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Du 10 au 27 mai 2011, mardi au samedi à 20h; samedi 14 mai à 14h et 20h
Le chemin des passes dangereuses
Texte Michel Marc Bouchard
Mise en scène Michel-Maxime Legault
Avec Guillaume Regaudie, Yves-Antoine Rivest et Louis-Philippe Tremblay

Trois frères se retrouvent coincés sur le bord d'un chemin après que leur camion ait capoté, quelques heures avant le mariage du cadet. Les notions de temps et de distance leur échappent, mais les souvenirs ranimés au détour d'un lieu familier les hantent.

Jouée pour la première fois en français depuis sa création en 1998, Le chemin des passes dangereuses met en scène trois jeunes hommes piégés dans un lieu obscur, sans repères apparents. Pour une fois dans leur vie, ils devront se parler, poser un regard lucide sur leur vie, même si la douleur jaillit, même si la vérité nue est dure à entendre. Cette tragédie routière de Bouchard nous conduit tout droit vers l’impasse : jusqu’où est-il possible de garder le silence?

Le Mimésis se veut un théâtre de réflexion sur la fatalité de l'humain moderne. Le chemin des passes dangereuses, revisité pour la première fois en français à Montréal depuis sa création en 1998, sera sa toute première production.

Assistance à la mise en scène : Alexina Hicks
Scénographie et costumes : Elen Ewing
Éclairages: Mickaël Fortin
Conception Sonore: Raphaël Reed
Conseillère technique: Jeanne Legris-Fortin

Carte Premières
Cartes Prem1ères
Date Premières : du 10 au 14 mai 2011
Régulier : 20$, étudiant 15$
Carte premières : 10$

Une production Théâtre Le Mimésis

Bain St-Michel
5300, rue Saint-Dominique
Billetterie 514-969-0901 lemimesis@gmail.com

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 Critique
Critique
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par Olivier Dumas


Crédit photo : Hugo B. Lefort

Michel-Maxime Legault est un metteur en scène qui se démarque de production en production. Après une incursion remarquée dans l’univers d’Étienne Lepage avec Kick, saluée par les critiques et la récente création en français de Menteur, de Brian Drader, à l'Espace 4001, personne ne lui reprochera de privilégier les avenues faciles. Sa relecture pertinente de la pièce Le Chemin des passes dangereuses de Michel-Marc Bouchard nous fait passer un agréable moment au Bain St-Michel, en plus de découvrir une nouvelle compagnie, le Théâtre Le Mimésis.

L’histoire du Chemin des passes dangereuses prend un certain temps avant de prendre véritablement son envol. Fidèle à l’idéologie de Gide où la famille devient un haut lieu de tabous, douleurs et trahisons, elle scrute les relations tumultueuses entre trois frères aux personnalités antagoniques, originaires d’Alma au Lac-Saint-Jean. Réunis pour le mariage du benjamin, ils sont victimes d’un terrible accident de la route sur le lieu même du décès de leur père, mort dans des circonstances suspectes des années auparavant. Dans l’au-delà, entre les inévitables confrontations, ils tentent de recoller les morceaux d'un passé tumultueux.

Le défi demeurait colossal, car ce texte du populaire dramaturge québécois ne se classe pas d’emblée parmi ses meilleurs. Malgré des répliques fortes et des conflits dramatiques relevés par endroits, il n’atteint pas la beauté tragique des Feluettes, la grandeur puissante imprégnée de la mythologie comme dans Les muses orphelines ou encore la charge émotive de l'intense Tom à la ferme, sa plus récente création au Théâtre d’Aujourd’hui. Certaines des charges contre la société contemporaine demeurent trop manichéennes pour atteindre leur plein potentiel. Par contre, le témoignage du frère aîné sur les fragilités du père exprime une douleur bouleversante, tandis que les répliques récitées en chœur par les protagonistes évoquent l’esprit du meilleur de Michel Tremblay.

Des 90 minutes de la création originale, Michel-Maxime Legault a circonscrit l’action en une heure pile qui gagne en efficacité et intensité. Au Bain Saint-Michel, il réussit l’exploit de recréer l’atmosphère troublante du récit avec trois jeunes acteurs inspirés et quelques accessoires : de longs rideaux transparents et des reliques d’une carcasse de voiture. Son travail apporte une brillante clarté à une œuvre parfois alambiquée par ses enchevêtrements entre la réalité et le surnaturel d’un texte qui finalement n’a pas pris une ride.

Fraîchement diplômés du Conservatoire d’art dramatique de Montréal, les interprètes sont excellents dans leurs compositions d’une grande justesse. Ils réussissent à créer des contrastes saisissants dans les caractères opposés de leurs personnages. Le duel entre Yves-Antoine Rivest et Louis-Philippe Tremblay fait des étincelles. Le premier se révèle touchant en homosexuel blessé par la mort imminente de son compagnon atteint du Sida, alors que le second traduit à merveille l’esprit de ce banlieusard étalagiste macho et matérialiste. Guillaume Regaudie  confère au rôle de l’ainé un bel équilibre entre sagesse et force.

Ancien bain public, le Bain St-Michel demeure toutefois un lieu souvent difficile pour le théâtre, notamment en raison de l’acoustique d’une trop grande réverbération. L’auditoire n'entend pas toujours la fin de plusieurs répliques fortes ou émouvantes qui se perdent dans la cacophonie. Rien heureusement pour gâcher le plaisir d’une représentation qui passe à la vitesse de l’éclair.

Comme première incursion sur la scène professionnelle, le Théâtre Le Mimésis relève brillamment le défi. Il démontre également son intérêt pour les œuvres complexes du répertoire contemporain. Michel-Marc Bouchard peut se compter choyé de voir sa pièce Le chemin des passes dangereuses reprise avec autant de ferveur et d’engagement.

15-05-2011

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