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King Dave

De et avec Alexandre Goyette
Mise en scène de Christian Fortin

Ce spectacle-révélation a valu à son auteur les Masques 2005 du Texte original et de l'Interprétation masculine. Fort de son succès l’an dernier, partout en province, King Dave revient à La Licorne et reprendra ensuite les routes du Québec ; la pièce s’arrêtera dans 17 salles dont le Théâtre Périscope à Québec et le Théâtre du Bic. La pièce sera publiée cet été par Dramaturges Éditeurs.

Dave, alias David Morin, est un petit délinquant qui pense régner en maître sur son territoire. Jusqu'à ce qu'un jour surgisse plus king que lui. Dès lors, tout bascule. Les règlements de compte s'enchaînent, la descente aux enfers s'amorce.

Dans une langue incisive et évocatrice, King Dave nous propose un drame humain poignant, un conte urbain décapant, d'où jaillissent des étincelles d'un humour vitriolique. Incarnant avec aisance tous les personnages de l'entourage du «King», Alexandre Goyette livre une prestation à couper le souffle. À la fois grande gueule et attachant, frondeur et pathétique, il touche et amuse, impressionne et provoque. La mise en scène précise de Christian Fortin se moule au mouvement hip-hop de la pièce, au tableau trash brossé par l'auteur.

Jeune acteur au talent singulier, cofondateur, avec Alexandre Fournier et Maia Loïnaz, du Théâtre les Idées Flottantes (L.I.F:T), Alexandre Goyette signe ici son premier texte dramatique. Depuis sa sortie de l'École nationale de théâtre de Saint-Hyacinthe en 2002, nous l’avons vu à la télévision dans les téléromans La Promesse (TVA) et Providence (SRC), la télésérie C.A. (SRC) et sur les planches du Théâtre du Nouveau Monde (La Fausse suivante, m.e.s. Claude Poissant), d'Espace GO (Babel, m.e.s. Brigitte Poupart), ainsi que dans la Salle intime du Théâtre Prospero, où il a créé King Dave, en février 2005.

Assistance à la mise en scène Dominique Cuerrier
Scénographie : Geneviève Lizotte
Éclairages : Jonas Verrof Bouchard
Environnement sonore : Martin Bédard

Une production Les Idées Flottantes : Théâtre (L.I.F:T) en codiffusion avec Le Théâtre de la Manufacture

Théâtre La Licorne
4559, avenue Papineau
Billetterie : 514-523-2246

Théâtre Périscope
2, rue Crémazie Est
Billetterie :
418-529-2183

 

En tournée

23 octobre 07
25 octobre 07
1er novembre 07
2 avril 08
3 avril 08
5 avril 08
7 avril 08
8 avril 08
11 avril 08
15 avril 08
16 avril 08
17 avril 08
19 avril 08
22-23 avril 08
24 avril 08
26 avril 08
Terrebonne
Sorel-Tracy
Alma
Drummondville
Trois-Rivières
Fermont
Baie-Comeau
Sept-Îles
Jonquière
La Pocatière
Amqui
Gaspé
Le Bic
Laval
Montréal
Sainte-Thérèse
Théâtre du Vieux-Terrebonne
Café-Théâtre Les Beaux Instants
Salle La Tourelle /Collège d'Alma
Centre culturel de Drummondville
Salle Anaïs-Rousseau
Salle Daviault
Théâtre de Baie-Comeau
Salle Jean-Marc Dion
Théâtre La Rubrique
Salle André-Gagnon - Cégep de La Pocatière
Aud. de la Polyvalente Armand-St-Onge
Auditorium Polyvalente C.-E.-Pouliot
Théâtre du Bic
Studio de la Maison des arts
Maison de la culture Marie-Uguay
Théâtre Lionel-Groulx

 

 

 

 

 

 

 

 

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Dates précédentes :

La Licorne (Mtl)
Du 5 septembre au 6 octobre 2007
supplémentaires les samedis 22 et 29 septembre à 15h00.

