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Du 12 au 29 septembre 2012, 19h30
Martine à la plage
Texte et mise en scène de Simon Boulerice
Avec Sarah Berthiaume

Martine voit flou. Lors d’une visite dans un Farhat, elle se découvre une passion dévorante pour Gilbert Marcel, son optométriste albinos et nouveau voisin. Dès lors, elle s’acharne à ruiner sa vue pour prendre rendez-vous avec Gilbert le plus régulièrement possible. Martine à la plage, c’est l’histoire d’une Lolita qui connaît échec par-dessus échec. Une Lolita en « swim-aids » dépourvue de séduction.


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Scénographie et costumes Julie Pelletier
Éclairages et direction technique Maxime Clermont-M
Direction de production et régie Tania P.Viau
Photo Carolyne Scenna

Durée : 1h30 (sans entracte)

Carte Prem1ères
Cartes Prem1ères
Date Premières : du 12 au 18 septembre
Régulier : 29,95$
Carte premières : 16,45$

Une production d’Abat-Jour Théâtre en codiffusion avec le Théâtre Denise-Pelletier


Salle Fred-Barry du Théâtre Denise-Pelletier
4353, rue Sainte-Catherine Est
Billetterie : (514) 253-8974

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Dates antérieures (entre autres)

Création : du 14 au 25 septembre 2010 - Bain St-Michel

 
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 Critique
Critique

par Gabrielle Brassard


Martine à la plage, du jeune et talentueux Simon Boulerice, est de retour deux ans après sa création, à la salle Fred-Barry, et ce, pour notre plus grand plaisir.

Dans un décor moins bucolique que le bain St-Michel, tout approprié pour cette « comédie de fin d’été » selon la définition même de l’auteur, la salle Fred-Barry ne nous fait pas moins apprécier cette pièce à la fois drôle et tragique, profonde et légère, amusante et triste.

La mise en scène, concoctée aussi par Boulerice, est d’une grande ingéniosité. On apprend même, en lisant sur la conception de la pièce, que l’histoire s’est bâtie autour des éléments de la scénographie plutôt que le contraire. Boulerice savait qu’il voulait utiliser des acétates, des diapositives, un rétroprojecteur et un jeu de OUIJA sur la scène. Amalgamé au personnage très justement interprété par Sarah Berthiaume, basé sur un clown qui ne déroge jamais de la bonne humeur, peu importe les situations, Martine à la plage est attachante, autant par le personnage que par ses propos.

Le rétroprojecteur est utilisé à toutes les sauces : images de fantômes ou encore bouts de textes ; on y crée même une voiture, avec des phares en arrière-plan, et même de la pluie. L’image est très réussie, grâce à la scénographie de Julie Pelletier, qui a aussi confectionné les costumes, qui se résume notamment à une multitude de bonnets de bain que Martine passe l’heure et demie de la pièce à alterner. Les éclairages diversifiés et efficaces de Maxime Clermont-M., également à la direction technique, apportent beaucoup à cette pièce rafraichissante et dérangeante à la fois.

Martine est seule, un brin déjantée et vit véritablement dans son monde. Elle est loin d’être sage et naïve, si ce n’est que sa folie de croire que son voisin, également son optométriste et père de famille, est amoureux d’elle. Entre les baignades chez ledit voisin, les chansons d’une autre époque qu’elle écoute à longueur de journée (excellente trame sonore, d’ailleurs) et les tranches de melon qu’elle engloutit, Martine vit à travers les fantômes qu’elle voit, à cause de sa vue qu’elle détruit pour visiter son optométriste de voisin plus souvent, et les histoires qu’elle invente. On rit, tout en étant jamais tout à fait à l’aise, et on sent toujours que le tragique guette cette adolescente de quinze ans qui semble en avoir plus.

Le seul bémol provient de la fin, un peu en queue de poisson, qui nous laisse sur notre faim, mais qui nous laisse présager le pire. Même si Martine est plutôt drôle, tout comme la façon dont elle vit son histoire, un malaise plane, sous-jacent, nous laissant toujours craindre le pire, et croire que cette histoire finira forcément mal... Le délire de cette Martine, loin des histoires des livres français de notre enfance du même nom, va loin, et nous entraîne dans l’imagination débridée de cette adolescente pervertie par Boulerice, qui déconstruit toutes les images sages et innocentes que nous avions de l’héroïne dessinée d’une autre époque.

