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Du 18 septembre au 6 octobre 2012, 20h
La couleur du grisLa couleur du gris
Maîtrise d'oeuvre de Anne Sabourin en collaboration avec Christian LeBlanc
Avec Gaétan Nadeau, Marie Lefebvre, Audrey Bergeron, Xavier Malo, Maxime Paradis

La couleur du gris c'est l'histoire de bêtes étranges qui se hasardent, les mains vides, dans un monde bercé de cendres colorées, entre le réel et le fantasme, l’obsession et la liberté charnelle. Écrasées d'espoirs défaits, gorgées de désirs lancinants, elles traînent le cri du monde derrière eux. Ce sont des anges goudronneux, des animaux fabuleux. Avares de mots, sonores de chair et de solitude, ils dérangent. En quête ou en fuite d'identité, ils se métamorphosent et se cherchent sous le joug de la société. Parfois, ils resplendissent dans la poussière et s'envolent. Ils naissent une seconde fois et esquissent le monde autrement.

À l’heure où l’individualisme et l’intimidation donnent aux sociétés des airs de bestiaire darwiniste, l’individu laid et ostracisé doit faire appel à une bonne dose de résilience pour légitimer ses désirs, voire sa propre identité. Il n’a que faire de péroraisons moralisantes et des leçons de vies déjà bien accomplies. Dans un esprit libertaire, le tandem Sabourin-LeBlanc pratique le théâtre à son corps défendant; il s’inspire notamment de l’imagerie nerveuse de la BD et du genre littéraire de la nouvelle. Droit au but !


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Scénographie et lumières Jean-François Labbé
Costumes Mylène Chabrol
Environnement sonore Éric Forget

Régulier: 34$
Moins de 30 ans: 29$
Prévente: 24$, offre valable jusqu'au 18 septembre pour les représentations des 19, 20, 21 et 22 septembre.

Vendredi 21 septembre à 18h30, suivi d'une table ronde
Jeudi 27 septembre à 19h, suivi d'une discussion avec l'équipe de création

Création Omnibus le corps du théâtre


Espace Libre
1945, rue Fullum
Billetterie : 514-521-4191

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 Critique
Critique

par Isabelle Girouard


Crédit photo : Catherine Asselin-Boulanger

La saison débute en force à l’Espace Libre avec la toute nouvelle présentation d’Omnibus : La couleur du gris. Cette maîtrise d’œuvre d’Anne Sabourin, en collaboration avec Christian Leblanc, est la 61e production de la compagnie de création, que l’on connait comme une des pionnières du théâtre gestuel.  Les auteurs n’en sont d’ailleurs pas à leurs premiers ébats, ayant collaboré à d’autres œuvres telles que Jabbarnack (2012) ou Le Vestibule (réalisée dans le cadre des Rencontres internationales du Mime de Montréal en 2011). 

D’une durée d’environ 1h15, La couleur du gris nous plonge dans l’univers d’une étrange communauté de laissés pour contre, de vagabonds et de gueux s’étant liés les uns aux autres.  Ils ont établi leur quartier dans un lieu sordide, un bas-fond de la ville empli de coins sombres.  Le spectateur est libre d’observer ces biscornus en pleine action, c’est-à-dire en train de s’affairer du mieux qu’ils peuvent à occuper l’espace et le temps qui leur est alloué sur terre. Cette mise en relation entre les personnages est forte intéressante : ces derniers ne semblent pouvoir exister nulle part ailleurs que dans cet univers déjanté. 

On devinera qu’il ne se passe pas grand-chose, sinon qu’un personnage se détache de cette bande pour la moins originale : un homme ivrogne et sans âge (incarné par Gaétan Nadeau), souffre-douleur, héros ou simplement témoin de pas grand-chose.  Il n’y a pas réellement de commencement ni de fin dans La couleur du gris, mais plutôt un courant incessant d’actions sans aboutissement.  Heureusement, la lumière n’est pas complètement absente du tableau : même si la blague est de mauvais goût, les personnages semblent drôlement s’amuser à certains moments (et, faut-il avouer, le spectateur aussi).

L’aspect visuel - tristes tons de brun et de gris, vêtements et bouteilles jonchant le sol - crée une atmosphère glauque très appropriée.  La composition des personnages semble issue d’un minutieux travail, si bien que l’interprétation est d’une authenticité remarquable. Certains d’entre eux sont plus intéressants que d’autres et attirent particulièrement l’œil, sans que toutefois cela nuise à l’unité générale du spectacle. Il n’y a à peu près pas de dialogue, à l’instar des autres spectacles d’Omnibus, mis à part de nombreuses interjections et quelques monologues, ces derniers venant principalement du personnage de l’ivrogne. La parole semble toutefois s’accorder difficilement avec l’ensemble en début de spectacle, mais, heureusement, ce problème se résout en cours de route.   

Il faudra sans doute un peu de temps au profane afin d’apprivoiser le langage particulier de la culture du geste au théâtre.  Expérimental en lui-même, empruntant à l’art de la danse et de la performance, il renvoie surtout à une poésie du corps qui demande une ouverture toute spéciale de la part du spectateur.  Celui qui se laisse emporter par cet univers éclectique fera assurément un bon voyage.

La Couleur du gris est un spectacle somme toute très réussi qui ne laissera personne sur sa faim.

20-09-2012