Du 1er au 19 mars 2005 - salle intime du Prospero

En reprise du 22 août au 2 septembre 2006
La Licorne
Suppl. 26 août et 2 septembre, 15h

Périscope (Québec)
Du 6 au 25 novembre 2007

par Magali Paquin

Dans un monologue frappant de réalisme, l’auteur et interprète Alexandre Goyette fait état, avec rage et humour, de l’engrenage de violence incontrôlable pouvant découler de délits en apparence mineurs. Pour son «King Dave», Goyette s’est vu remettre le Masque du meilleur texte et celui de l’interprétation masculine en 2005. Une juste récompense pour une production qui illustre, sans moralisme ni complaisance, la dégringolade d’un jeune homme en mal de reconnaissance.

Le «vouloir paraître» est pour David Morin (Alexandre Goyette) une manière de s’affirmer socialement. Trop grand parleur, il se retrouve entraîné malgré lui par un gang à commettre un petit forfait vite fait. Également terriblement orgueilleux, le souci de se faire justice et la recherche de vengeance passent par la force de ses poings. Alexandre Goyette performe impeccablement dans ce rôle de jeune adulte en mal de légitimation sociale, qui à force d’orgueil blessé s’enlise dans les sables mouvants du crime. En reprenant à peine son souffle, il relate les petits et gros mensonges qui le mettent dans l’embarras, les actions posées par fierté et les conséquences de ses choix qui, en définitive, l’amènent à s’enfoncer toujours plus profondément dans la spirale sans fin de la criminalité et de la violence. Alors qu’il joue le caïd, c’est avec une naïveté d’adolescent que l’individu se met les pieds dans les plats. Il y a «toujours une solution, toujours un moyen de s’en sortir avec Dave», se persuade-t-il. Mais le prix est très cher payé de sueurs froides, de tremblements et de remords.

Le langage est cru, sans détour, et fera tiquer les puritains de la langue. Pour apprécier, il ne faut pas s’offusquer devant la pluie de vulgarités, de préjugés, de sacres, d’argot, d’anglicismes et autres jurons qu’il serait inconvenant de reproduire ici. Ceux-ci collent à la peau du personnage comme le font ses pantalons trop larges, son chandail à capuchon et ses souliers de skate –même s’il ne fait pas de skate. Pour tout décor, un salon et une salle de bain aux plafonds bas, étouffants, définissent les divers endroits où se retrouve le protagoniste au cours de ses péripéties, le premier comme lieu social et la seconde, comme lieu d’introspection. Ce simple environnement agit comme un support visuel apprécié, mais accessoire à un texte et une performance d’acteur qui se suffisent amplement en eux-mêmes. La mise en scène de Christian Fortin est elle aussi axée sur le personnage et son propos plutôt que sur l’espace environnant. Les éclairages sont plus significatifs, eux qui créent le climat de danger et d'appréhension dans lequel évolue le jeune homme, particulièrement dans le vide de l’avant-scène où ne règne que le roi en chute et pourtant si convaincu du contraire.

Le ton alarmé qui teinte l’ensemble du monologue garde le spectateur en haleine, suspendu aux lèvres du voyou-malgré-lui, partageant son anxiété devant les situations qu’il ne contrôle plus. De la même manière, on se contrarie de ses propos politiquement incorrects et l’on s’afflige devant tant d’immaturité. Mais pas question de mépris ou de pitié pour ce personnage qui multiplie les déboires. Son désarroi est trop poignant, sa détresse trop visible et sa réalité, trop réelle.

09-11-2007

 

Par Rébecca Deraspe (2006)

King Alexandre

Après avoir raflé les prix d’Interprétation masculine et de Meilleur texte au plus récent Gala des Masques, Alexandre Goyette retourne sur les planches avec sa pièce King Dave, cette fois-ci présentée au Théâtre la Licorne. Nos attentes, élevées, sont le résultat de cette gloire, qui, d’ailleurs, est bien méritée.

