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Secret
14-16-17-18-20-21-23-24 mai, 21h
Lieu : Sous chapiteau au Parc de l’Esplanade (à l’angle des rues d’Auteuil et Saint-Louis)
Admission générale
Sans parole
Durée : 1 h 45
40 $
De Cirque Ici-Johann Le Guillerm
[France]
Secret. Le terme vient du latin secretus, qui signifie solitaire, isolé, caché, rare. Voilà qui définit assez bien l’homme qui se tient en piste : ses chausses métalliques dignes de l’armure d’un chevalier, sa cape gothique, son regard féroce, son attirail de savant fou — Johann Le Guillerm est un hybride de plusieurs oiseaux rares. Équilibriste de formation, il maîtrise une foule de techniques circassiennes. Ce n’est pourtant pas la prouesse physique qui l’intéresse. Ou du moins, pas les prouesses que son corps pourrait exécuter, mais celles que la nature exécute en tout temps, en tout lieu. Les prouesses des lois de la physique.
Contrairement à la plupart des artistes du cirque, Johann Le Guillerm ne répète pas ses numéros sans relâche en espérant créer l’illusion de la facilité. Au contraire, la bataille que doit livrer le corps pour atteindre à la virtuosité fait partie du spectacle. Secret repose sur cette bataille même. Johann Le Guillerm construit à vue la matière qu’il domptera ou chevauchera par la suite de sorte que l’assistance découvre les efforts qu’il déploie pour leur donner vie. Si l’artiste tombe, il se relève et recommence — comme pour montrer que la vie tient davantage de l’équilibre que de la stabilité.
Secret exprime ainsi deux mouvements complémentaires : celui d’une matière qui résiste à la volonté de l’homme, et la nécessité pour ce dernier d’essayer de dompter cette matière pour mettre au jour toutes les idées dont fourmillent son esprit. Il y a là aussi bien un combat qu’un échange, une chorégraphie en forme de dialogue muet, une sorte de parabole de l’homme en général — bête sauvage face à des objets qui lui échappent, fussent-ils sortis de ses propres mains. Comme un dompteur face à un lion, comme un savant face aux lois de la physique, Johann Le Guillerm se mesure à des forces qui le dépassent : celles des objets qu’il a lui-même créés. Pour arriver à les maîtriser, il doit comprendre la matière, le mouvement, la gravité. Sous ses mains, l’immobile prend vie, les formes permutent, le fragile résiste, l’inébranlable chancelle : il transforme la matière en mouvement, fait apparaître la face cachée des choses et dévoile les secrets du monde.
En tournée internationale depuis sa création à « Feux d’hiver » le Channel, scène nationale de Calais en décembre 2003, Secret s’inscrit dans projet colossal appelé Attraction, qui comprend à ce jour : Secret , le spectacle. La Motte-prototype IV, phénomène de cirque minéral et végétal, une sculpture monumentale en mouvement et Monstration, une installation, le «laboratoire» vivant et poétique qui montre les recherches d’un artiste qui porte un regard à 360° sur ce qui l’entoure.
Figure de proue du cirque contemporain, Johann Le Guillerm est issu de la première promotion du Centre national des arts du cirque de Châlons-en-Champagne (1989), il est équilibriste, inventeur et manipulateur d’objets. Circassien accompli, il a notamment travaillé avec Archaos, La Volière Dromesko et cofondé le cirque O, avant de créer sa propre compagnie, Cirque ici, en 1994. Son premier spectacle solo, Où ça?, lui a valu le Grand Prix national du cirque en 1996. En 1999, il entreprenait un tour du monde de 18 mois tout en poursuivant ses recherches-expérimentations sur les thèmes du point, des limites et de l’équilibre. A son retour ses recherches lui ont servis de base pour la création de Secret.
