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1er avril 2016, 19h30 (rencontre avec les artistes)
Matinées scolaires : 30-31 mars, 1er avril
Avant l'archipel
Dès 12 ans
Texte Emily Pearlman
Mise en scène Joël Beddows
Avec Danielle Le Saux-Farmer et André Robillard

Lénaïque la Magnifique pleure à tous les jours afin de nourrir les fruits-dragons qui poussent dans les vergers de sa péninsule.  Un jour, au marché, elle aperçoit un garçon, Brévalaire Spectaculaire. Coup de foudre. Ils se voient tous les dimanches : entre les rendez-vous, ils comptent chaque pas qui les sépare dans le temps. 

Magnifiquement traduit par Danielle Le Saux-Farmer, le texte d’Emily Pearlman allie conte, musique, chant et improvisation. Deux interprètes entraînent le spectateur dans une nouvelle mythologie autour des premiers émois amoureux de deux personnages singuliers.  La disposition des sièges en bi-frontale plonge le spectateur au cœur de l’action et c’est ainsi que se raconte un nouveau mythe fondateur par les fruits-dragons, celui des péninsules et des je-me-souviens. Un pur bonheur !


Création originale : Mi Casa Theatre
Paroles et musique : Nicolas Di Gaetano
Traduction du texte : Danielle Le Saux-Farmer
Adaptation musicale : André Robillard
Scénographie : Karine Mecteau-Bouchard
Assistance à la scénographie : Karyane Lachance
Lumières : Benoît Brunet-Poirier
Collaborateur à la création : Guillaume Saindon
Assistance à la mise en scène : Guillaume Saindon

Durée environ 55 minutes

Dans le cadre de la Journée Mondiale du Théâtre, Les Gros Becs vous propose de bénéficier du tarif artisan pour le spectacle Avant l'archipel.
Le 1er avril à 19h30
TARIF ARTISAN : 15,25 $!* (prix rég. 19,25$)

Coproduction L’irréductible petit peuple (Québec) et L’Atelier (Ottawa)


Les Gros Becs
1143, rue Saint-Jean
Billetterie : 418-522-7880 poste 1

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Critique

Lénaïque la Magnifique, jeune femme solitaire, inspecte les flocons de neige et indique le sud aux oiseaux. Elle cultive aussi des fruits dragons : pour nourrir ses arbres fruitiers, elle pleure. Plus les larmes sont salées, plus les fruits sont gorgés de sucre. Et le dimanche, elle va les vendre au marché du continent. Mais attention, si vous êtes acheteurs, ne faites pas de pléonasmes, ils en sont allergiques et la crise peut être terrible. Un jour, elle y fait la rencontre de Brévalaire Spectaculaire, homme-enfant-troubadour qui la rend folle d’amour. C’est le bonheur ; durant la semaine, elle ne fait que compter les heures qui la séparent de lui, au détriment de ses arbres qui s’assèchent. Quand elle s’en rend compte, il est trop tard ; elle pleure tellement que sa péninsule devient une île, et Brévalaire, qui l’attend inlassablement au marché, finit par restituer tout l’amour qu’il avait pour elle pour cesser de souffrir et l’oublier.

Première production de la compagnie L’irréductible petit peuple, en collaboration avec la compagnie ottavienne L’Atelier, Avant l’archipel est une œuvre éclatée, plus près de la performance que du théâtre conventionnel. Les styles s’y mélangent allègrement : improvisations avec le public, conte, jeu théâtral, chansons… c’est un joli capharnaüm contrôlé. Le public tombe rapidement sous le charme de cette Lénaïque, joyeuse et allumée, et de Brévalaire, tricoteur de tuques truffées d’allégories, mystérieux et musicien, maniant bien le ukulélé. « Bienvenue chez moi! » clame d’emblée André Robillard, le comédien à l’énergie contagieuse et vivifiante qui dévoile peu à peu le récit de ces deux amoureux, amis des oiseaux et des constellations (avec un clin d'oeil à Bowie au passage) ; c’est bien à cet endroit que nous sommes, dans un chez-soi confortable, où le désir de se faire raconter une histoire est plus fort que tout.

Danielle Le Saux-Farmer, qui interprète Lénaïque, signe la traduction et l’adaptation du texte de la Canadienne Emily Pearlman, intitulé Countries Shaped Like Stars, qui a charmé tout le Canada depuis la création du spectacle au festival Fringe d’Ottawa en 2009. Elle a su s’approprier la poésie de Pearlman pour ainsi proposer un texte tout aussi profond et émouvant, que juvénile et ludique. Car, si la finale est tragique, Avant l’archipel est d’abord une ode à la rencontre, à l’amour et au bonheur partagé. Qu’il est amusant de voir toute la maladresse amoureuse entre les deux personnages, et d’entendre le public s’exprimer devant ces baisers qui ne viennent pas !

La mise en scène de Joël Beddows, étudiée, minutieuse, donne beaucoup de place aux comédiens, leur permettant de transformer la pièce en un vrai terrain de jeu. Judicieuse aussi l’idée de séparer le public en deux, qui se fait face de chaque côté de la minuscule scène centrale, l’un étant le miroir ou la complémentarité de l’autre. L’interaction avec le public brise le quatrième mur, et ce, avant même le début de la pièce. Durant la représentation, on demande des blagues, on joue au téléphone arabe, on passe même des plateaux de collation entre les rangées : l’attention des jeunes est toujours interpelée.

La musique, de Nicolas Di Gaetano et adaptée par André Robillard, occupe une place prépondérante dans le récit et dans le spectacle. Elle est le ciment entre les scènes, le lien indéfectible entre les deux personnages. Les airs sont empruntés autant à la musique traditionnelle que country, en passant par quelques airs populaires (l’une des chansons évoque  même quelques accords d’une mélodie très connue de Noir Désir).

Avant l’archipel est un objet terriblement sympathique, qui rappelle vaguement dans sa forme le Midsummer de l’Écossais David Greig. Le seul bémol que l’on pourrait émettre au sujet du spectacle concernerait le public cible : alors que la poésie et l’histoire d’amour au centre du récit peuvent davantage parler aux adolescents, toutes les scènes en périphérie, qu’elles soient fantastiques ou ludiques, voire improvisées, semblent plutôt vouloir s’adresser à un public plus jeune.

31-03-2016