Comment un simple pari peut-il bouleverser une existence ?
Prenez un linguiste de réputation mondiale, irascible et têtu.
Ajoutez une bouquetière qui baragouine le jargon de la rue.
Arrosez de trivialité et d'effronterie.
Mélangez-les de manière à transformer la bouquetière en dame de la haute bourgeoisie.
Délayez le tout avec des relations humaines mouvementées.
Saupoudrez d'un zeste de chansons et de gaîté.
Vous obtenez un cocktail explosif sur scène à savourer sans retenue.

Une comédie musicale qui fait la caricature féroce des conventions et qui prouve à quel point les différences de classe sont plus sociales que psychologiques.

Adapté de la pièce de
George Bernard Shaw
et du film Pygmalion de
Gabrial Pascal

Musique
Frederick Loewe

Paroles et livret
Alan Jay Lerner

Traduction et adaptation
Yves Morin

Mise en scène
Denise Filiatrault

Costumes
François Barbeau

Chorégraphie
Chantal Dauphinais

Avec
Catherine Senart • Benoit Gouin • Pierre Collin • Jacques Girard • Lise Roy • Dominic Lorange • Michelle Labonte • Arlette Sanders • Joël Legendre • Chantal Dauphinais • Emily Begin • Christian Vezina • Nathalie-Eve Roy • Steve Hanley • Richard Belhumeur

Du 16 mai au 10 juin 2006
Salle Pierre-Mercure du 27 juin au 8 juillet et du 11 au 22 juillet
Supplémentaires du 25 au 29 juillet 2006
Billetterie : (514) 844-1793

 

En tournée dès septembre 2006

1er et 2 septembre Ste-Thérèse
8-9-10 et 11 septembre à Ste-Foy (2 représentations le 10 septembre)
15-16 et 17 septembre à Laval (2 représentations le 17 septembre)
19 et 20 septembre à L’Assomption
22 septembre à Valleyfield
26 et 27 septembre à Sherbrooke
29 septembre à Joliette
4 et 5 octobre à Gatineau
17 et 18 octobre à Trois-Rivières
20-21 et 22 octobre à Saint-Jean-sur-Richelieu
3-4 et 5 novembre à Saint-Hyacinthe
7 et 8 novembre à Terrebonne

 

 

par David Lefebvre

La plaine madrilène ne plaît pas qu'à la reine...

Une jeune et pauvre vendeuse de fleurs, Eliza Doolittle, qui habite les bas fonds de Londres du début du siècle, décide de s’adresser à un éminent linguiste et professeur de phonétique, Henry Higgins, pour apprendre à bien parler sa langue et ainsi lui permettre d'accéder à un métier plus noble et plus rentable. Ce professeur, imbu, misogyne, têtu, parie avec un collègue, le Colonel Pickering, qu’il fera de cette fille aux manières vulgaires une lady, une duchesse, et ce en moins de six mois. Après des exercices ardus, elle finit par assimiler les leçons et, fier de lui, le professeur introduit la jeune fille parmi l'aristocratie royale pour le test ultime. Cette description vous rappelle quelque chose ?

Le spectacle dit s'inspirer de la pièce de George Bernard Shaw (qui a été montée en 1999 au Rideau Vert) et du film de Gabrial Pascal, tous les deux intitulés Pygmalion. Il reste néanmoins que la plupart d’entre nous avons comme référence le film de George Cukor, My Fair Lady, mettant en vedette la magnifique Audrey Hepburn, long métrage qui s'inspirait de la comédie musicale de Broadway (une adaptation de la pièce de Shaw par Alan Jay Lerner et Frederick Loewe). Même si le film de Cukor n'est mentionné qu'une fois dans le programme, nous y retrouvons quand même l'essence de celui-ci dans les déplacements, la scénographie (l'escalier en colimaçon, la porte d'entrée...) et les costumes - surtout les chapeaux. On se remémore alors aisément les magnifiques et accrocheuses mélodies de Loewe, l’accent anglais particulier d’Hepburn ou de la traduction française criarde… qu'heureusement la pièce nous fait oublier dès les premiers mots. Cela fait plusieurs années que Denise Filiatrault tempêtait pour adapter ce spectacle musical à grand déploiement (malgré la petitesse de la scène du Rideau Vert – c’est à se demander parfois où ils prennent la place pour tous les éléments de décor, élaborés par Raymond Marius Boucher). Le budget y était enfin, le timing aussi : showtime !

Crédit photos : Suzanne O'Neill

La traduction et l’adaptation ont été confiées à Yves Morin. Comme la pièce est une critique sociale sur le langage et se repose sur la phonétique, M. Morin n’a pas eu d’autres choix que d’insister sur le joual versus une prononciation dite « français international » pour démontrer les différents rangs sociaux et le travail à accomplir par Henry Higgins, même si l’action se déroule à Londres. Il nous faut donc, dès le départ, nous habituer à l’accent qui roule et aux diphtongues tortueuses inspirées de différentes régions du Québec. Mais une fois l’oreille familiarisée, le charme opère totalement. Catherine Sénart interprète une très charmante Eliza Doolittle, sa métamorphose physique est marquante. Benoît Gouin semble s'amuser comme un fou dans la peau du détestable Higgins à la "suffisance déconcertante" qui, dans le rôle du maître face à son élève, est plus sensible aux charmes de la jeune femme qu'il n'y paraît. Les différentes scènes du spectacle s'enchaînent rapidement et avec souplesse, les voix sont puissantes et harmonieuses et la mise en scène a profité et intensifié les moments comiques du scénario. Tous les comédiens brûlent littéralement les planches : notons le jeu toujours aussi impeccable de Pierre Collin en Colonel Pickering, celui de Lise Roy dans le rôle de l'aristocrate Mrs. Higgins (la mère d'Henry), Dominique Loranger dans celui de Freddy (un habitué des comédies musicales, à la voix impressionnante), Michelle Labonté en Mrs. Pierce, Jacques Girard en Alfred P. Doolittle, puis Arlette Sanders, Joël Legendre, Chantal Dauphinais (qui assume aussi les chorégraphies), Émily Bégin, Christian Vézina, Nathalie-Ève Roy, Steve Hanley et Richard Belhumeur qui interprètent plusieurs personnages lors du spectacle.

Par contre, quelques bémols : les scènes du père Doolitle cabotinent légèrement, versant plutôt dans le burlesque ; la bande sonore a été composé au synthétiseur et cela se sent tout de suite. Les costumes des hommes sont découpés avec soin mais ceux des femmes sont beaucoup plus efficaces de loin que de près : par exemple, la robe de bal d'Eliza brille de mille feux mais aurait pu découper davantage la silhouette avantageuse de l'actrice. Fait intéressant, les couleurs des robes sont souvent contradictoires avec le film de Cukor : lors de la course des chevaux, c'est Eliza qui est en blanc et son manteau de bal est d'un bleu magnifique au lieu d'un rouge éclatant. Mais soyez sans crainte : tout ceci n'enlève rien à la grande qualité du spectacle et au divertissement qu'il procure tout au long de la soirée.

Crédit photos : Suzanne O'Neill

Avec ce tour de force, le professeur Higgins nous démontre que la différence de classe est plus sociale que n'importe quoi d'autres et que l'idéal et l'égal que l'on cherche se trouve parfois à un endroit improbable. Spectacle musical accrocheur, entraînant, il est impossible de sortir de la salle sans fredonner l'une des chansons. "Tu vas voir Henry Higgins, tu vas voir..."

20-05-2006