grotesque du compositeur contemporain Mauro Lanza. Dans un savant mélange de maîtrise et d’improvisation, les danseurs se jouent des compositions et déjouent constamment les attentes du spectateur. Au-delà du tour de force déconcertant, le plaisir est manifeste : une joie !

Thomas Hauert (Bruxelles) - ZOO/Thomas Hauert

D’origine suisse, Thomas Hauert reçoit sa formation en danse contemporaine à l’Académie de danse de Rotterdam.


Section vidéo


Musique originale George Gershwin +  Mauro Lanza
Collage musical Thomas Hauert
Lumières Bert Van Dijck
Costumes Chevalier-Masson
Collaboration informatique musicale (IRCAM) Martin Antiphon
Son Bart Celis 
Rédaction Mylène Joly
Photo Gregory Batardon

Durée : 1h05

3 juin / Rencontre après la représentation

Création au Programme commun, Lausanne, le 18 mars 2016

Un spectacle de ZOO/Thomas Hauert

Coproduction Kunstenfestivaldesarts (Bruxelles) + Charleroi Danses – Centre chorégraphique de la Fédération Wallonie-Bruxelles + La Bâtie – Festival de Genève + PACT Zollverein (Essen) + CDC Atelier de Paris-Carolyn Carlson + IRCAM – Centre Pompidou (Paris) + Théâtre Sévelin 36 (Lausanne) + Centre chorégraphique national de Rillieux-la-Pape – direction Yuval Pick
Avec le soutien de Fédération Wallonie-Bruxelles – Service de la danse + Pro Helvetia – Fondation suisse pour la culture (Zurich) + Loterie Nationale + Vlaamse Gemeenschapscommissie + Ein Kulturengagement des Lotterie – Fonds des Kantons Solothurn + Wallonie-Bruxelles International + Wallonie-Bruxelles Théâtre / Danse – Studio Charleroi Danses / La Raffinerie (Bruxelles) + Grand Studio (Bruxelles)  + Centre chorégraphique national de Rillieux-la-Pape – direction Yuval Pick


FTAThéâtre Rouge du Conservatoire
4750, ave Henri-Julien
Billetterie : En ligne : fta.ca
Par téléphone 514 844 3822 / 1 866 984 3822
En personne :
La Vitrine, billetterie officielle du FTA* - 2, rue Sainte-Catherine Est (métro Saint-Laurent)
*En personne, les billets pour les spectacles présentés à la Place des Arts ne sont pas en vente à La Vitrine, mais exclusivement à la PDA.

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Critique

Thomas Hauert a dansé pour différents chorégraphes, notamment  pour Anne Teresa De Keersmaeker, avant de fonder sa propre compagnie, ZOO, en 1997. En première nord-américaine, le chorégraphe belge présente inaudible, dans lequel il explore le jeu de la traduction de la musique en mouvements.




Crédit photos : Gregory Batardon

Avec ce spectacle, Hauert poursuit donc son exploration de la tension entre liberté et contrainte, ainsi qu’entre solos et mouvements de groupe. Le spectacle débute dans l’obscurité, alors que l’on distingue un amas de corps qui bouge lentement à l’avant-scène, au son des cloches des alpages. Puis, un jeu s’opère entre les danseurs qui exécutent des mouvements rapides et improvisés sur des segments de musique d’à peine quelques secondes. La technique du mickeymousing, à la base de la chorégraphie, est ainsi mise en lumière. Hauert adapte cette esthétique associée aux films d’animation qui veut que chaque action soit accompagnée d’un accent sonore ou musical. Suivant la logique inverse, inaudible consiste à décortiquer la composition de la trame musicale pour en faire ressortir les moindres notes, bruits et accents de la partition. Allant à l’encontre du décorum de la danse, la chorégraphie se veut la plus illustrative possible et cherche à faire ressortir l’artificialité de ce qui se passe sur scène.

Thomas Hauert choisit de faire dialoguer les cultures savantes et populaires au sein d’une trame sonore endiablée où le jazz du Concerto en fa de George Gershwin contraste avec le bruitisme da pièce Ludus de Morte Regis du compositeur contemporain Mauro Lanza, écrite pour vingt-huit chanteurs, jouets et musique électronique. Cette rencontre musicale inusitée participe au ludisme du spectacle où l’humour occupe une grande place. Les danseurs prennent plaisir à créer des mouvements inédits et décomplexés, qui font penser à ceux que l’on ose dans l’intimité de notre chez-soi. Avec leur texture et leur coupe particulière, les costumes conçus par Éric Chevalier et Anne Masson participent aussi au grotesque du spectacle. Les danseurs sont accoutrés d’habits moulants colorés, aux motifs éclectiques et asymétriques, qu’ils changent à plusieurs reprises durant la pièce.

inaudible témoigne d’une compréhension et d’une connaissance impressionnante de la musique de la part des danseurs, qui utilisent toutes les parties de leur corps pour effectuer des micromouvements impliquant jusqu’au bout de leurs doigts et de leurs orteils. Parfaitement conscients de la présence des autres à leurs côtés, les deux danseuses et les quatre danseurs – parmi lesquels Hauert lui-même – contribuent à une grande improvisation structurée qui mise sur la sensorialité et sur la proximité des corps qui participent au même grand mouvement organique.

Ainsi, inaudible invite le public à renouveler le regard qu’il porte sur la danse contemporaine, trop souvent associée à un art hermétique. Le résultat est tout à fait convaincant et montre que la subjectivité et la sensibilité des interprètes peuvent avoir leur place, même dans une chorégraphie où l’exercice technique est franchement affirmé.

04-06-2017