Du 26 janvier au 6 février 2010
Supplémentaires 9 au 13 fév. 2010, 20h, 13 fév. (matinée)
Supplémentaires 18-19-20 fév. 2010 (MONTRÉAL EN LUMIÈRE)
Retour à l'accueil Imprimer cette page Archives Accueil Facebook del.icio.us

Paradis perduParadis perdu

Texte et mise en scène de Dominic Champagne
Idée originale Jean Lemire et Dominic Champagne 
Musique Daniel Bélanger.
Avec Pierre Lebeau, Rodrigue Proteau, Goos Meeuwsen et Esther Gaudette

Paradis perdu, c’est une odyssée onirique, un poème scénique spectaculaire, un voyage dans le jardin du monde, au carrefour du théâtre, du cinéma, de la musique et de la performance. Un soldat errant, dernier humain sur terre, rêve qu’il recrée le monde détruit par la main de l’homme. Lançant son imagination sur les pistes de la création, il s’invente un jardin merveilleux où l’humanité vivrait à nouveau en harmonie avec la nature. Vivez un plongeon onirique dans le jardin du monde, de l’infiniment petit à l’infiniment grand, parmi les déserts de glace, le bouillonnement des volcans, les champs de fleurs nouvelles et les forêts souveraines regorgeant de mille créatures. Le spectacle de ce rêve vous mènera dans une oasis de beauté où l’humanité est convoquée à faire renaître l’avenir.

Conception : Michel Crête, Olivier Goulet, François Pérusse, Giles Martin, Martin Labrecque, Johanne Madore, Jean-François Sauvé, Jaque Paquin, Patricia Ruel, Marie-Chantale Vaillancourt
Photos : Valérie Remise

Échelle des prix réguliers : de 26,28$ à 62,38$

Collaboration du Théâtre il va sans dire et de la Place des Arts
www.paradisperdu.com

Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts [lien]
175, rue Sainte-Catherine Ouest
Billetterie : 514 842-2112

par David Lefebvre


Crédit photo : Valérie Remise

Probablement l’événement scénique le plus attendu de la rentrée hivernale, le spectacle multimédia Paradis perdu de Dominic Champagne, Jean Lemire et Daniel Bélanger ne satisfait, malheureusement, que la moitié des espérances, et ce, difficilement.

Fable métaphorique sur la création du monde et la beauté de la vie qui nous entoure, Paradis perdu met en scène le dernier soldat, le dernier humain, qui se meurt sur un champ de bataille. Le Poète, incarné par Pierre Lebeau, lui donne accès aux rêves : comment, soldat, reconstruirais-tu le monde, si tu étais jardinier de celui-ci? Qu’en ferais-tu?

Techniquement, le spectacle vaut le coup d’œil. Les projections au sol sont parfois admirables, créant un effet 3D la plupart du temps très réussi. Les couleurs et les détails, parfois picturaux, sont très bien rendus, rappelant à certains moments des peintres postimpressionnistes. La surface est parsemée de mousse déchiquetée, ce qui crée une terre légère, un effet à mi-chemin entre la poussière et la neige. Pour accentuer l’effet tridimensionnel, presque cinématographique, des images sont projetées sur un écran à l’avant-scène, qui descend au besoin. Ainsi, on passe au travers l’univers, la glaciation, les saisons et les contrées désertiques. Malgré l’ampleur des images, cet écran devient vite l’un des irritants du spectacle, à force de monter et descendre sans arrêt. Côté disciplines, les inspirations sont diverses : mentionnons la danse et le cirque – peu étonnant, compte tenu du récent parcours de Champagne. Les yeux sont éblouis et les oreilles aussi : la musique de Daniel Bélanger est envoutante, inspirée, malgré certains thèmes trop répétitifs.

Pierre Lebeau reprend le rôle du narrateur poète, qui nous rappelle l’Homère qu’il interprétait dans l’Odyssée, l’un des grands succès de Champagne. De sa voix caverneuse, il trace le parcours de ces êtres fragiles, ouvre tout autant les portes de la création que de la mort. Rodrigue Proteau incarne avec force ce soldat tombé au combat, qui rêve une dernière fois. Le Fils, joué par Goos Meeuwsen, nous fait rire à quelques reprises, dont au tout début de la pièce, avec un ourson en peluche avec qui il partage un masque à gaz. Esther Gaudette, avec une grâce surprenante et un corps sauvage, impétueux, propose, lors de sa naissance, l’un des plus beaux moments du spectacle.

En fait, le maillon faible de ce spectacle qu’on nous annonçait comme révolutionnaire est le texte. Bourré de clichés et de longueur, Paradis perdu est une réécriture poétique du début des temps de l’Ancien Testament. Le Soldat joue à Dieu, l’enfant à Adam et Ève, à… Ève. Les symboles manquent de subtilité : le Soldat en forme de croix au faîte d’un arbre créé par des armes à feu, la création d’un fils et d’une fille, puis l’exil de ce dieu jardinier, expulsé de son terrain par la progéniture du couple parfait – enfant qui, métaphoriquement, nous représente.  Prometteur, le début apocalyptique de l’histoire, annoncée par les douze coups de théâtre au son de mitraillette, nous mène vers une fable mille fois vue et remâchée sur la création de la vie et le ventre de la mère. L’histoire, n’allant pas plus loin, ne nous pousse pas à réfléchir sur notre autodestruction qui semble inévitable, et ne touche aucune sinon très peu de cordes sensibles. Certains moments d’humour cabotinent et s’allongent pour peu de choses et la finale, avec les visages d’enfants en noir et blanc, pousse le cliché à son paroxysme.


Crédit photo : Valérie Remise

Citant en début de parcours Milton et Hugo, Paradis perdu sombre dans une poésie noire, tant visuelle que littéraire, parfois illuminée d’espoir et de joie. Les qualités techniques et esthétiques du spectacle impressionnent, mais la réflexion sur la beauté et la fragilité du monde est amèrement refroidie par les trop nombreuses faiblesses du texte.

29-10-2010

Retour à l'accueil