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Du 30 novembre au 3 décembre 2010, 20h, 4 décembre 15h et 20h
CendresCendres
Librement adapté du roman d’Atiq Rahimi, Terre et cendres
Adaptation et mise en scène Jérémie Niel
Avec Marc Beaupré, Pascal Contamine, Raoul Fortier-Mercier, Bernard Meney, Georges Molnar, Igor Ovadis, Yves Trudel

Abandonné par les hommes et les dieux, le vieil homme avance encore, mais lentement, et en silence. Accompagné de son petit-fils, il va apprendre à son fils qui travaille à la mine, qu’au village tous sont morts. Cendres raconte l’histoire d’une quête que des humains se créent pour tenter de trouver des sens là où ils se font trop rares; une errance parmi d’autres. Adapté par Jérémie Niel, le roman Terre et Cendres de l’Afghan Atiq Rahimi, prix Goncourt 2008, devient à la scène Cendres, une œuvre tragique et pure, qui fait résonner les mots dans l’espace vide du théâtre et du monde. Pour ce spectacle, Jérémie Niel travaille avec le cinéaste Denis Côté, dont le film Carcasses a été présenté au Festival de Cannes en 2009. Ensemble, ils établissent un dialogue esthétique entre scène et écran qui révèle les intériorités, terrifiantes de vacuité, des hommes perdus sur un plateau trop exposé. Après son succès au Festival TransAmériques en 2010, Cendres est adapté à La Chapelle, entre les murs de laquelle le vertige prend tout son sens.

Pétrus est dirigé par Jérémie Niel et crée des œuvres scéniques contemporaines. Pétrus est obsédé par des thèmes qui le hantent à chaque création : la vaine recherche d’une direction dans un monde athée, la complexité de l’humain révélée par cette errance. Pétrus cherche à développer une écriture scénique singulière. On a pu voir, respectivement en 2004 et 2007, La campagne de Martin Crimp et Son visage soudain exprimant de l’intérêt d’après Kroetz et Ducros. En 2008, Pétrus devenait compagnie en résidence permanente à La Chapelle. Depuis, il y a présenté Tentatives de Jérémie Niel et, en coproduction avec Abé Carré Cé Carré, Chroniques, un regroupement de trois pièces d’Emmanuel Schwartz. Au FTA 2010, il proposait Cendres, son projet le plus ambitieux.

Cinéaste Denis Côté
Scénographie Simon Guilbault
Costumes Fruzsina Lànyi
Lumière Régis Guyonnet
Conception sonore Alexandre St-Onge
Crédit photo : Dominique Fortier

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Une présentation de La Chapelle
Une production de Pétrus
Une coproduction du Festival TransAmériques et de La Chapelle
Avec le soutien de la Fondation Cole
Créée en résidence à La Chapelle

La Chapelle
3700, rue Saint-Dominique
Billetterie : 514-843-7738

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Dates antérieures

29, 30, 31 mai et le 1er juin 2010 - FTA

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 Critique
Critique
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par Sara Fauteux

Cendres est issue d’une adaptation libre, par le metteur en scène Jérémie Niel, du roman Terre et cendres d’Atiq Rahimi. La pièce, créée au FTA en 2010, est reprise pour une semaine au théâtre La Chapelle.

Sur la scène dépouillée, il y a un vieil homme et un enfant, un gardien, un marchand, quelques cailloux. Le vieillard et l’enfant attendent le passage d’une voiture pour se rendre à la mine, où le père de l’enfant travaille, afin de lui annoncer que le village a été dévasté; que sa femme, son frère, sa mère, tous sont morts. Ils attendent en silence. On comprend que l’enfant est devenu sourd suite à la catastrophe qui a détruit le village. Il n’a pas plus de 10 ans, c’est un survivant, mais il est clair qu’il n’est pas là pour symboliser l’espoir. Pour lui, les voix, les sons, ont été sacrifiées en échange de la vie.

L’autre survivant, le grand-père, est visiblement encore sous le choc de la catastrophe qui lui a fauché sa famille et sa vie. Accablé, incapable de communiquer avec son petit-fils, le vieillard n’est pas en mesure d’apporter du réconfort à l’enfant. Il lui donne un fruit, probablement le dernier qu’il a dans son sac, et demande de l’eau pour étancher sa soif, mais semble incapable de le prendre dans ses bras pour calmer sa douleur. Il ne peut qu’attendre le camion qui l’amènera jusqu’à la mine. Là-bas, il trouve un monde qui continue de tourner toujours malgré le désastre, des ouvriers qui continuent de travailler malgré tout.

