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Du 3 au 20 avril 2013, les vendredis et samedis 19h30
Le P'tit Jourdain
Librement inspiré du Bourgeois Gentilhomme de Molière
Adaptation et mise en scène : Hubert Fielden
Avec Olivier Barrette, Louis-Philippe Berthiaume, Vicky Bertrand, Marie-Anick Blais, Jérémie Francoeur-Chalifour, Gabrielle Lessard, Virginie Ranger-Beauregard, Émilie Sigouin, Philippe Thibault-Denis,  Marie-Noëlle Voisin

Monsieur Jourdain, à peine âgé de 17 ans, vit en Nouvelle-France et est aussi inculte qu’écervelé. Riche héritier, il rêve de devenir un personnage en vue et fait défiler les « coachs » pour lui enseigner toutes les manières à la mode qui lui permettront de réintégrer la France. L’apprentissage de notre jeune héros l’entraînera dans un tourbillon de situations rocambolesques. Un clin d’oeil savoureux au Bourgeois Gentilhomme de Molière.

LA TROUPE DU PANACHE
La troupe du Panache a été formée pour reprendre Le P'tit Jourdain en autogestion. Elle est constituée en majeure partie de finissants 2012 du Conservatoire de Montréal. La troupe existe depuis 2011 et a pour mandat de permettre aux jeunes finissants d'aller chercher l'expérience d'un spectacle professionnel et de leur donner les outils pour le faire. Pourquoi le Panache? Le Panache c'est celui de l'orignal autant que celui de Cyrano. C'est une touche de terroir avec une touche de raffinement. La Troupe du Panache c'est une équipe généreuse et dynamique.


Concepteurs et collaborateurs artistiques : Madeleine Bélair, Bernard Bourgault, Huy Phong Doan, Yves Morin, Andrée Poitras

Durée : 1h15 (sans entracte)

Une production de la Troupe du Panache en codiffusion avec le Théâtre Denise-Pelletier


Salle Fred-Barry du Théâtre Denise-Pelletier
4353, rue Sainte-Catherine Est
Billetterie : (514) 253-8974

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 Critique
Critique

par Olivier Dumas

Dans son percutant essai La culture recyclée, l’auteur Philippe St-Germain opposait l’attitude de deux célèbres réalisateurs, Laurence Olivier et Orson Wells, quant à leurs transpositions cinématographiques des œuvres du répertoire shakespearien. Le premier était reconnu pour reproduire à la lettre l’esprit du matériel original, alors que le second se permettait de prendre des libertés artistiques tout en voulant s’assurer une certaine fidélité de pensée à l’auteur d’Hamlet.

Cette introduction tente de mettre en lumière le scepticisme devant cette production particulière du P’tit Jourdain, adaptation québécoise du Bourgeois gentilhomme de Molière. Conçue et mise en scène par Hubert Fielden pour la Troupe du Panache des finissants 2012 du Conservatoire d’art dramatique de Montréal, cette vision d’un classique du théâtre français ne convainc pas vraiment.

Probablement l’un des dramaturges les plus joués au Québec avec Shakespeare et Michel Tremblay, Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière, a connu au fil du temps d’innombrables relectures, des plus conventionnelles au plus éclatées. De mémoire de spectateur à Québec, le Théâtre de la Bordée avait même osé inclure une chanson de Plume dans un pénible Un médecin malgré lui à la sauce contemporaine, dans les années 1990. Daniel Paquette avait proposé en 2005 une version décapante et très drôle du Malade imaginaire. Entre l’audace, la reproduction muséale ou les intentions mal exploitées, le meilleur a donc côtoyé le pire.

D’une durée d’une heure quinze minutes, la présente relecture avait d’abord été présentée en territoire européen, au Festival du Mois Molière à Versailles. Nos cousins de l’Hexagone ont probablement souri en voyant sur scène plusieurs clichés, folkloriques ou actuels, associés à l’imaginaire québécois. De la comédie-ballet en cinq actes et écrite en prose vers 1670, il reste peu de chose sauf quelques flashs intéressants ou quelques traits d’esprit dans ce portrait d’un homme rongé par le vice ou la prétention. Le gentilhomme du 17e siècle a été transformé en un jeune homme à l’allure adolescente avec ses habits clinquants, de style gangsta rap avec ses pantalons bouffants et ses bijoux rutilants. Il s’oppose désormais aux amours de sa jeune sœur (plutôt que sa fille dans l’œuvre originale) et rencontre des maîtres qui lui apprennent la « beauté » des arts populaires, comme, entre autres, un air country, la danse à claquettes ou encore le break dance pour mieux le ridiculiser.

Heureusement, les jeunes interprètes démontrent une énergie vive et fougueuse dans tous les rôles qu’ils incarnent. On sent une cohésion, une ferveur, une chaleur et une générosité dans leur travail d’équipe qui fait plaisir à voir.

Là où le bât blesse se situe au coeur des choix artistiques qui, au lieu d’apporter un souffle nouveau à un texte plusieurs fois centenaire, nous fait regretter toutes ces entorses au matériau initial. Divertissement à l’intrigue limitée qui ne s’inscrit pas parmi les plus fortes créations moliéresques, le texte comporte plusieurs scènes cocasses. Or, le metteur en scène n’a pas réussi à les rendre fortes ou concluantes. En combinant quelques répliques exprimées dans l’élégant français de l’époque, avec des expressions populaires et des anglicismes se terminant en « ing », il manque à son travail une ligne directrice. Vouloir inclure des anachronismes pour coller à la réalité des jeunes d’aujourd’hui rend rarement justice à une histoire qui a fait ses preuves et qui a transcendé les époques et les modes. Et que dire de cet insupportable et trop long chant à saveur amérindienne avec ses énumérations de mots sans véritables liens entre eux en guise de conclusion. 

Avant de quitter la salle Fred-Barry, le public adolescent a applaudi les comédiens poliment, sans plus. L’accueil réservé à ce P’tit Jourdain témoigne de cette impression qu’à force de vouloir moderniser et simplifier les pièces du répertoire théâtral, celles-ci se retrouvent souvent dépouillées de leur essence, de leur richesse et de leurs oripeaux.

15-04-2013