Après une fête bien arrosée, David se réveille prisonnier de son destin. Il doit voler des radios d’auto pour le compte d’un gang de rue. Suite au succès de cette douteuse entreprise, il sort dans un bar pour fêter son exploit. Il y provoque une bataille d’où il sort grand perdant. La perte est cependant plus grande qu’il ne le croit. Il s’engage dans une vengeance sans fonds, fondement de sa déchéance prochaine.

King Dave, c’est l’histoire d’un combat. Un combat qui prend racine dans une quête identitaire. L’identité pour soi mais aussi pour les autres. Et la violence pour se convaincre que le monde t’appartient. Ne rien voir parce que la rage se fait trop aveuglante. Ne rien entendre parce que la peur crie à ta place. La terreur entre les deux oreilles, entre deux stations de métro, entre un gang et une seule personne. L’amour, aussi. Puis, le silence qui n’en peut plus de ne pouvoir prendre sa place.

Alexandre Goyette prend la scène, la dévore presque et nous amène avec lui, en lui, nous porte dans ses bras, nous sert si fort, et, la tête posée contre son cœur qui bat trop vite, nous le suivons. Parce que sa peur devient la nôtre. Parce que ses mots deviennent les nôtres. Parce que sa quête aurait pu être la nôtre. Même si, parfois, les expressions qu’il utilise ne nous sont pas familiers, nous en comprenons l’essence : sa peur, sa rage, son combat, sa quête. La langue est ardue puisqu’elle appartient à une génération d’adolescents et de jeunes adultes. En plus de créer des images excessivement fortes, elle nous rapproche du personnage, de son univers, tout en établissant une dichotomie entre lui et nous.  Le comédien, seul sur scène, interprète tous les rôles, transformant sa voix, empruntant des accents, de façon à nous plonger dans un récit aux couleurs des rues sombres, entre Pointe St-Charles et Laval. La mise en scène de Christian Fortin est généreuse et impeccable, tant du point de vue « humain » que du point de vue « mise en place ».

La scénographie semble être conçue pour créer une division, un parallèle avec le combat que mène David. Le salon, lui-même prisonnier d’un cadre, est à la fois l’appartement de la mère de David et celui d’une « chick qui sent bon ». De l’autre côté, une salle de bain. Cette pièce représente l’appartement de David, choix tout à fait pertinent. C’est effectivement dans une salle de bain qu’on se lave, qu’on se met à nu, qu’on se refait et qu’on se libère. De plus, les plafonds de ces deux lieux semblent être trop bas, trop près de la tête de l’acteur. Ils le tiennent presqu’en cage, le confinant physiquement au décor, conçu par Geneviève Lizotte, nous donnant une impression d’étouffement très appropriée, L’éclairage tient ici un langage théâtral important. Il suit David tout au long de son périple, l’aide à retrouver, à venger, à espérer. La conception, de Jonas Veroff Bouchard, est une réussite qui retrace avec brio l’ambiance urbaine de la pièce. Urbaine et sale, urbaine mais aussi parfois propre. L’environnement sonore, créé par Martin Bédard, nous prend tout autant au détour, nous transportant « malgré nous » dans un lieu qui n’existe que pour un instant. Pour son instant.

Une pièce qui prend assez fort pour retenir son souffle. Une inspiration théâtrale bouleversante qui se vit et qui s’expire difficilement.

25-08-2006

 

 

par David Lefebvre (2005)

Chill man ou le choc des générations

Est-ce que je serais déjà rendu trop vieux? Je n’ai que 28 ans, et je n’ai pas tout compris des expressions de la rue de King Dave. Pourtant, ça ne m’a pas empêché de tomber tête première dans ce baril sans fond de la déchéance. Mais commençons par le début.