Simon Boulerice (Simon a toujours aimé danser) et Sarah Berthiaume, deux comédiens, auteurs, interprètes et cofondateurs d’Abat-Jour Théâtre, peuvent être fiers de cette belle reprise, à voir à Fred-Barry jusqu’au 29 septembre 2012.

15-09-2012




par David Lefebvre (2010)


Après Qu’est-ce qui reste de Marie-Stella?, qui a connu un franc succès à La Petite Licorne, et Simon a toujours aimé danser, le talentueux jeune auteur et metteur en scène Simon Boulerice récidive en explorant toujours le monde de l'enfance et de l'adolescence par l'entremise, cette fois-ci, d'une jeune fille et de son obsession amoureuse.

Martine, à l’aube de ses 15 ans, s'entiche éperdument de son nouveau voisin Gilbert, marié et père de famille. Sans scrupule, elle use de tout ce qu’il est possible d'user pour l’approcher et le séduire. Elle se brise la vue pour le visiter à sa clinique d’optométrie, elle garde la petite Chloé, elle s'impose dans la piscine familiale, elle sème la pagaille entre sa femme et lui, elle s’immisce dans leur intimité.

Spectacle solo écrit et conçu pour la comédienne Sarah Berthiaume, Martine à la plage est une comédie de fin d'été, comme on l'évoque bien lors des crédits en tout début de pièce, projetés sur le mur intérieur de la piscine du Bain St-Michel. Le lieu est tout désigné pour cette production, même s'il n’est que sommairement utilisé. Séparée en chapitres aux titres évocateurs, un peu à la manière des livres Martine que l'on connaît, la pièce nous plonge dans l'histoire de cette adolescente à l'imagination fertile, voire déséquilibrée. Adepte du jeu Ouija, elle s'imagine voir les fantômes de Jayne Mansfield et de Karen Carpenter avec qui elle discute souvent. L'esprit gamin du personnage transparaît autant dans le jeu de l'actrice, à la démarche sautillante et au langage relâché, que dans la scénographie. L'utilisation d'un rétroprojecteur est intéressante : il permet au personnage de Martine d'expliquer certains éléments de ses histoires, de les modifier en dessinant ou en écrivant sur les acétates, ou de se servir des projections comme d'un décor. C'est lors de ces derniers et rares moments, plus créatifs, que l'utilisation de cet outil devient ingénieuse.

Sarah Berthiaume nage avec aisance, le sourire impeccablement espiègle, dans cet univers aussi ensoleillé qu'étrange. Elle interprète tout autant le rôle de Martine que celui d'une narratrice plus ou moins conventionnelle, au langage plus soigné, mais caricatural, qui apparaît vers la fin de la pièce. Cette dualité qui s'installe dénote bien la folie qui s'empare du personnage ainsi qu'un certain détachement de la réalité. Si les éclairages de Maxime Clermont-Michaud sont remarquables pour un lieu aussi difficile à bien mettre en lumière, et que la trame sonore est absolument délicieuse (comment ne pas être sous le charme quand on nous balance les succès des Bobby Vee, The Crystals, Petula Clark, Dusty Springfield et Connie Francis), la mise en scène de Simon Boulerice est juste, simple, lumineuse, mais on sent tout de même une retenue, qu’on aurait pu pousser davantage la machine théâtrale. Plusieurs moments, dont la finale, ainsi que le type d'humour employé, auraient certainement pu bénéficier d'un esprit encore plus décadent, plus tordu, pour accentuer les effets comiques ou de malaise. Les quelques transitions, durant lesquels on affiche le titre du chapitre en cours, nous permettent d’apprécier les différentes chansons mais s’allongent souvent pour peu de choses.

Grâce au jeu doucement éclaté de la charmante comédienne, à l'espace scénique des plus appropriées et au ton très sixties véhiculé par la trame sonore et les accessoires et costumes - dont les nombreux bonnets de bain, Martine à la plage propose de forts jolis moments tout en donnant l'impression que le spectacle pourrait aisément pousser plus loin les nombreuses possibilités dont il recèle.

16-09-2010