Le désespoir qui habite les personnages de Cendres est tangible. Le silence qui pèse entre le gamin et son grand-père illustre bien leur incompréhension de ce monde en ruine. On y voit le signe d’une détresse immense qui empêche le vieil homme d’offrir du réconfort à son petit-fils. Mais cette absence d’émotivité et de volonté à réconforter un enfant est étrange. Comme si la relation avait été simplifiée, réduite, dans le but de précipiter notre compréhension du vide qui habite le vieil homme. Le lien complexe et central à la pièce qui unit les deux êtres aurait mérité d’être davantage approfondi afin de nous faire vivre cette perte d’espoir terrifiante plutôt que de nous l’exposer.

Au fond de cette scène presque vide, on trouve un écran sur lequel des images sont projetées presque tout au long de la représentation. Pour ce projet, Niel a fait appel au cinéaste Denis Coté. Au début, ces images en mouvement sont indépendantes du récit et servent de trame de fond. Elles se mêlent, en même temps qu’elles la créent, à l’atmosphère pesante et apocalyptique qui règne sur scène. Puis, elles sont intégrées à la trame narrative le temps du voyage vers la mine. En prenant en quelque sorte le temps d’apprivoiser le médium et en le laissant tranquillement prendre sa place, Niel réussit à intégrer le cinéma à son art de manière particulièrement réussie. 

Les mots sont rares dans cette production sobre et sombre. Les gestes aussi. Tout est réduit au minimum, sauf la souffrance. Les comédiens sont munis de micros qui leur permettent de jouer de manière minimaliste tout en donnant accès au public à l’intimité du personnage. Si cet effet avait porté ses fruits dans La campagne, de Martin Crimp, que Niel avait portée à la scène en 2005, c’est ici à moitié réussi. À de rares moments, une respiration, un souffle nous parvient et nous permet effectivement de capter une part cachée du personnage qu’il aurait fallu exagérer sans les micros pour la rendre accessible au public. Sinon, l’appareil ne fait qu’amoindrir l’émotion en installant une distance.

Dans son adaptation, Niel a choisi de ne pas conserver les références historiques et géographiques qui sont pourtant au cœur du roman de Rahimi. Pour lui, la perte de sens et le désespoir qui s’abat sur les personnages du roman suite à une catastrophe bien précise est le lot de tous dans le monde actuel. Mais il ne perçoit pas cette détresse avec cynisme. Il voit plutôt cette perte de certitude comme une opportunité d’entrevoir de nouvelles possibilités qui ne peuvent qu’émerger du doute. Quoi qu’il en soit, Cendres est un spectacle magnifique qui nous happe dans une atmosphère de désespoir où notre propre errance à la recherche d’un sens au monde dans lequel nous vivons trouve effectivement une résonance.

03-12-2010

par Mélanie Thibault (FTA 2010)

Quand tout dévaste, tout se tait.

La catastrophe a sonné à la porte du village d’un vieillard et de son petit fils, seuls rescapés de la famille, témoins dévastés. L’enfant est sourd des causes de l’attaque, troublé par ce nouveau silence. Il plane, accompagné par la noirceur de la scène, comme l’étendard de la douleur.

Plutôt que de trop en dire, la compagnie Pétrus a fait le choix de livrer cette errance post-traumatique aux mains de l’obscurité et du murmure. Les micros à fond, les respirations se font entendre, le tremblement des quelques mots résonne pour se perdre de nouveau dans le poids de la situation. Quoi dire quand rien ne reviendra ? Que faire quand l’inimaginable se produit, quand la guerre ravage tout espoir ? Lutter ? Jérémie Niel, dans sa mise en scène épurée, semble plutôt parier sur l'entreprise vaine de reconstruire une autre vie.

Conduit par des images de pierres, de lieux vides, de sections de visage en gros plan, le réalisateur Denis Côté fait ressentir le vide installé par la guerre jusque dans l’intimité des personnages. Un jeu décalé et découpé qui suggère un rythme lent, parfois difficile à supporter. La pièce ne dure qu’environ une heure 15 ; c’est suffisant pour saisir l’ampleur de la tragédie. L’originalité dans la transposition du sujet d’Atiq Rahimi, la guerre afghane, nous laisse songeurs sans pour autant bouleverser.

30-05-2010

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