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Du 11 au 15 décembre 2012, 19h30
Laissés pour contesLaissés pour contes
Textes de Pierre Chamberland, Caroline Dubois, Nadia Essadiqi, Fanny Forest, Mathieu Lepage et Léonie St-Onge
Mise en scène Pierre Chamberland
Avec Catherine Dumas, Geneviève Fontaine, Nadia Essadiqui, Julien Lemire, Mathieu Lepage, Joël Losier, Pascale Tremblay

Du 11 au 15 décembre prochain la troupe Les Laissés Pour Contes investit le théâtre de l’Esquisse, avec son spectacle du même nom. Dans une mise en scène de Pierre Chamberland, des contes écrits par des auteur(e)s talentueux et interprétés par autant de brillants comédien(ne)s de la relève vous seront livrés.

Les Laissés Pour Contes / Le Spectacle
C’est dans un environnement épuré, aux allures vintages que Les Laissés Pour Contes vous présenteront six contes tous sous le thème de l’injustice. Omniprésente, elle est comme de la mauvaise herbe, dans chaque fissure, chaque recoin de la ville. Elle s’étale au grand jour, se répand sans y avoir été invitée, envahissant tout sur son passage, engendrant d’une génération à l’autre son lot de reclus, de laissés-pourcompte. Rien n’est donné, tout est suggéré laissant libre court à l’imaginaire du spectateur.

Le Metteur En Scène
Le metteur en scène Pierre Chamberland a suivi une formation théâtrale au théâtre Parenthèse pendant deux ans, laquelle s'est terminée par la présentation d'une pièce intitulée Le beau parleur du vaste monde. À cela, s'ajoutent divers ateliers de théâtre dont un avec Peter Batakliev ainsi qu'une classe de maître avec Pipo Delbono. Passionné par le jeu et l'écriture depuis déjà plusieurs années, Pierre Chamberland fonde Les Laissés Pour Contes, où il fera ses premières armes à titre de directeur artistique et de metteur en scène.

Les Laissés Pour Contes / La Troupe
La troupe Les Laissés Pour Contes est née d’un désir d’offrir la parole aux gens qui ne l’ont pas d’emblée. Ainsi, elle donne une tribune à des auteur(e)s, comédien(ne)s et performeur(e)s de talent qui n'ont pas toujours accès au crachoir. La mission de la troupe est donc de mettre de l’avant les artistes de la relève en produisant des spectacles de qualité afin d’expérimenter diverses formes d'expressions artistiques, repoussant ainsi les limites du conte urbain comme on le connaît.


Musique Michaël Lafrenière
Son et éclairage Stephan Toupin
Chorégraphie « C’est pas triste »: Nadia Essadiqi et Julien Lemire
Assistance à la m.e.s. Pascale Tremblay

C’EST PAS TRISTE
Texte de NADIA ESSADIQI
Interprété et chorégraphié par NADIA ESSADIQI & JULIEN LEMIRE


LE SYNDROME PENNY JOHNSON
Texte de FANNY FOREST
Interprété par GENEVIEVE FONTAINE


LA VILLE LA PLUS HEUREUSE DU QUÉBEC
Texte et interprétation de MATHIEU LEPAGE


POUR L’AMOUR DES COCHONS
Texte de LEONIE ST-ONGE
Interprété par CATHERINE DUMAS


MAXIME
Texte de CAROLINE DUBOIS
Interprété par PASCALE TREMBLAY


LE COURS DE NATATION
Texte de PIERRE CHAMBERLAND
Interprété par JOËL LOSIER

Billet: 20$

Une production Laissés pour contes - page Facebook


Théâtre de l'Esquisse
1650, rue Marie-Anne Est
Billetterie : 514.527.5797
 
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 Critique
Critique

par Olivier Dumas


Catherine Dumas, crédit photo : Yan Leblond

En cette période des Fêtes, le Théâtre de l’Esquisse offre une soirée de contes intitulée Les Laissés pour contes, présentée par le collectif du même nom. Les six histoires au menu se caractérisent par leurs univers sympathiques, généralement trop linéaire, mais sans autre prétention que de faire passer un bon moment.

Depuis l’arrivée des désormais incontournables Contes urbains, la formule du conte a fait de nombreux petits sur les scènes montréalaises. Les soirées thématiques autour de cet art de la parole axé sur les récits de faits se sont multipliées. Certains commentateurs de la scène théâtrale se demandent même si cette forme dramatique dépouillée souvent de toute technologie n’est pas devenue désuète avec les années. Toutefois, le modeste spectacle dirigé par Pierre Chamberland a d’abord le mérite de ne pas trop empiéter sur les plates-bandes des autres événements du même genre.

