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Du 24 au 28 septembre 2013
Soledad au hasardSoledad au hasard
Texte et mise en scène Julie Vincent
Avec Liliane Boucher et Julie Vincent

Soledad au hasard est l’histoire d’une amitié improbable entre deux femmes, deux villes, deux chaos. L’écroulement de la ville de Buenos Aires au moment du krach financier de 2001 est le point focal d’une rencontre fulgurante. Une photographe québécoise, Annabelle, perd tout dans la capitale argentine au moment du soulèvement populaire. Dix ans plus tard, à l’Université du Québec, Soledad, jeune étudiante venue d'Argentine, ne pourra s’intégrer à sa nouvelle ville, Montréal, que lorsque le récit d’Annabelle lui sera enfin révélé au métro Berri près de la statue d'Émilie Gamelin. Des photos mettent en contexte l’espace poétique et l’alimentent au fil des événements sociopolitiques qui tissent l’ouvrage. Soledad au hasard est un conte théâtral de Julie Vincent. Singulier Pluriel s’associe à la jeune compagnie de théâtre Samsara et à la fascinante jeune actrice, créatrice de cette compagnie : Liliane Boucher. Michel Smith, compositeur, s’inspire des rythmes argentins et sa présence sur scène soutient les protagonistes.

La rencontre des deux femmes, sur fond de crise économique mondiale, reflète les contrastes entre deux continents et donne à voir une autre Amérique. La matière du conte s’est enrichie des témoignages de jeunes Argentins ayant vécu la crise économique de 2001 à Buenos Aires et du témoignage de Montréalais, comme les artistes de Singulier Pluriel et de Samsara, qui vivent de plein fouet la crise économique.


Conseillère à la dramaturgie : Blanca Herrera
Scènographie : Stéphanie Champagne
Costumes : Geneviève Lizotte
Éclairages : Mickaël Fortin
Musique originale : Michel Smith
Photographie : François-Régis Fournier
Montage : Vanessa P.Dubé

Une production de Singulier Plurier en association avec Samsara


Premier Acte
870, de Salaberry
Billetterie : Réseau Billetech 418-694-9656

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 Critique
Critique

par Odré Simard

Une jeune femme, qui fuit l'Argentine, habite Montréal et se réfugie dans ses études littéraires portant sur l'oralité. Cherchant son prochain sujet d'étude, elle tombe sur une femme plus âgée, photographe énigmatique qui, chaque jour, se cache près de la statue d'Émilie Gamelin, métro Berri. La première, Soledad (attachante Liliane Boucher), tente d'exorciser ses démons qui la harcèlent depuis un passé pas très lointain, de son Argentine natale, berceau de soulèvements populaires et d'horreurs innommables sous la dictature. La seconde, Anabelle (fébrile Julie Vincent), opte plutôt pour l'oubli, bien que son visage lacéré dit à quiconque que de bien grandes souffrances se terrent en elle. De leur rencontre et de leurs hasardeux rendez-vous quotidiens naîtront un port d'attache, une pulsion commune qui dicte d'avancer, malgré la sourde douleur qui les assaille chacune.

Les compagnies Singulier/Pluriel et Samsara théâtre joignent leur passion pour nous présenter cette œuvre plaçant le spectateur sur un chemin dans l'axe nord-sud, constamment ramené de Buenos Aires à Montréal. Le préambule nous présente l'auteure et metteure en scène de la pièce, Julie Vincent, fébrile de nous partager sa plus récente création, déterminée à prolonger la voix des gens du sud jusqu'à nous. Les grands bouleversements dans la vie des deux personnages ont eu lieu dans ce sud vivant et brûlant, plus précisément lors d'une rencontre fortuite au moment de la crise financière et sociale qui frappa de plein fouet le pays en 2001. Une première rencontre sans qu'elles puissent voir leurs visages, mais qui les marquera profondément, qui balisera un avant et un après. Une seconde rencontre, dix ans plus tard, dans ce nord froid et endormi, là où elles se voient et se cherchent. La mission de la compagnie Singulier/Pluriel vise justement ce métissage de lieux qui se confrontent et s'entrechoquent. Par contre, il y a un certain flou dans la proposition, on en vient à ne plus trop savoir quel est le véritable point focal, les deux solitudes ou encore le cri d'un pays en soulèvement. L'un n'empêche pas l'autre, mais le politique et le social deviennent à un certain moment un prétexte alors qu'ils pouvaient demeurer personnages principaux. Peut-être que cela se réglera avec le temps et grâce à un resserrement de la tension du récit, car la pièce offre son lot de moments forts habillés de superbes images.

Soledad au hasard propose une ambiance très réussie grâce, entre autres, à l'apport du photographe François-Régis Fournier qui vient en quelque sorte rattacher les morceaux ensemble avec sensibilité en exposant, oui, des clichés des deux villes où passent les protagonistes, mais aussi en nous présentant le regard photographique du personnage d'Annabelle, offrant du coup une nouvelle dimension à l'oeuvre. La scénographie qui supporte les images est bien pensée et les éclairages qui les rehaussent sont très précis et maîtrisés. L'atmosphère sonore soutient bien les interprètes et la présence sur scène de l'accordéoniste Michel Smith apporte beaucoup de chaleur, bien que les interactions des personnages avec ce dernier ne soient pas toujours convaincantes.

Beaucoup de pistes intéressantes et émouvantes dans cette œuvre ; reste toujours cette question par rapport à ce genre théâtral où la narration prime sur l'action, pourquoi dire les émotions et les gestes, au lieu de les vivre tout à fait? Mais on ne peut nier que dans ce choix de forme, Soledad au hasard est débordante de volonté et parvient à nous emmener ailleurs.

25-09-2013