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Du 8 au 10 novembre, du 13 au 17 novembre 2007

Ronnie Burkett Theatre of Marionnettes

10 DAYS ON EARTH
Spectacle en anglais pour adultes (14+)

Création et interprétation de Ronnie Burkett

Si un jour on se retrouve seul, mais qu’on ne sait pas que l’on est seul, se sent-on vraiment seul? Voilà la question qui a inspiré au célèbre marionnettiste canadien Ronnie Burkett 10 Days on Earth, un charmant conte où la délicatesse des personnages à ficelles n’a d’égale que la justesse des sentiments.

Production Place des Arts

Crédit: Cylla von Tiedemann

Cinquième Salle de la Place des Arts
175, rue Sainte-Catherine Ouest
Billetterie, information : 514-842-2112

 

par David Lefebvre

Ronnie Burkett est définitivement l’un des plus grands marionnettistes du pays, et il le prouve encore une fois avec son plus récent spectacle, 10 Days on Earth. Les avis sont partagés sur ce qui a provoqué la passion de la marionnette chez l'artiste. Ici, on parle d'une fascination pour une scène du film The Sound of Music, là d'un encyclopédie reçue à l'âge de 7 ans. Mais nous savons qu'à l’âge de 14 ans, il commence son apprentissage lors d’une conférence sur l’art de la marionnette, au Michigan. À 19 ans, il séjourne en Russie, petit pèlerinage, et performe déjà avec la troupe de Bill Baird dans Greenwich Village, à New York. Rapidement, il gravit les échelons, travaille pour le réseau PBS et crée, en 1986, le Ronnie Burkett Theatre of Marionettes et produit des spectacles satiriques pour un public adulte. Ses créations impressionnent l’auditoire : certaines pièces peuvent compter jusqu’à 30 personnages, tous conçus et « incarnés » par Burkett, ce qui lui vaudra d’être récipiendaire de plusieurs prix, dont le Herbert Whittaker Drama Bench Award pour sa contribution exceptionnelle au théâtre canadien. Et si on lui parle de magie, il répond que c’est une question de technique, de talent, de travail et de passion. Pourtant…

Le maître vient nous présenter, pendant huit soirées, son plus récent spectacle, 10 Days on Earth. Montréal peut se compter chanceuse, voire privilégiée, elle est l’une des dernières villes où s’arrêtera la présente tournée internationale. Nous faisons la connaissance de Darrel, un homme déficient intellectuel, aux petites habitudes routinières et sécuritaires, qui aime compter, rire et qui, sur une période de dix jours, finit par comprendre la mort de sa mère, décédée dans son sommeil. Il est laissé à lui-même, mais on s’aperçoit vite à quel point la défunte, qui fut dévouée et aimante (même si cela n’a pas toujours été facile, démontré par quelques scènes du passé), a contribué à l’autonomie de son garçon. Parallèlement, sinon métaphoriquement, nous assistons avec Darrel aux aventures de son héros d’enfance, Honeydog le chien au veston couleur canneberge, et du canard nouveau-né Little Burp, duo plutôt singulier qui sillonne la vallée pour trouver un foyer, « un arbre gigantesque pour se reposer et un étang pour nager »*. Ils rencontrent différents animaux, qu’ils aideront du mieux qu’ils peuvent, en leur montrant les bienfaits de faire des « anges dans le gazon »*.

Sont alors abordés les thèmes de l’importance de la famille, de l’amitié, de ces liens qui nous unissent, de l’impact de la solitude et des sacrifices que cela implique. Darrel, qui tente de parler à sa mère tous les jours au travers de la porte de chambre, muette dans son sommeil éternel, et Lloyd, savoureux personnage emblématique du Divin, homme de la rue qui envoie paître les passants en les traitant des pires noms, sont étrangement liés. Est-on vraiment seul quand on ne le sait pas ?

Crédit photos: Trudie Lee

La douzaine de marionnettes à fils, reproduisant entre autres Darrel et sa mère à différents stades de leur vie, sont magnifiques. Les visages, pourtant figés, arrivent étonnamment à afficher des expressions extraordinaires – ou est-ce notre imagination qui nous joue des tours ? Les articulations sont délicates, bien calibrées, et, combiné au talent du manipulateur, lui permettent d’effectuer de petits mouvements compliqués, comme d’enlever sans effort apparent des pantoufles ou faire une vague fluide avec un bras. Les détails des visages et des mains, jusqu’aux petits costumes colorés, sont confectionnés avec un soin méticuleux. Ils évoluent dans un décor de maison victorienne, aux belles boiseries, mais aux murs défraîchis, où la brique commence à paraître à certains endroits. Trois pans, trois îlots, prennent place sur scène, sur lesquels Burkett, haut perché, se déplace et joue parfois au narrateur. Car l’homme ne s’efface pas complètement : véritable acteur, il incarne ses personnages, son faciès change complètement pour chaque poupée, et s’amuse à s’afficher dans la lumière et la quitter sans crier gare. Un simple coup d’œil de notre part nous confirme qu’il joue aussi intensément qu’il manipule avec doigté.

Alors que certains moments sont baignés d’une lenteur poétique, oniriques, d’autres sont de véritables torrents de paroles. C’est à se demander si Burkett respire. Mais le texte démontre le talent d’auteur du marionnettiste, toujours à propos, intelligent et d’un grand naturel. Les éclairages de Bill Williams sont du domaine architectural, construisant des atmosphères, aidant les transitions – par des textures de couleurs rappelant des vitraux –, feutrant d’une lumière douce le décor ou mettant en relief les différents personnages. La musique, jolies mélodies au piano, est signée par la compositrice Cathy Nosaty.

10 Days on Earth est un spectacle touchant, émouvant, mélancolique, tout en étant drôle et d’une simplicité désarmante.

*ces extraits sont une traduction personnelle, puisque le spectacle est présenté en anglais

09-11-2007