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Du 22 février au 15 mars 2008

Bricolages pour femme et ours polaire

Texte mise en scène et interprétation : Marie-Ève Dubé

«Je vous guiderai à travers différentes installations et vous raconterai de petites choses. Je me perdrai peut-être dans un sac de couchage. Je danserai presque a cappella. Le papier kraft me fera un vêtement acceptable. Je n’abuserai pas du masking tape, j’espère. Un globe terrestre sera pansé. Voilà ce que je sais aujourd’hui.»

Système Kangourou : compagnie de théâtre performatif, combatif et portatif née en février 2006. Cherche présence scénique ancrée dans l’action. A trois créations à son actif. La plus récente, 40% de déséquilibre, risquait de causer des étourdissements. Son terrain de jeu : le présent. Images et métaphores en construction. Personnages et histoires linéaires : absents.

Conseil scénique : Anne-Marie Guilmaine
Conception des espaces et des éclairages : Jonathan Nadeau
Direction de production : Claudine Robillard
Photographie : Anne-Marie Guilmaine

www.systemekangourou.ca

Une production de Système Kangourou

PÉRIODE PREMIÈRES
toutes les représentations

régulier 20 $
carte premières 10 $

Bain Saint-Michel
5300, rue Saint-Dominique
Téléphone: 514 274 6674

par David Lefebvre

La nouvelle création de la jeune et prometteuse compagnie de théâtre Système Kangourou, au titre tout aussi imagé qu’évocateur d’une multitude de sens, Bricolages pour femme et ours polaire, s'inscrit assurément dans la démarche du théâtre performatif interactif. Un style prisé par la compagnie, qui en est à son quatrième spectacle. La comédienne et auteure Marie-Ève Dubé, de son pas aérien et de sa voix magnifique, encore plus douce et mystérieuse grâce à la réverbération du lieu, entraîne une trentaine de spectateurs (maximum), chaque soir, dans un parcours plutôt hétéroclite, voire bancal, à travers l’inspirant Bain St-Michel.

Le spectacle, mis en scène par Anne-Marie Guilmaire, aborde plusieurs thèmes de plein fouet ou avec subtilité, tels les différents passages que nous empruntons dans une vie, la quête de soi, la peur de perdre la mémoire, la peur du poids du temps, de ce que nous sommes, de ce qui s’en vient. Mais, surtout, de tous ces petits souvenirs qui nous construisent, de ces choix que nous avons faits et que nous continuons de faire, de ces moments, de ces événements, de ces rencontres qui nous ont forgés, un assemblage pêle-mêle qui finalement forme notre identité. Le spectateur fait partie intégrante du spectacle : il participe, un tant soit peu, au bricolage de la soirée. Tout débute dans le vestiaire. Avec un certain culot admirable (et disons-le assez rigolo), Marie-Ève Dubé nous souhaite le bonsoir et fonce doucement vers nos manteaux bien cordés sur leurs supports. Elle les touche, les pèse, les enfile, fouille dans les poches et tente de décrire son propriétaire. Ensuite, direction les toilettes, pour une séance trash d’écriture sur les murs de souvenirs en désordre, de voyages, de noms d’amants. Puis les autres îlots du circuit s’enchaînent, parlant d’emballage, d’étiquetage (un véritable petit musée personnel, de vieux objets qui ont appartenu à diverses personnes), de jardinage, de découpage… On se dirige vers un atelier de menuiserie, vers des aquariums, ou encore une table à découper. Et partout, on ressent ce sentiment étrange d’être entre le point de départ et la destination, en correspondance dans un univers intime, doux et intrigant. Certains arrêts sont plus personnels, d’autres permettent à la comédienne d’endosser un personnage plus théâtral. Elle nous offre une petite scène magnifique à la table à découper, où son corps perd de sa mobilité, de son énergie, et devient aussi mou que le papier qu’elle travaillait de ses ciseaux quelques secondes auparavant, et s’effondre en répétant plusieurs formules de politesse.

Tout au long du spectacle, la notion de jeu et du mouvement est omniprésente, et importante. Le public est toujours à l’affût, se questionnant sans cesse, assumant son rôle de spectateur actif, aidant la jeune femme dans ses tableaux. Cela devient alors un véritable échange, une complicité soudaine et attendrissante entre l’artiste et les spectateurs.

Crédit photo : le studio Calypso.com

L’équipe s’est approprié le lieu avec talent, amplifiant certains sons, utilisant une lumière dispersée, individualisée, pensée pour chacun des 11 espaces aménagés.

Expérience sensorielle, déambulatoire éclectique qui interpelle directement le spectateur, le solo de Marie-Ève Dubé et d’Anne-Marie Guilmaire est un assemblage original, souvent poétique, assurément intrigant, qui aborde les souvenirs rapiécés, les pertes et les rencontres, le temps qui passe et l’adulte tout aussi imparfait que fascinant que nous sommes.

Et le petit ours polaire me direz-vous? Cherchez-le, il est bel et bien là… 

28-02-2008