Crédit photos : © Philippe Cibille
Conception, mise en piste et interprétation : Johann Le Guillerm
Création musicale et jeu en direct : Mathieu Werchowski et Guy Ajaguin
Manipulation de sculptures de cirque et régie de piste : Fanny Baxter et Franck Bonnot
Régie lumière : Manuel Majastre
Conception des lumières : Hervé Gary
Création des costumes : Corinne Baudelot assistée de Sylviane Mouchère
Réalisation des chaussures en acier : Didier Deret
Réalisation des chaussures de cuir : Antoine Bolé
Construction machinerie lumières : Sylvain Ohl et Maryse Jaffrain
Réalisation des sculptures de cirque : Sylvain Ohl, Maryse Jaffrain, Serge Calvier, Didier Deret, Lucas de Staël, Jean-Christophe Dumont, Alain Burkarth, Michel Grossard, Cécile Briand
Production : Cirque ici-Johann Le Guillerm
Pour tout autre activité ou informations, veuillez consulter le site officiel au www.carrefourtheatre.qc.ca
*Un grand merci aux gens du Carrefour international
de théâtre de Québec; toutes les images est les informations ont été fournies par eux ou prises sur leur site
officiel.
par Yohan Marcotte
C’est sous un chapiteau où le monde semble être devenu sans âge que le Cirque d’ici (France) présente Secret, un tour de piste d’une précision qui ne cesse de surprendre. On peut se laisser prendre à croire que ce spectacle intemporel aurait tout aussi bien pu se retrouver dans une foire à l’époque médiévale que, comme c’est le cas présentement, sur le bitume de notre ville.
Le Cirque d’ici ne renonce pas aux technologies, mais exception faite des deux DJ qui mixent en direct des ambiances sonores et musicales du spectacle, l’esprit n’est pas à l’ère de l’électronique. C’est résolument sur la machine, comprenant son lot de cordes et de poulies, que ce spectacle repose. Des machines artisanales entourent Johann Le Guillerm. Seul en piste, celui qui est présenté comme un dompteur d’objets relève le tour de force : celui de manipuler et de transformer directement sous les yeux des spectateurs les différents objets qui, comme des fauves, lui sont envoyés.
En piste, Le Guillerm, incarne un personnage qui s’inspire des figures emblématiques des cirques traditionnels : le dompteur, l’équilibriste, le clown, l’homme fort, l’avaleur de sabre… pour n’en nommer que quelques-uns. Un personnage, donc, qui est coloré de multiples facettes. Le résultat donne de belles nuances de ton aux numéros. C’est un cirque qui n’a que peu à voir avec l’aspect criard des cirques où s‘égosillent les bonimenteurs.
Ce Cirque d’ici est également un cirque de maintenant, ce qu’on appelle le nouveau cirque. La facture est poétique et cela est dû, entre autres, à l’absence complète de la parole, mais aussi à une gestuelle chorégraphique qui est, par moments, une esquisse de danse. Par contre, Secret est définitivement bigarré. La poésie côtoie le grivois, l’époustouflant se frotte au ridicule… Aussi, le personnage de Le Guillerm manifeste le paradoxe : ses mains font tout avec une gracilité tordue ; ses pieds, bruyants dans ses bottes d’armures en métal, dansent avec vacarme et deviennent parfois aussi menaçants que des serres de rapace.
Il faut voir la précision avec laquelle Johann Le Guillerm exécute ses différents numéros. Il amène, avec une rigueur et une assurance sans faille, des cuves de métal à tourner en cercles concentriques autour d’un même centre en les propulsant grâce aux coups de son fouet. Il faut aussi le voir faire des spirales, une avec une longue tige de métal et l’autre avec des planches de bois qu’il arrive à façonner de telle sorte qu’il peut s’élever jusqu’aux hauteurs du chapiteau. Il impressionne par son aisance à modeler la matière, mais surtout par sa maîtrise des lois physiques qui lui permet de jouer aux limites de l’équilibre. Il faut d’autant plus saluer son talent car il est seul maître d’œuvre de ce spectacle pour lequel il signe, en plus de l’interprétation, la conception et la mise en piste.
Secret lance de manière flamboyante l’édition 2008 du Carrefour de théâtre de Québec. En présentation jusqu’au 24 mai au Parc de l’Esplanade, le spectacle du Cirque d’ici vaut le détour et vous offre la chance de planifier une sortie qui peut nous amener au seuil de l’inouï, car cette expérience unique défie toutes les autres. Et pour ceux qui se demandent : ce secret, quel est-il ? La réponse, loin d’être limpide, vient des miracles d’un homme qui part à la rencontre de la matière, comme on part à l’aventure.
19-05-2008
