FTA 2010 - L'Effet de Serge

Conception, mise en scène et scénographie : Philippe Quesne

Critique de Sara Fauteux

En me rendant au Conservatoire d’art dramatique pour L’effet de Serge, j’étais particulièrement intriguée. Les occasions d’apprécier ce qui se passe de l’autre côté de l’océan en théâtre ne sont pas si fréquentes à Montréal. Et à l’intérieur même d’un milieu théâtral, les remises en question s’appuient souvent sur des idées communes qui deviennent elles-mêmes des codes acceptés et qui empêche ainsi, en quelque sorte, une véritable remise en question. Quand les créateurs d’ici se lancent dans ce genre d’exploration, ils ont souvent tendance à en faire trop, à avoir peur que le spectateur ne saisisse pas bien le sens de cette recherche et à vouloir expliquer le pourquoi du comment de la remise en question et ainsi en perdre l’essence même.

Rien de tout cela, dans L’Effet de Serge. Désarmant de simplicité, sans prétention, ce spectacle français parvient à ébranler les codes de la représentation tout en les activant de manière efficace et précise. C’est dans un costume de cosmonaute que Serge nous accueille. Il commence par nous saluer, puis se présente, nous amène faire un tour sur la scène qui lui servira de décor. Il nous parle un peu des thèmes abordés et nous décrit ce qui se passera dans la prochaine heure. Serge sera chez lui et le temps passera, de dimanche en dimanche, puisque le dimanche, Serge prépare de petits spectacles de une à trois minutes qu’il présente à des amis. Animés par une riche trame sonore, les spectacles de Serge sont surprenants, dérisoires.

Le travail autour du personnage de Serge est particulièrement intéressant. Son aspect physique, sa voix et sa démarche lente créent un inconfort subtil qui installe une distanciation de l’effet de spectacle tel que nous le concevons.

Mais c’est surtout la réaction des invités et le contexte de ces représentations qui saisit. Cette mise en abîme est certainement une occasion pour Philippe Quesne (à la conception, mise en scène et scénographie) de critiquer la réception et l’art critique. Pourtant, peut-être ne faut-il pas y voir une critique autant qu’une simple reprise de contact avec la réalité de la représentation. Loin de toute intellectualisation de la chose, la pièce ne fait que porter une «attention désintéressée» aux codes du spectacle et nous amène ainsi à prendre pleinement conscience de ce dont il s’agit.

04-06-2010