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Quartett
Du 19 mars au 6 avril 2019
mardis et mercredis 19h, jeudis et vendredis 19h30, samedis 15h30
Supplémentaires le samedi 30 mars à 19 h 30 et le dimanche 31 mars à 15 h 30

Personnages immoraux inspirés du roman Les Liaisons dangereuses de Laclos, la marquise de Merteuil et le vicomte de Valmont, que l’on imagine être les derniers humains sur Terre, alimentent un rituel du désir aussi destructeur que charnel. Ensemble, ces libertins rejoueront l’effondrement de leurs anciennes victimes dans une constante quête de jouissance.

À l’ère du selfie, où le regard est orchestré jusque dans nos vies intimes et le narcissisme socialement accepté, cette pièce propose une réflexion sur l’entrelacement du désir et du jeu : jusqu’où nous mettons-nous en scène afin de vivre nos sexualités, de quoi sont faites nos chorégraphies du désir?

Après avoir complété un baccalauréat en Études théâtrales à l’Université du Québec à Montréal (où elle s’intéresse aux œuvres hybrides contemporaines), Solène Paré entreprend des études en mise en scène à l’École Nationale de Théâtre du Canada afin d’expérimenter les chocs que peuvent provoquer les arts plastiques au théâtre. Tout au long de son parcours, elle touche autant à l’écriture scénique (LA CLOCHE DE VERRE d’après Sylvia Plath au Prospero ; U-V à l’École Nationale de théâtre) qu’à la mise en scène de textes contemporains (QUARTETT de Heiner Müller à l’École Nationale de théâtre ; VISAGE DE FEU de Marius Von Mayenburg à l’UQAM). Elle s’intéresse aux procédés d’écriture scénique à partir de matériaux non dramatiques et au courant post-dramatique. Les gender studies nourrissent sa démarche de metteuse en scène.


Texte Heiner Müller
Traduction Jean Jourdheuil et Béatrice Perregaux
Mise en scène Solène Paré
Avec Adrien Bletton et Ève Pressault


Crédits supplémentaires et autres informations

Décor et accessoires : Elen Ewing
Lumières : Martin Sirois
Costumes : Lari Jalbert
Conception et intégration vidéo : Antonin Gougeon
Dramaturgie * : Alice Ronfard
Photo Anouk Lessard | Conception lg2

* Solène Paré tient à remercier Stéphane Lépine pour son atelier d’analyse de texte.

Durée 50 minutes

Rencontre avec le public
mardi 26 mars après la rencontre

Tarif
Régulier : 37$
65 ans et + : 30$
30 ans et - : 28$
Les tarifs comprennent les taxes ; les tarifs ne s'appliquent pas aux représentations supplémentaires. Ajouter des frais d'envoi de 2,50$ si vous voulez recevoir vos billets par la poste.

Production Fantôme, compagnie de création, avec la collaboration d’ESPACE GO


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Critique disponible
            
Critique





Crédit photos : Yanick Macdonald

Quartett consiste en une adaptation libre des Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos par le dramaturge allemand Heiner Müller. La pièce a marqué les esprits grâce à la mise en scène de Brigitte Haentjens (1996) et à celle, plus récente, de Florent Siaud. Pour le premier spectacle de sa résidence au Théâtre Espace GO, la metteure en scène Solène Paré présente sa vision personnelle et originale de l’affrontement entre la marquise de Merteuil et du vicomte de Valmont dans le contexte engendré par le mouvement #MoiAussi.

Si les attentes étaient grandes envers la plus jeune metteure en scène à avoir foulé les planches du théâtre féministe de Montréal, Solène Paré peut se féliciter de présenter un spectacle réussi autant d’un point de vue esthétique que dans l’intelligibilité qu’elle accorde au texte ouvertement complexe de Müller. Voilà plus de quatre ans que la metteure en scène s’intéresse à Quartett, puisque c’est la pièce qu’elle avait montée au terme de sa formation à l’École nationale de théâtre, en 2015. L’agencement de tous les éléments semble donc avoir été mûrement réfléchi pour créer un spectacle d’une heure où la tension entre les deux personnages fluctue de manière fascinante.

Le Quartett de Solène Paré possède toutes les qualités d’un spectacle féministe intelligent et critique de la société actuelle.

Ève Pressault et Adrien Bletton rendent compte avec une grande justesse de la relation de pouvoir malsaine et vicieuse de la marquise et du vicomte. Une tension sexuelle perdure tout au long de la pièce où la violence et l’humiliation ont la part belle. Tour à tour, les deux personnages s’adonnent à un jeu de rôles où ils prêtent leurs traits à d’anciennes victimes de leur séduction toxique : Merteuil interprète le vicomte pendant que celui-ci incarne madame de Tourvel ; puis, Valmont reprend son rôle alors que la marquise revêt celui de Cécile de Volanges. C’est notamment par l’exacerbation de cette mécanique pernicieuse que passe l’un des principaux questionnements féministes de Solène Paré : « pourquoi [la marquise] alimente-t-elle autant une culture qui ne peut que la détruire ? »

La scénographie épurée d’Elen Ewig rend compte de la didascalie initiale donnée par Müller, soit « un salon d'avant la Révolution française, un bunker d'après la Troisième Guerre mondiale ». Une simple trappe dans le plancher permet l’entrée de la Merteuil et la sortie de Valmont, mais également certaines scènes fortes comme celle où le vicomte baise avec la mort. Une table tournante, un disque et un verre contenant du poison trônent à l’avant-scène. La marquise apparaît en déshabillé, avec bas de nylon et talons hauts. Le vicomte porte un costume de cuir et un manteau de fourrure qu’il échange avec sa partenaire au gré de leurs élucubrations.

La vidéo, conçue par Antonin Gougeon et le Hub Studio, met également en relief le narcissisme des personnages et leur besoin de sentir le regard constamment braqué sur eux. Un rideau de tulle placé au-devant de la scène sert de surface de projections en noir et blanc de gros plans déformés de la marquise et du vicomte, en plus de créer une séparation qui préserve une apparence d’intimité pour les interprètes. Les propos des deux personnages portent en grande partie sur le vieillissement, la perte de désir et la décrépitude du corps (de la femme). À l’ère des réseaux sociaux, ces questionnements acquièrent une signification nouvelle, tout comme le choix de mise en scène de faire jouer la marquise et le vicomte par des comédiens dans la trentaine. Paré fait ainsi écho à l’obsession de la jeunesse et à la peur de voir apparaître les marques du temps, même chez les personnes encore à la fleur de l’âge.

Le Quartett de Solène Paré possède toutes les qualités d’un spectacle féministe intelligent et critique de la société actuelle.

24-03-2019
 
Espace Go, salle 2
4890, boul. Saint-Laurent
Billetterie : 514-845-4890

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