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Le Carrefour international de théâtre

du 14 au 31 mai 2008

retour horaire complet

La Grande Guerre
27 mai, 20h, 29-30 mai, 21h, 31 mai, 15h
Lieu : Complexe Méduse - Salle Multi (541, De Saint-Vallier Est)
Admission générale

Français
Durée : 1 h 20
34 $

Hotel Modern
[Pays-Bas]

Il est difficile de raconter la guerre sans tomber dans les clichés qui contribuent à nous rendre insensibles à l’horreur d’événements pourtant pas si lointains. Il n’est pas facile non plus de recréer, dans un théâtre et avec des moyens dérisoires, l’ampleur des massacres ayant couvert de cadavres les plaines d’Europe. Enfin, il est encore plus difficile de faire oublier aux spectateurs que le buisson derrière lequel se cache une troupe ennemie est une brosse à balai à demi enterrée sous de la sciure de bois… Ce sont pourtant les défis que relève la compagnie de théâtre multidisciplinaire Hotel Modern en déployant l’ingéniosité qui a fait sa renommée.

Se déplaçant avec agilité et fébrilité dans un décor tenant davantage du plateau de tournage que du théâtre, les trois membres d’Hotel Modern recréent la vie d’un soldat français dans les tranchées. Les tableaux ainsi produits sont filmés à l’aide de caméra miniatures, puis montés en direct par l’intermédiaire d’une table de mixage et projetés sur un écran géant au fond de la scène. Au cœur de l’action, entouré d’objets insolites, de microphones de contact et de machines de mixage, le compositeur Arthur Sauer créer sur mesure le bruitage de la pièce, qui s’étend du souffle des explosions aux chuintements de bottes s’enfonçant dans la boue.

Depuis sa création en 2001, La Grande Guerre a tourné dans de nombreux pays d’Europe et valu plusieurs prix au groupe Hotel Modern. Le trio a notamment été couronné du Prix de Coppet (Suisse), décerné aux jeunes artistes se distinguant par leur originalité et la diversité de leurs approches. Ce succès a incité le groupe à poursuivre son exploration des horreurs de la guerre : son dernier spectacle, Kamp (2006), met en scène la vie des détenus d’Auschwitz.

Pauline Kalker et Arlène Hoornweg se sont rencontrées au cours de leurs études en art dramatique à l’école d’Arnhem, aux Pays-Bas. Liées par un désir commun d’explorer la force des images et le rôle de la musique dans le théâtre, elles se sont associées dès 1996 pour créer le groupe de théâtre multimédia Hotel Modern. Entre temps, elles avaient toutes deux collaboré, ensemble ou séparément, avec diverses troupes néerlandaises à titre de comédiennes, de metteures en scène ou d’auteures. L’artiste et performeur Herman Helle s’est joint à elle en 1998. Outre sa production artistique, il travaille comme scénographe depuis la fin des années 1970 et s’est bâti une solide expérience de maquettiste en collaborant avec de nombreux architectes.

Mettant en commun leurs idées et leurs talents, les trois artistes d’Hotel Modern proposent un théâtre aux limites de la marionnette et du cinéma. Si les moyens rudimentaires qu’ils utilisent font sourire le spectateur, les effets grandioses qu’ils en tirent émeuvent et font réfléchir. Dans leur spectacle Cité Maintenant (1999), des boîtes de carton devenaient des gratte-ciels entre lesquels circulaient des autobus en pain à sandwich; dans Trace d’escargot (2001), des crevettes enfourchaient de minuscules motos; dans une version déjantée du Roi Lear (2003), le trio produisait en direct un film d’animation en pâte à modeler… Vibrantes de folie, de génie et d’esprit ludique, leurs productions font toujours entrer une grande bouffée d’air frais dans les théâtres qui les accueillent.

Arthur Sauer est associé à Hotel Modern depuis la toute première création de la troupe, STUcK (1997). Faisant aussi bien appel aux instruments traditionnels qu’aux objets et aux ressources inépuisables de logiciels de traitement du son, Sauer explore les mondes tantôt apaisants, tantôt angoissants du minimalisme. Il a collaboré à plusieurs autres projets de théâtre aux Pays-Bas en plus de composer la musique de nombreux films et spectacles de danse. 

Conception, mise en scène et interprétation : Herman Helle, Pauline Kalker, Arlène Hoornweg
Conception sonore et interprétation musicale : Arthur Sauer
Technicien :  Joris van Oosterhout

Production : Hotel Modern

Coproduction : Productiehuis Rotterdam

Pour tout autre activité ou informations, veuillez consulter le site officiel au www.carrefourtheatre.qc.ca

*Un grand merci aux gens du Carrefour international de théâtre de Québec; toutes les images est les informations ont été fournies par eux ou prises sur leur site officiel.

par Magali Paquin

1939. Un conflit mondial éclate, qui laissera dans son sillage des millions de morts et de blessés. Ces combattants vivront des mois épuisants physiquement et mentalement, marqués par la peur et la mort. C’est par les lettres d’un de ces soldats que la compagnie Hotel Modern appréhende cette période historique, en adoptant un point de vue sensible pour un conflit qui fut un véritable carnage humain. Performance hybride entre «miniaturisme», théâtre et vidéo, « La Grande Guerre » est loin de l’esprit bon enfant que laisse présager un tel mélange des genres. Cette production originaire des Pays-Bas, présentée à Québec pendant le Carrefour international de théâtre, montre la Deuxième Guerre mondiale dans toute sa terreur et son humanité.

Si des soldats peuvent se camoufler derrière des buissons faits de brosses à balai, du persil se transformer en arbres ou un aquarium devenir une mer glauque, c’est d’abord grâce à la récupération ingénieuse d’objets du quotidien et à l’utilisation atypique de l’art miniature. Bien qu’ils utilisent des moyens rudimentaires et pour le moins inusités, les trois concepteurs, metteurs et scène et interprètes du spectacle, soit Herman Helle, Pauline Kalker et Arlène Hoornweg, réussissent à créer des images surprenantes de réalisme. Une caméra cadrant précisément le champ de vision et dont les images sont projetées sur grand écran impose l’atmosphère. Chaos, peur, sentiment d’urgence. C’est la guerre, la vraie. Avec le bruit des mitraillettes, l’odeur de brûlé, les bottes s’enfonçant dans la vase chargée de cadavres.

En s’arrachant les yeux de l’écran, un tout autre spectacle s’offre au public. L’équipe s’affaire, fébrilement, mais sûrement, à manipuler les accessoires, filmer à la caméra, monter les images à la table de mixage, créer l’ambiance sonore, narrer le texte au micro. Le propos se perd parfois sous les sifflements des balles ou les chuintements des bottes, défavorisé par un français hésitant. Mais les images parlent, valent mille mots. Précises et puissantes, elles traduisent des émotions universellement perceptibles. Si l’ingéniosité dont font preuve les concepteurs a de quoi impressionner, c’est avant tout leur faculté à rendre l’atmosphère de la guerre réelle, trop réelle, qui laisse la plus grande empreinte. Dans «La Grande Guerre», l’art de la miniature est revisité non seulement avec talent, mais de façon saisissante. Les petits soldats de plomb ont beau évoquer le jeu, l’horreur trop réelle du conflit rattrape le spectateur et le happe.

31-05-2008