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Du 18 février au 12 mars 2016, les mardis à 19 h, du mercredi au vendredi à 20 h et les samedis à 16 h
Saint-André-de-l'Épouvante
LIRE L'ENTREVUE AVEC PATRICE DUBOIS
Texte Samuel Archibald
Mise en scène Patrice Dubois
Avec Miro Lacasse, André Lacoste, Dominique Quesnel, Dany Michaud, Bruno Paradis

Ça fait deux jours qu’il mouille et les bêtes s’ébrouent comme à l’approche des grands cataclysmes. À Saint-André, des gens attendent au bar-salon Le Cristal que le temps se répare un peu. Au début, il n’y a que Loulou, la barmaid primordiale. Puis, arrive Rénald, qui apparaît agité et très nerveux comme un enfant apeuré. Il y a un silence. Avec grand fracas entrent Martial, Mario et l’Homme en noir, tous les trois détrempés. Prisonniers de la tempête, ils vont tour à tour raconter leur histoire et se confier leur peur la plus étrange, jusqu’à ce que chacun comprenne qu’il a un rôle à jouer dans une histoire plus terrible encore et qui est toujours en train de s’écrire.

Reconnu pour ses qualités de dialoguiste et pour la force de ses récits, Samuel Archibald, auteur du recueil Arvida (Le Quartanier) et du formidable essai Le Sel de la terre : confessions d’un enfant de la classe moyenne (Atelier 10/Documents), plonge pour la première fois dans l’écriture dramaturgique. Commandée et coproduite par le Théâtre PÀP et ses partenaires, cette nouvelle œuvre le fera passer de la page à la scène, tout en continuant d’explorer ses obsessions pour le séduisant occulte, la dimension rêvée de la vie et le dur constat que d’avoir à vivre éveillé.

Patrice Dubois s’entoure ici d’une équipe fort inspirante de collaborateurs saguenéens, gaspésiens et montréalais. Ensemble, ils parcourront la géographie de ce récit onirique qui invite à entrer dans le côté obscur des choses. En effet, pour toute réaliste qu’elle puisse paraître aux premiers abords, l’œuvre invite au déploiement de l’imaginaire et honore le passage du temps sur nos mémoires, individuelles et collectives.


Section vidéo


Assistance à la mise en scène : Cynthia Bouchard-Gosselin
Scénographie : Pierre-Etienne Locas
Costumes : Mylène Leboeuf-Gagné
Éclairages : Erwann Bernard
Musique : Guillaume Thibert
Direction technique : Simon Cloutier
Direction de production : Catherine Desjardins-Jolin

Durée à déterminer

Rencontre avec le public
Vendredi 19 février 2016, après le spectacle

Tarif
Général 37$
65 ans et + 30$
30 ans et - 28$
Forfaits disponibles pour plus d'un spectacle

Une coproduction Théâtre PÀP + Théâtre À tour de rôle + Théâtre La Rubrique


Espace Go
4890, boul. Saint-Laurent
Billetterie : 514-845-4890

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Critique

Un coup de tonnerre, la foudre, le son de la pluie qui tambourine sur la vitre. Panne de courant : le grand néon rouge qui affiche “BAR” s’éteint. Et les voilà qui se retrouvent à cinq, enfermés dans ce bar du petit village du Saguenay, éclairés par une lampe à pétrole dans un huis clos fantasmagorique. Tous les éléments du film d’horreur sont là. Les personnages incarnent les figures archétypales du genre : le policier rassurant et plein de bon sens, la serveuse maternelle, le fou du village, le gentil veuf…


Crédit photo : Gunther Gamper

Et puis il y a l’étranger de passage, au prénom changeant. Le comédien Miro Lacasse a des allures burtonniennes avec son chapeau et son long manteau noir, et il campe à merveille ce grand personnage inquiétant. En attendant que la pluie cesse et que la dépanneuse vienne le chercher, il discute avec les villageois, et, tour à tour, chacun se met à raconter une histoire - d’horreur, bien sûr : une légende du village, une histoire vécue personnellement, une anecdote qui met le quotidien à la croisée du monde de l’étrange.

À travers ces légendes, mais aussi dans les interactions des personnages, on plonge dans le folklore de village, dans l’ambiance de la vie communautaire des régions reculées, où les familles se connaissent si bien, mais côtoient aussi tabous et mystères, où les non-dits et les secrets se transmettent de génération en génération. Ce portrait de village est taillé dans le cliché, mais apparaît en même temps comme tellement vrai, et chacun s’y retrouve. On a d’ailleurs appris, lors de la discussion avec l’équipe après le spectacle, que la plupart des histoires de la pièce étaient inspirées de vraies légendes peu ou pas romancées. De quoi donner la chair de poule...

Les comédiens sont très justes sur le texte de Samuel Archibald. Le jeune auteur a habilement construit ce huis clos à l’américaine digne d’un Stephen King, mais campé dans un village saguenéen qui fleure le Québec à plein nez. La tension monte au fil de la pièce et des histoires : même si l’on connaît les rouages du genre, on ne peut s’empêcher de frissonner quand le tonnerre gronde, quand la lumière flashe, quand un cri déchire la nuit. On s’attend presque à voir une main ensanglantée apparaître à la vitre dégoulinante de pluie.


Crédit photo : Marianne Desrosiers

À la mise en scène, Patrice Dubois, directeur artistique du théâtre PÀP, a su jouer comme il faut avec les codes du film d’horreur sans en mettre trop : tables en bois, jeux de lumière en clair-obscur, temps de pause qui rendent la tension encore plus palpable... Pas de musique, sinon un bruit sourd qui vient parfois alourdir le silence, des jeux stroboscopiques pour figurer l’éclair et transformer momentanément les personnages en ombres terrifiantes. Bref, une mise en scène qui recrée l’ambiance lourde d’un film d’horreur au cinéma, sans la facilité de jouer avec les plans de caméra.

Puis, le malaise monte vraiment quand le fou raconte son rêve récurrent : il est dans un théâtre où les gens le regardent, et qui prend feu - il faut dire que notre arrivée à l’Espace Go a été animée par la présence massive de pompiers dans la rue, juste devant le théâtre. Le comédien évoque les visages des spectateurs qui le regardent… Et si on était, nous aussi, dans l’histoire ? Car si la pièce est dans le cliché parfois attendu du film d’horreur, comme on a pu le lire dans certaines critiques, elle renouvelle le genre dans la mesure où elle se joue sur scène, avec nous. Plus d’écran de télé qui nous protège de l’étrangeté : on y est. Ça fait peur… - et on se rend compte qu’on adore ça.

20-02-2016