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Au retour des oies blanches dépeint une famille qui tente de sauver les apparences. Achille, le père, homme politique en disgrâce, Élisabeth, la mère qui a sombré dans l’alcool, Amélie, la grand-mère, pieuse et accommodante, Robert, le fils délinquant, Geneviève, la supposée névrosée par qui la vérité et le drame vont éclater et l’inaccessible Tom, tant haï et tant adoré à la fois.
Le noeud gordien se dénoue autour de cet absent et des deux oies blanches qu’il a offertes en guise de présent.
Un classique québécois, mais aussi un drame cornélien, qui traite de l’inceste et des relations familiales envenimées
par le silence.
Texte de
Marcel DubéMise en scène
Louise MarleauAvec
Marie-France Lambert, Jean Marchand, Catherine Renaud, Catherine Bégin, Étienne Pilon, Agathe Lanctôt, Hugo Massicotte, Marie-Claude GarneauConcepteurs
Jean Bard
Mathieu Larrivée
Maryse BienvenueDu 26 septembre au 28 octobre 2006
Billetterie : 514-844-1793
par Geneviève Germain
En reprenant la pièce Au retour des oies blanches de Marcel Dubé, Louise Marleau s’est imposé tout un défi. Non seulement devait-elle actualiser la pièce qui est fortement ancrée dans la petite bourgeoisie des années soixante, mais elle devait également s’imposer un recul face à ce classique québécois dont elle a été la première tête d’affiche. Heureusement, elle réussit le tout avec brio. Sa mise en scène de Au retour des oies blanches est à la fois solide et fascinante, soutenant efficacement d’une part le tragique du drame et, d’autre part, offrant une ambiance feutrée se rapprochant du songe.
On ne parle toutefois pas ici de rêve agréable. La pièce de Dubé est lourde de secrets que seule Geneviève, la fille aux idées troubles, saura faire éclater au grand jour. Sous forme de huis clos, elle confronte son père, Achille, homme politique déchu, ainsi que sa mère, Élizabeth, trop douce et ayant un fort penchant pour l’alcool. Cela ne se fera pas sans témoins, qui sont eux aussi souvent pris à parti. D’abord Amélie, la grand-mère résolument vouée à son fils Achille, puis Robert, le fils qui refuse de suivre les traces imposées, sans oublier la douce amie Laura, laquelle sera mêlée aux accusations contre son gré. Enfin, il y a aussi l’oncle Tom qui, comme toujours, brille par son absence mais dont la mémoire brûle toujours.
Au cœur de cette véritable tragédie familiale, Catherine Renaud s’impose fortement dans le rôle de Geneviève, illustrant ici la fougue et la passion noire qu’entretient son personnage envers l’extérieur. Bien que davantage de nuances dans son intensité auraient été souhaitables afin d’ajouter plus de subtilité à son jeu, son énergie est surprenante et captivante. À ses côtés, l’épatante Marie-France Lambert campe une Élizabeth désillusionnée et sarcastique à souhait, bien que débordante de douceur envers ses enfants. Ensemble, les huit acteurs de la pièce réussissent à bien illustrer le manque de chaleur et de sincérité de ce milieu bourgeoisement stérile où le paraître semble toujours prendre le dessus sur l’être.
Le décor, l’éclairage et la musique servent aussi à amplifier la froideur de l’atmosphère dans laquelle baignent les personnages. Sur fond de nuages gris, meublée d’accessoires noirs et blancs, ornée d’un escalier qui tourbillonne jusqu’au plafond, la scène ne peut pas être plus propice au dramatique. Ajouter à cela un éclairage dosé et une musique aux accents graves et bien frappés, et vous ne pouvez faire autrement que de frémir en songeant à ce qui pourrait se dérouler. La métaphorique pièce musicale de Claude Dubois, Les criardes, ajoute également au ton de la pièce en ponctuant son début et sa fin.
La pièce de Dubé pèse parfois par l’accumulation de révélations lourdes, frôlant l’invraisemblable. Malgré cela, Au retour des oies blanches réussit à captiver du début à la fin et même à émouvoir à certains moments grâce à une mise en scène minutieuse et à une distribution efficace.
01-10-2006