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Du 24 février au 12 mars 2011
Jocaste
Texte : Mariana Percovich
Traduction : Guy Lavigerie
Mise en scène : Julie Vincent et Yves Dagenais
Avec : Julie Vincent

La fatalité s’abat sans appel sur Jocaste, mère et épouse d’Œdipe, qui a porté dans son ventre son destin funeste. Dans cette adaptation du grand classique de la mythologie grecque, l’auteure uruguayenne Mariana Percovich donne la voix qui manquait à ce personnage. D’où cette courte pièce en vers où la régente de Thèbes est moins définie par son état de mère, et de reine tragique, que par sa condition de femme…

Aujourd’hui, l’impensable désir à l’heure de la maturité chez la femme demeure encore un tabou. C’est cet aspect qui interpelle et qui est au centre de la recherche d’André Brassard et de Julie Vincent. Dans cette démarche, la comédienne agit comme narratrice, elle personnifie tous les rôles et assume aussi, comme dans le conte oral, tous les degrés de conscience du récit. Julie Vincent s’approprie le mythe de Jocaste de façon contemporaine à partir des questions trop rarement soulevées dans notre société.

Atelier préparatoire : André Brassard et Julie Vincent
Mouvement : Estelle Clareton
Conception musicale : Carol Bergeron
Éclairages : Mickaël Fortin
Assistance : Roxanne Henri
Recherche : Olivier Kemeid
Scénographie, accessoires et costumes : Geneviève Lizotte

Du mardi au samedi à 20 h
Jeudi 3 mars à 19 h, suivi d'une discussion
Vendredi 4 mars à 18 h 30

Carte Premières
Cartes Prem1ères
Date Premières : 24-25-26 février 2011, 1er mars 2011
Régulier : 28$
Carte premières : 14$

Production Singulier Pluriel en codiffusion avec Espace Libre.

Espace Libre
1945, rue Fullum
Billetterie : 514-521-4191
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 Critique
Critique
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par Sara Fauteux


Crédit photo : François-Régis Fournier

Du 24 février au 12 mars à L’Espace Libre, Julie Vincent s’attaque au texte de l’auteure uruguayenne Mariana Percovich, Jocaste. Avec ce projet, la compagnie Singulier Pluriel poursuit l’exploration théâtrale dans l’idée du voyage et de la découverte d'autres univers et approches théâtraux.

La proposition de la pièce est incroyablement fertile, essentielle : elle donne la parole à Jocaste, accorde une voix au silence de son histoire. La femme prend le dessus sur la reine, sur la mère. Cette idée de moderniser le personnage de Jocaste en l’abordant sous un angle nouveau est particulièrement riche. On découvre ainsi une nouvelle figure qui décuple encore la résonance de cette imposante mythologie grecque dans laquelle nous ne nous lassons pas de redécouvrir du sens.

Le texte de Percovich est trop elliptique pour rendre compte de toute l’histoire de Jocaste. On comprend que l’auteure s’est approprié le récit pour en dégager les idées qui appartiennent à la femme plutôt qu’au mythe. Par contre, on se questionne à savoir si l’objectif est atteint avec ce texte qui se situe entre le récit et la poésie, entre la réappropriation et la reproduction. Tout en tentant d’accorder une voix à la femme et de bousculer le mythe, Percovich nous plonge dans un univers très proche de la tragédie et met de l’avant une écriture chargée, presque pompeuse.

Dans la tradition du conte et de l’oralité, que Vincent avait déjà commencé à explorer dans Le Portier de la Gare Windsor, la comédienne incarne tous les personnages de l’histoire et assume tous les niveaux du récit. L’exercice suscite une distanciation chez l’interprète, une froideur qui ne la quitte pas, même lorsqu’elle incarne Jocaste. Est-ce la metteure en scène encore trop présente derrière l’actrice qui porte constamment un regard sur elle-même? Quoi qu’il en soi, cette distance empêche l’émergence réelle du personnage de la reine comme celui de la conteuse.

Le travail des concepteurs est par contre très réussi et appuie la comédienne de manière habile et sentie. Les projections qui ouvrent et ponctuent ensuite le spectacle sont efficaces et s’inscrivent bien dans l’esthétique du spectacle. La trame sonore évocatrice de Carol Bergeron devient un deuxième personnage salutaire. L’espace scénique sobre et glacial de Geneviève Lizotte brille sous les éclairages particulièrement réussis de Mickaël Fortin. Mentionnons également le costume de la comédienne, talons hauts et robe de soirée, un choix qui surprend, mais qui évoque clairement la démarche de la pièce.

Quelques soirs de représentation permettront certainement à la comédienne de prendre ses aises et de s’abandonner pour envoûter davantage les spectateurs. Il reste que le texte de Percovitch ne va pas aussi loin que l’on voudrait dans la réappropriation du mythe et que le travail d’interprétation est plus axé sur les techniques orales du conte que sur le dévoilement de la femme derrière l’histoire. 

01-03-2011
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