Par un heureux hasard de circonstance, tous les personnages de nos contes de fée préférés sont réunis dans cette pièce de théâtre où la magie légendaire des histoires laisse plutôt place à une comédie populaire des plus dérisoires!

Ainsi, dans une petite clairière à l'orée du bois, le petit Poucet, travesti en Chaperon rouge, provoque un quiproquo monstre en se retrouvant face à face avec le personnage de Perrault. Profitant de cette mascarade, le grand méchant loup, de manière fort distinguée, tente désespérément de les déguster! Cendrillon, dramatique à souhait dans le rôle de la souillon, tente pour sa part de s'attirer les faveurs du public, en racontant à ses admirateurs, sa vie et ses grands malheurs! Peau d'Anne, dont la peau tombe en plaque, espère quant à elle trouver le prince charmant, alors que ce dernier s'amuse à jouer le "gai-luron" plutôt que l'homme vaillant! En femme fatale, mais déchue après cent ans, la Belle au bois dormant ne passe pas non plus inaperçue dans cette histoire, alors qu'elle se transforme en un personnage des plus érotiques! Et enfin, Carabosse, quelque peu fleur bleue sous son caractère orageux, complète bien cette brochette de personnages que la Fée clochette elle-même ne reconnaîtrait pas!


"Si le ridicule tuait, Perrault serait toujours vivant!"
-Michel Tremblay

LES HEROS DE MON ENFANCE de Michel Tremblay vus par LE THÉÂTRE SCHLACK! est le regroupement de 10 comédiens-chanteurs-danseurs qui bougent sur une mise en scène chorégraphique et rythmée qui ne laisse pas le temps à un clignement de l'oeil. Les acteurs chantent sur des musiques recomposées par le compositeur rock de renom Bernard Quessy (Martin Deschamps) et danse sur les pas de jeunes chorégraphes fort prométeurs.

Texte - Michel Tremblay

Mise en scène - Gilbert Trude

Avec
Julie Riel - Le Petit Chaperon Rouge
Kevin Houle - Le Petit Poucet
Jean-François Touzin - Le Grand Méchand Loup
Laurence Dauphinais - Cendrillon
Marie-Evelyne Lessard - Peau D'Ane
Isabelle Duchesneau - La Belle Au Bois Dormant
Guillaume Sauriol-Lacoste - Le Prince Charmant
Connie Vachon - La Fée Carabosse
Kristell Le Nôtre - La Fée Marraine
Gilbert Trudel - L'Auteur

Du 15 au 31 juillet à 19h30
40$ 2 adultes 2 enfants (un atelier de théâtre est donné aux enfants)

http://www.theatreschlack.com

par David Lefebvre

Vous retrouverez sous peu l'idée préconçue que vous en aviez...

Que des personnages de différents contes se réunissent dans une seule histoire pour parler d'autres choses que les morales du 18e siècle, c'est déjà arrivé et ça se reproduira sûrement encore. Michel Tremblay a écrit Les Héros de mon enfance (éditée chez Léméac) en 1976, qui a été repris depuis un peu partout à travers la Francophonie, dont en Belgique avec succès. La troupe du Théâtre Schlack! reprend cette pièce décadente au plaisir de plusieurs à la Maison de la culture Ahuntsic-Cartierville.

Neuf célébrités de contes de fée de Charles Perrault qui ont bercé notre enfance, soient Petit Poucet déguisé en Chaperon Rouge (Kevin Houle), le Petit Chaperon Rouge (Julie Riel), le loup qui tente de calmer son appétit (Jean-François Touzin), Cendrillon (Laurence Dauphinais), Peau d'Âne (Marie-Evelyne Lessard), Belle (au bois dormant) (Isabelle Duchesneau), le Prince charmant (Guillaume Sauriol-Lacoste), Carabosse (Connie Vachon) et la Fée Marraine (Kristell LeNôtre) se retrouvent dans une clairière et finissent par discuter de leurs revendications et des modifications qui ont été apportées à leurs histoires respectives. Ces retrouvailles donnent lieu à des scènes où ces héros révèlent enfin les dessous inconnus et surprenants de leur personnalité. Le Petit Poucet s’avère être un jeune détraqué ; le grand méchant loup n’a plus l’autorité nécessaire pour faire peur aux enfants ; Cendrillon et les autres princesses jouent les capricieuses bafouant ainsi leur image de princesses aseptisées ; le Prince Charmant préfère les princes et Carabosse, la méchante fée, vit un grand drame intérieur… Le chaos s’empare des personnages et dans la clairière tout tourne à l’anarchie.

