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Du 3 au 7 décembre 2013
Entre Vous et Moi, il n'y a qu'un mur
Texte et mise en scène Jocelyn Pelletier
Avec Frédérique Bradet, Alexa-Jeanne Dubé, Guillaume Perreault et Eliot Laprise

Sushi (poisse/son/mort) vous présente un spectacle choral, une fresque en plusieurs tableaux qui vise à dresser un certain portrait générationnel. Les individus ou personnages sont les propres artisans de ce spectacle, tour à tour bourreaux et victimes. À la manière d’une espèce de rituel médiatique, ils mettent en scène leurs propres malheurs… et leurs bonheurs aussi.

Notre ère prive les humains d’individualité et engendre des troupeaux d’êtres en mal d’être ; et en mal de devenir, c’est-à-dire en défaut d’avenir. Ces troupeaux confus auront de plus en plus tendance à devenir furieux. Furieux et vides.

Des existences en quête ou perte de sens.

Entre vous et moi, il n’y a qu’un mur.

L’horreur côtoie l’ordinaire au quotidien.

Notre soif constante de voyeurisme… attentat à cette standardisation de l’individu dans le but avoué de remettre l’humain au coeur de ce chaos moderne.


Assistance à la mise en scène : Rachel Lapointe
Scènographie, costumes et accessoires : Dominic Thibault
Éclairages et assistance à la scénographie : Jean-François Labbé
Environnement sonore : Pascal Asselin
Mouvement : Karine Ledoyen

Aussi à Montréal du 20 au 22 novembre 2013, La Chapelle

Une production Sushi (poisse/son/mort)


Premier Acte
870, de Salaberry
Billetterie : Réseau Billetech 418-694-9656

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Dates antérieures (entre autres)

Du 18 au 28 octobre 2011, Premier Acte

 
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 Critique
Critique

par Pascale St-Onge

Faire tomber les murs entre les générations, voilà ce à quoi semble aspirer l’équipe du spectacle Entre vous et moi, il n’y a qu’un mur ;dresser le portrait de différents groupes de la société, différents microcosmes, démontrer leur perte de repères au milieu de l’horreur et de la violence.

Avec quatre interprètes, l’auteur et metteur en scène du spectacle Jocelyn Pelletier nous présente divers tableaux et de multiples personnages, majoritairement des couples et des adolescents, qui prennent vie dans un environnement aux inspirations très urbaines. 

L’ensemble de la scénographie est effectivement très réussi. La présence de la caméra, qui enregistre en direct et est projetée en double sur le mur du théâtre, offre un regard différent sur les personnages, parfois plus documentaire ou plus esthétique. Un grand mur est illuminé en fond de scène et les interprètes y écrivent les titres des tableaux sous forme de graffitis. L’éclairage sert majoritairement à fragmenter l’espace : parfois une simple ligne lumineuse vient séparer les personnages, métaphore de ce mur dont il est question dans le titre de la pièce.

Mais que nous dit-on au juste ? Avec un niveau de jeu, un ton et une plume très poétiques, mais peu théâtraux, les dialogues s’enfilent sans qu’on ne saisisse trop les enjeux de chaque personnage. De ce spectacle très dense et qui veut visiblement dire beaucoup de choses, il ne nous en parvient que très peu - mis à part le tout dernier tableau où la situation de ce tireur dans une école secondaire est très claire et la tension est bien présente. Les interprètes semblent parfois étourdis, leurs différents personnages manquant parfois de nuances, mais nous offrent somme toute une bonne performance (particulièrement Alexa-Jeanne Dubé, très présente à La Chapelle cette année, qui livre un dernier monologue percutant.).

Entre vous et moi, il n’y a qu’un mur se veut un spectacle choral, mais qui nous plonge dans une confusion due au trop grand nombre de trames qui ne sont pas exploitées à fond. Malgré certains moments plus accomplis, l’ensemble du spectacle donne l’impression d’être encore au stade d’exploration et du laboratoire et ce mur qui devait tomber entre nous reste bien solide et debout.

24-11-2013



par Odré Simard (2011)

À mille lieues d'un théâtre prémâché, Jocelyn Pelletier nous offre une pièce électrochoc qu'il qualifie d'exigeante et de surchargée. Présentée au théâtre Premier Acte, Entre vous et moi il n'y a qu'un mur propose une constellation d'êtres esseulés, essoufflés ou carrément asphyxiés par un monde trop dense, trop violent. L'auteur et metteur en scène nous largue, par le biais de ses interprètes solides, une salve ininterrompue de mots justes et mordants, empreints de sensibilité et d'une urgence palpable.

Comme l'indique le programme, nous assistons d'abord aux questionnements d'un couple sur leur relation ambigüe, puis vient la mère de famille qui nous livre une litanie presque obsessive sur sa perfection sans tache, alors que ses deux filles réclament son attention sans succès. Ensuite, une jeune femme nous raconte dans un discours disloqué une soirée « pleine de promesses » qui tourne à l'enfer. Finalement, nous sommes les témoins d'une multitude d'adolescents vivant des situations cocasses ou désolantes soit à la maison, à l'école ou encore dans une fête, mais toutes teintées d'un malaise dévorant. La réception réelle du spectacle peut nous sembler toute autre que cette description assez simple. Plus les minutes avancent et plus les personnages sont flous, les acteurs changeant constamment de vêtements et ainsi de personnages, revêtant ces peaux éparses ; les textes sont hachurés, imbriqués subtilement les uns aux autres, chuchotés, hurlés, sués par les actrices et acteurs. Une force hors du commun surgit de ce procédé, car au risque de nous perdre, il nous fait prendre conscience que ces individus pourraient être n'importe qui, nos amis, notre famille ou encore nous-mêmes. Nous sommes tous aux prises avec ce monde aux technologies sans bornes mais à la communication défaillante. Entre chaque individu il n'y a qu'un mur et il ne tient qu'à nous de le faire disparaître pour enfin se rejoindre. La violence et le contraste des incursions sonores et musicales orchestrés par Pascal Asselin (Milimétrik) avec le silence et la stature désincarnée de la parole percutent à souhait le spectateur. Dans le regard de la jeune femme abusée, dans l'implacable déroute des adolescents, nous sommes figés devant ce questionnement « comment l'humain peut-il générer autant de violence, de souffrance, et comment contrecarrer ce déni dont nous sommes tous coupables? » Une réponse est tentée à la toute fin du spectacle, une ode contemporaine à la beauté par un homme qui demande dans une belle métaphore « son fix de lumière ».

Entre vous et moi il n'y a qu'un mur, c'est un texte et une mise en scène solide et rigoureuse signés Jocelyn Pelletier, un mouvement harmonisé avec talent par Karine Ledoyen, un jeu assuré par cinq interprètes investis et généreux (Alexa-Jeanne Dubé, Joanie Lehoux, Frédérique Bradet, Gabriel Fournier, Lucien Ratio), une ambiance sonore percutante élaborée par Pascal Asselin et Lucien Ratio et une scénographie et des éclairages au service de l'oeuvre, réalisés respectivement par Dominic Thibault et Jean-François Labbé. Une pièce qui en dit autant devrait être présentée chez les jeunes publics adolescents (non sans un certain suivi pédagogique, il s'agit tout de même d'une œuvre riche et complexe où il est possible de se perdre), et ce, dans l'espoir de leur partager cette vision du caractère insignifiant de la violence et de la haine gratuite. Il y a tant de choses plus essentielles, plus profondes, que tout cela peut commencer en laissant de côté l'intelligence de nos téléphones pour se tourner vers l'unicité des individus qui nous entourent.

21-10-2011