C’est dans la petite salle du théâtre Prospero qu’est présenté le premier texte du comédien Alexandre Goyette, mis en scène par Christian Fortin qui, dit-il, a eu le coup de foudre pour le manuscrit dès la première lecture. Alexandre Goyette interprète lui-même le personnage du récit, décision naturelle si elle en est, mais excellente.

David, jeune homme de 21 ans, parle et agit encore comme un ado. Lors d’un party chez un ami d’un ami, il rencontre quelques Noirs qui lui demandent, après quelques bières et quelques pétards, de voler des radios d’auto. Dave, trop gelé, finit par accepter, lui qui n’a jamais fait ça. Son coup d’argent fait, il propose la tournée dans un bar à tous ses chums, jusqu’à ce qu’il se dispute avec sa blonde pour du frotti-frotta; elle le laisse après qu’il ait reçu une volée de l’enfer par celui qui la draguait. Mais le King ne laisse pas ça là et tente de retrouver ce con de première. Bref, Dave s’enfonce de plus en plus dans la vengeance et la violence, ajoutant gaffe sur gaffe, jusqu’à ce qu’il perde le contrôle. Bienvenue dans le côté sombre des rues et de la jeunesse de Montréal.

Goyette clame son texte comme un ado des années 2000, accent et gestuelle inclus, mais avec rage. Même si le texte est ponctué de quelques moments d’humour et de décrochage – pour expliquer une situation ou pour avouer un souvenir – la tension qui se crée dès le départ ne quitte pas la salle. On sent et vit les malheurs de Dave, ses blessures et sa douleur, même si tout est narré. La petitesse de la salle crée une proximité adéquate pour ce genre de spectacle, on est happé par la force brute et crue des mots. Crue n’est même pas le mot, mais étrangement tout passe : il jure et sacre en anglais comme en français, il est misogyne (au lieu de dire «fille» ou même «pitoune», c’est chick qui est utilisé, et tout ce qu’il veut c’est baiser la plus hot des chicks, voyez le genre) mais il dit aimer sa blonde; il ne dit pas «noir» mais nègre et black, et ajoutez à cela beaucoup d’anglicismes. Au départ, on pourrait croire à la caricature, mais si on reste quelques instants près d’une école secondaire ou dans quelques centres d’achat, ou même dans le métro ou l’autobus, on se rend compte qu’il est quand même fidèle aux expressions et caractères de cette génération qui se cherche totalement. Ce n’est pas qu’une histoire de racisme modérée, ou de jeune con, c’est une quête identitaire, un récit sur le dérapage et les mauvaises décisions. Une histoire sur une nouvelle société qui, dans sa culture musicale et cinématographique, dicte que la violence et la vengeance sont les seules façons de vivre, où l’action prône sur la pensée. Que parce que tu es sur le chemin d’un type, tu dois payer parce que tu le fais suer. Une société dans laquelle le sang et les bleus sont une façon comme une autre de payer.

Alexandre Goyette réussit avec brio à garder sa rage à un niveau maximum tout au long de la pièce, et à imiter correctement certains accents pour qu’on se retrouve parmi les personnages. La mise en scène est intense: le comédien, malgré les quelques mètres carrés, bouge beaucoup, explose devant nous. La scénographie de Geneviève Lizotte, bien construite et esthétiquement belle pour le peu d’éléments qu’elle comporte, n’est formée que de deux grandes cavités carrées dans lesquelles on retrouve un mini salon orange et une salle de bain verte. L’environnement sonore de Martin Bédard nous plonge dans une musique électro de très bon goût. Les éclairages de Jonas Veroff Bouchard ne se contentent pas d’être statiques puisque les projecteurs suivent le personnage dans sa démarche, reproduisant le jour, la nuit, l’isolement…

Véritable conte urbain gris-sale d’une heure 20 minutes, d’une grande intensité, King Dave nous porte dans un monde si proche de nous, entre Pointe St-Charles et Laval, une réalité que l’on voudrait pourtant si loin, ou même inexistante...

02/03/2005