Donc, rien de nouveau ici sous le soleil. On explore la face cachée de ces personnages, leurs côtés sexuels, leurs penchants bestiaux (plus de prince, il faut bien un mâle, et il semble qu'il ne reste que le loup...), leur folie... On parle aussi beaucoup du concept de la femme dans l'imaginaire de l'homme versus la réalité, l'homosexualité d'un prince qui est tanné de faire de la «fifiguration»...

J'ai assisté à la générale de la pièce. Plusieurs changements au niveau des déplacements, du jeu, des éclairages sont à prévoir mais voici mon compte rendu. Vous êtes donc prévenu du fait que quelques trucs auront changé.

Il faut avouer que la salle est très intéressante. Nous sommes confortablement assis à des tables, ce qui donne un style cabaret. Il y a même quelques fauteuils et divans à l'avant. La scène est assez haute ce qui fait que nous ne perdons aucun moment du spectacle parce que notre voisin de devant nous cache. La scénographie est aussi très inspirée. La couleur verte est prédominante, pour faire comprendre que nous sommes dans les bois, mais aucun arbre n'est visible. Les éclairages sont souvent excellents et ingénieux, le système est étonnamment sophistiqué pour une petite troupe et les effets sont fort bien réussis.

Certains moments sont très drôles mais parfois, quelques punchs ratent leur cible. Tous et toutes se débrouillent à merveille dans chacun de leur rôle: Cendrillon est magnifique même en haillons, le Petit Chaperon Rouge n'a jamais été aussi mignonne et voluptueuse même dans mes plus lointains souvenirs, Belle porte admirablement bien son nom, Peau d'Âne n'a absolument rien à envier à ces autres princesses, même si sa «peau» tombe en morceau... Le méchant loup est cabotin et pas si méchant (à croire qu'il est le seul sain d'esprit parmi ces personnages), le patient et courageux Petit Poucet explose et se demande souvent s'il devrait tuer, le Prince Charmant a perdu tout son côté macho et Carabosse, dépeinte en belle-soeur, vit son drame intérieur intensément. Chacun à droit à sa chanson (rappelons que c'est une comédie musicale) qu'ils entonnent avec une voix chaude et très juste pour la plupart d'entre eux. C'est Sylvain Lelièvre qui avait composé la trame musicale du spectacle d'origine. Ici, on a droit à une relecture d'un des musiciens de Martin Deschamps, Bernard Quessy. Certains pourraient être dérangés par le son de la musique, qui sonne assez artificiel. Mais les voix des comédiens viennent ajuster le tout d'une façon convaincante. Les chansons empruntent à plusieurs styles musicaux, comme le rock, le blues, la ballade, le country rock... «Le Trio de la colère» avec Peau d'Âne, Cendrillon et Belle (qui clament vouloir un Homme, un vrai) est assurément la meilleure de la soirée. Les chorégraphies, souvent inspirés, s'essoufflent malheureusement rapidement.

La mise en scène, malgré les propos souvent érotiques, est un peu enfantine, même si ce sont des personnages de contes pour enfants, ce qui fait que quelques scènes détonnent un peu et deviennent répétitives (le «bonjour les enfants!» est drôle trois ou quatre fois, mais c'est tout). Les entrées des personnages se font à la Star d'un soir (musique et porte tournante) et donne une touche glamour à ces personnages haut en couleur. Plusieurs ajouts au texte sont fort intéressants. À vous de découvrir lesquels, si vous avez déjà vu le spectacle.

Le propos n'a pas si mal vieilli, et la pièce n'en sera que meilleure à force de pratiquer et de jouer dans cette jolie salle du quartier Ahuntsic. Un peu longue, un resserrement serait à prévoir pour quelques scènes mais sommes toutes, si je me fie à la réaction de la salle ce soir-là, c'est une belle réussite pour cette jeune troupe qui prône le théâtre accessible à tous.