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Du 1er au 13 mai 2008

Assoiffés (à partir de 14 ans)

Texte de Wajdi Mouawad
Mise en scène et collaboration au texte Benoît Vermeulen
Avec Simon Boudreault, Sharon Ibgui et Benoit Landry

Boon, un anthropologue judiciaire, tente d'élucider la découverte de deux cadavres repêchés au fond du fleuve. Cet événement inusité bouleverse ses convictions et sa perception de la réalité. Pour mieux comprendre, il replonge dans son adolescence d'où ressurgit soudain le fantôme d'un rêve abandonné... Refont alors surface les histoires de deux autres adolescents, Murdoch et Norvège. En se réveillant un matin, le premier n'a pas l'impression d'être tout à fait lui-même : sa tête est pleine de questions importantes et il ne peut plus s'arrêter de parler. À l'inverse, il y a déjà trois jours que Norvège s'est enfermée dans un mutisme absolu...

La plus récente création du Théâtre Le Clou revendique une parole engagée qui témoigne de l'urgence de dire, de l'urgence de vivre et de toute la fougue de l'adolescence. Elle proclame haut et fort qu'il faut triompher de l'inertie et préserver en nous la beauté, notre soif d'amour et de sens.

Assistance mise en scène Catherine Vidal
Scénographie et costumes Raymond Marius Boucher
Environnement vidéo Martin Lemieux
Environnement vidéo Nicolas Basque
Éclairages Mathieu Marc

Une création du Théâtre Le Clou

Maison Théâtre
245, rue Ontario Est
Billetterie :
514-288-7211

 

par David Lefebvre

Boon, un anthropologue judiciaire, est appelé à enquêter sur une découverte mystérieuse : un couple enlacé, dont les chairs se sont soudées, vient d’être repêché du fleuve. L’événement bouleverse l’homme qui doit remonter dans son passé pour comprendre. Surgissent alors des souvenirs lointains… Un matin moche de février de l’année 1991, Murdoch se lève et ne se sent plus lui-même. Dès son réveil, un flot incessant de paroles jaillit de tout son corps et son âme. Chaque mot prend position, chaque phrase remet en question tout ce qui l’entoure, incluant sa propre existence et sa signification. Il veut comprendre, mais surtout ne plus être traité comme un enfant qui gobe tout ce qu’on lui dit. Ailleurs, le jeune Boon écrit le devoir de son frère aîné sur le thème de la beauté. Il invente Norvège, une adolescente qui s’enferme dans sa chambre durant plusieurs jours, et dans un mutisme qui inquiète au plus haut point ses parents.

Le texte imagé, révolté, engagé de Wajdi Mouawad donne une voix juste et ô combien importante aux interrogations des adolescents, chose rare au théâtre. Il est plus qu’aisé d’imaginer à quel point les mots de l’auteur peuvent réellement les toucher, éveiller même des réflexions, utilisant une langue appropriée (incluant sacres à tout vent, mais évitant les expressions de la rue), et une rythmique qui nous atteint, presque perturbatrice. Les idées provoquent, et ouvrent la porte à notre rapport au monde qui nous entoure et à notre place dans ce monde. Les personnages de Murdoch, brillamment interprété par Benoît Landry, et de Boon (excellent Simon Boudreault, qui s’en donne à cœur joie) sont savoureux. Sharon Ibgui complète bien la distribution, jouant, entre autres, le rôle de Norvège et de sa mère. Benoît Vermeulen a su donner la dose parfaite d’énergie et d’imagination au spectacle, usant de concepts aussi modernes que la vidéo, la musique électro en direct, que classiques (quoiqu’altéré) tels le masque (qui défigurent les personnages) et la danse. Assoiffés est un excellent exemple que le théâtre peut s’ouvrir à un public jugé difficile d’approche, que cet art peut surprendre, stimuler, passionner. Construit comme un puzzle, nous avons accès à des pièces pour compléter le portrait au fur et à mesure que le spectacle avance. Le décor juxtapose plusieurs styles : alors qu’au milieu de la scène, une énorme porte à la japonaise permet des projections, d’autres éléments rappellent l’aborigène, utilisant des bouts de branches et des têtes de squelettes.

Pièce sur les rapports humains, familiaux et la beauté que l’on doit à tout pris préserver, elle est aussi contre l’immuabilité, l’inertie. Assoiffés, neuvième création du Théâtre Le Clou, en tournée depuis 2005, est une parole essentielle sur cette soif insatiable de vivre, d’amour et de sens, que chaque être humain ressent, même si l’adulte, parfois, l’oublie et l’enterre au fond d’une sécurité matérielle et d’une inertie futile et absurde qui l’empêche de sombrer dans une inquiétude lancinante.   

04-05-2008