Production Nouveau Théâtre Expérimental
Conception Patrick Drolet et Olivier Kemeid

(extraits du communiqué de l'Espace Libre)
Avec Rabelais, nous vous proposaillons de la bonne y doulce pitance, qui pourroit avoir pour nom théâtre, mais que préférons nommer sous désignance de « bonne chair festive ». Forme du spectacle seroit ensemble de tableaux sur thèmes précis (de l'hygiène corporelle, de la digestion, de la religion, du sexe), avec traitement d'illustre corsaire de la langue que Rabelais futoit. Les dits thèmes seront exploités autant que les acteurs, dans des tableaux parfois drôles y excellents, parfois ratés, dépendant de l'écriture y de la verve des onanistes, verve qu'ils ont en général petite.

Mesdames, Messieurs, damoizelles aux cuisses fraisches et aux tétins mollets, beuveurs tres illustres et vous là-bas dans le noir, Verolez tres precieux et aultres stratèges de commandite, Au commencement n’étoit le Verbe, mais le Cri. Puis vint le Festin.

RABELAIS de PATRICK DROLET et OLIVIER KEMEID
DU 3 AU 14 MAI 2005
du mardi au samedi à 20h30
une production du
NOUVEAU
THÉÂTRE
EXPÉRIMENTAL
www.nte.qc.ca

Or doncques estes-vous conviés à cette grande Feste de la mangeaille, où vous pourrez avecque nous jouer du serrecroupière, frotter votre lard, vous faire rataconiculer, recevoir la saccade, jouer des manequins à basses marches, manger en desgainant, desrober votre sarbacane, envoeyer votre happelourde dans la potée de chou, mettre le blanc à la butte, bassiner anglicquement, fournir du foin à l’embouchement des chausses-trappes, esmoucheter vos haires, jouer à la Vergette, bransler votre épée, présenter votre petite patène aux fidèles, mettre les vieilles en ruyt et en chaleur, vous abandonner à vos taboureurs, aller la guille à neuf au premier trou de l’an, lescher la coquecigrue à ventre desboutonné, donner la bougette, jouer du luc, tirer au papeguay avecque la vistempenarde, esmoucher avecque votre quehue que vous avez grosse à l’advenant, fretinfretailler un bon coup, avoir au cul passion assez, présenter votre matrice gloute et tenace, vendre du cresson, racler le verdet, entamer par le bas, desrouiller votre bracquemard, exercer le penard, faire la barbe au maujoinct, beurrer, venir au dessus d’une gente Dame de la ville, couvrir une femme de votre race, dire « voici Maistre Jean Jeudy qui vous sonnerait une antiquaille que vous sentirez jusques à la moelle des os », biscoteroyer une grosse, fanfrelucher, vider l’olif de la caleil, belinoyer une paillarde, bragmarder des putains, être trouvés en brimbalant, bander votre arbalète aux reins, bubaialloyer comme vieux mulletz, crier « voicy Maistre Jan Chouart qui demande logis », jocqueter, besoingnoyer comme bonnes âmes, tabourer en forme commune, embourrer, dresser l’aiguille jusques sur les diz ou unze heures, manger des bezagues à la moustarde, sugcer la sustantificque mouelle.

Une conception de
Patrick Drolet
et
Olivier Kemeid
Avec
Olivier Aubin, Marie-Josée Bastien, Patrick Drolet, Olivier Kemeid, Alexis Martin et Simon Rousseau
Consultants
Stéphanie Capistran-Lalonde et Romain Fabre
Régisseur
Colette Drouin

Du 3 au 14 mai 2005
à ESPACE LIBRE
1945 Fullum, métro Frontenac
Entrée 21$
Pré-vente 30$ la paire
Réservations: (514) 521-4191

 

par David Lefebvre

Tout le monde à table!

Oui, tout le monde à table, le festin est servi. Le duo Patrick Drolet/Olivier Kemeid nous revient avec un spectacle festif, amusant et un tantinet ironique et cynique.

Au Moyen-Âge (comprenez ici que les vêtements, l'accent et le langage vieux français sont à l'honneur), la femme d'un jeune couple royal (Simon Rousseau et Marie-Josée Bastien) accouche d'un petit prince aux flatulences déjà reconnues. Déjà le roi ne veut que le meilleur pour son fils, prénommé Québéku-a, louant les services d'un maître, Panurge (Alexis Martin), pour la bonne "esducâtion" de son rejeton, autant du côté bouffe, femmes, science, philosophie, cartographie... Séparée en trois actes (1. l'enfance - le corps passif, 2. l'adolescence - le corps actif, 3. l'adulte - le corps débauché), la pièce nous sert une recette hétérogène ou se mélange des scènes drôles aux pointes très modernes, des scènes plus absurdes, de la vidéo... Bref la table est pleine. On y voit des gens très connus, comme Flaubert et Nietsche, on y parle de Martha Stewart, de sexe et d'amour, de bouffe, on s'amuse au dépend de la danse moderne au théâtre (un moment, je dois l'avouer, que j'ai trouvé hilarant) et tous ces gens débarqueront avec Cartier en Amérique après un léger trip de dope : on y voit alors un vidéo sur la musique de Joe Dassin, L'Amérique... Bref on passe à travers la vie de ce jeune Québéku-a.

Quel est le rapport avec Rabelais me direz-vous? Il y en a tant et très peu en même temps. Nenni, ce n'est pas une pièce historique sur ce grand humaniste, mais le ton de la pièce fait référence à la libre pensée qu'il prônait et à l'humour que celui-ci aurait eu. Il y a ce langage, copié du vieux français, qui le rejoint. Mais attention, restez bien concentré parce que plusieurs blagues s'y cachent et beaucoup de mots sont déformés. Certains personnages sortent de l'imaginaire de Rabelais, comme Panurge (Les moutons de Panurge, Pantagruel: Le Quart Livre, chapitre VIII) ou Xenomanes. Rabelais a aussi inventé des mots qui se retrouvent dans le texte comme éjaculation, exotique...

Véritable banquet, ralenti par certaines longueurs qui vont se corriger avec le temps mais contenant certains moments très drôles, Rabelais est un spectacle "presque" irrévérencieux avec ses blagues de flatulences répétées, où le corps, dans son entière présence, est un des grands sujets du spectacle, c'est même une hymne à la vie. Et point de tristesse dans les parages, même si la mort y figure...

06/05/2005