Contrairement aux monologues d’Yvan Bienvenue qui tartinent allégrement dans le scabreux et les phrases crues ces temps-ci à La Licorne, les six textes retenus par les concepteurs de ces Laissés pour contes ne versent pas dans la surenchère. Écrits pour la plupart par des auteurs à leurs premières armes professionnelles, ils révèlent des pistes intéressantes, souvent prévisibles, mais empreintes d’humour et d’humanité. Chacune des courtes pièces n’excède jamais le quart d’heure, évitant ainsi d’étirer inutilement la sauce.

Si l’on parvient à faire abstraction de certaines maladresses de néophytes, la production d’une durée d’une heure quarante, entracte inclus, se déroule agréablement et rondement. Le public familier avec l’environnement propice à la narration du conte se retrouve en terrain connu en voyant la petite scène dépouillée du lieu, la chaise en bois et le musicien Michaël Lafrenière. Accompagné de sa guitare, ce dernier aide à créer un climat de proximité entre les interprètes et le public. 

Voulant briser le canevas traditionnel du soliloque, le metteur en scène a privilégié, au lever du rideau, une partition pour deux comédiens, qui a pour titre C'est pas triste, écrit par Nadia Essadiqi. L’auteure joue d’ailleurs son texte en compagnie de Julien Lemire. Performance corporelle alliant théâtre et mouvements chorégraphiques, le duo démontre une belle énergie dans l’expression de leurs premiers émois amoureux. Le vocabulaire truffé d’expressions sensuelles rappelle, malgré un contexte et une trame dramatique très différents, le jeune couple de Messe solennelle pour une pleine lune d’été de Michel Tremblay. La fraîcheur pétillante du propos tranche avec le reste des histoires et constitue certainement l’un des moments les plus forts des Laissés pour contes.

Le syndrome de Penny Jonhson de Fanny Forest se penche sur les déboires d’une barmaid aguichante qui voit sa sœur, d’abord moins avantagée physiquement, grimper rapidement dans l’échelle sociale et lui faire de l’ombre auprès de sa famille. Malgré une partition qui ne provoque que peu d’effets de surprise, Geneviève Fontaine traduit bien la douleur latente de cette fille qui a trop misé sur les valeurs superficielles au détriment de l’essentiel.


Joël Losier, crédit photo : Yan Leblond

Membre du groupe néo-futuriste Les Néos, Mathieu Lepageavait déjà égratigné sa ville natale, Repentigny, dans un rap cinglant lors de la plus récente édition de Pièces pour emporter. Il se remet à la charge dans son texte La ville la plus heureuse du Québec qu’il joue sur scène. Avec virtuosité et ironie, le talentueux comédien réussit le pari de rendre non seulement crédible son narrateur, mais également les petits bums de banlieue qu’il croise sur sa route. Dans « la ville la plus heureuse du Québec », réplique qu’il martèle à plusieurs reprises pour en souligner le côté factice, le confort se conjugue très souvent à l’indifférence, à la médiocrité consensuelle et aux tragédies difficilement traduisibles derrière les apparences douillettes du bonheur.

Après l’entracte, c’est une actrice formidable, Catherine Dumas, qui rend parfaitement toute la gaucherie d’une cégépienne naïve et révoltée dans Pour l'amour des cochons de Léonie St-Onge. Avec ses lunettes, ses cheveux attachés en queue de cheval, et son pantalon de paillettes bon marché, elle nous réjouit grandement par certaines répliques acerbes et son regard cynique sur les rapports humains. Les militants idéalistes, les consommateurs-voyeurs de téléréalité, les porcs et les chiens en prennent pour leur rythme, sans oublier cette fille un peu paumée dont les péripéties compensent une intrigue au dénouement peu inattendu.

Après les catastrophes amusantes du conte précédent, c’est la compassion et l’empathie qui teinte l’univers de Maxime de Caroline Dubois. Une jeune femme montréalaise part s’acheter des vêtements abordables et rencontre par hasard au centre-ville un représentant solliciteur du Sida. Ce dernier lui révélera par la suite être une victime du terrible fléau. Le récit demeure assez ennuyant, malgré les efforts déployés par la comédienne Pascale Tremblay pour rendre vibrant son personnage. Le ton des thèmes abordés se rapproche davantage d’une démarche pédagogique à la Janette Bertrand (préfacière par ailleurs du bouquin À la découverte de mon corps dont fait mention la narratrice) qu’à Yvan Bienvenue.

Le cours de natation de Pierre Chamberland nage également dans les bons sentiments avec les mésaventures d’un trentenaire vêtu d’une jaquette d’hôpital et d’un collet cervical. Son antihéros se fait renvoyer la monnaie de sa pièce lorsqu’il se retrouve en présence de son ancienne victime d’école martyrisée par lui et par ses autres confrères de classe. On sourit parfois, mais l’écriture aurait certainement gagné à être un peu plus ramassée.

La direction d’acteur de Pierre Chamberland demeure rigoureuse grâce à des prestations assez crédibles de l’ensemble de la distribution. Mais à ces Laissés pour contes, il manque des ruptures de ton, des cocasseries imprévisibles et une certaine magie pour atteindre l’état de grâce espéré. 

13-12-2012