Supplémentaire le vendredi 22 octobre 2004 à 20 heures
En reprise les 26-27-28 mai 2005 au Théâtre Olympia (1004, rue Ste-Catherine Est - 286-7884)
L’histoire se déroule au début du dix-septième siècle, en pleine inquisition espagnole. Cervantes, l’auteur de Don Quichotte, est arrêté et jeté en prison avec son valet. Ses compagnons de cellule décident de faire son procès. Pour se justifier, Cervantes entreprend de leur faire vivre les aventures de son Don Quichotte de la Mancha, le chevalier à la triste figure ou l’idéaliste au grand coeur.
Neuf comédiens chanteurs et trois musiciens incarnent les personnages de cette célèbre comédie musicale d’après l’adaptation qu’en fit Jacques Brel en 1968. L’adaptation musicale du mythe de Don Quichotte prend sa source dans la vie de l’auteur et propose un regard différent sur le mariage du chant et du théâtre.
Ce spectacle a remporté le Masque du Public au Gala des Masques 2003.
Livret de
Dale WassermanMusique de
Mitch LeighParoles de
Joe DarionAdaptation française de
Jacques BrelMise en scène
René Richard CyrAvec
Jean Maheux, Sylvain Scott, Éveline Gélinas, Stéphan Côté, Michelle Labonté, Roger La Rue, Catherine Vidal, Stéphane Brulotte, Sylvain MasséMusiciens
Benoît Sarrasin, Lauréat Cormier, Joël GagnéDirection musicale
Benoît SarrasinAssistance à la mise en scène
Lou ArteauScénographie
Réal BenoîtCostumes
François St-AubinAccessoires
Normand BlaisÉclairages
Étienne BoucherDu 22 sept. au 16 oct. 2004
Supplémentaire le vendredi 22 octobre 2004 à 20 heuresEn reprise les 26-27-28 mai 2005 au Théâtre Olympia (1004, rue Ste-Catherine Est - 286-7884)
par David Lefebvre
Je suis toujours confus quand je dois critiquer une pièce que j'ai adorée. Comment faire quelques paragraphes quand je peux tout simplement dire : c'est terriblement bon, tout est parfait, courrez voir cette pièce... ? Mais bon, je suis critique, alors fonçons.
Dale Wasserman est celui qui créa, aux États-Unis, pour Broadway, la pièce de théâtre musicale Man of La Mancha, après avoir lu Don Quichotte, de Miguel de Cervantes. D'ailleurs, après sa lecture du livre, il en était venu à la conclusion que l'oeuvre n'était pas adaptable, jouant sur les thèmes de la satire, du roman, de l'anti-roman, et qu'il fallait découvrir l'auteur avant l'oeuvre. Il écrit donc Man of La Mancha, qui raconte l'histoire d'un homme, Cervantes, percepteur d'impôts, en pleine Inquisition, qui se fait emprisonner parce qu'il a osé demander l'impôt à un monastère. Il se retrouve donc parmi les brigands, les voleurs, les escrocs. Ces derniers lui intentent un "procès", l'accusant d'être mauvais poète, idéaliste et honnête homme. Tout de suite il demande à se défendre, et sort de son coffre des costumes, des accessoires, et dévoile le personnage de Don Quichotte, Chevalier errant à la Triste Figure, âme simple, candide et généreuse, qui veut imposer à un monde devenu laid son idéal d'amour, d'honneur, de justice et de paix. Il se lance à corps perdu dans l'univers poétique que son imagination installe dans la réalité, ne pouvant s'empêcher d'accorder aux êtres et aux choses une confiance qui résiste aux moqueries et aux coups. À ses côtés, Sancho Pança, incarne le bon sens commun qui ne s'embarrasse pas de chimère ; même s'il montre beaucoup de naïveté dans ses espérances, il n'en garde pas moins les pieds sur terre et s'efforce de remédier aux désastres nés des exploits de son maître. Les prisonniers embarquent de gré ou de force dans le jeu, et se laissent emporter par l'énergie de Cervantes à jouer différents personnages, donc la fameuse Dulcinéa, la muse de Don Quichotte. À New York, le succès est instantané.
Par la suite, c'est le grand Jacques Brel qui fait l'adaptation française, et joue Don Quichotte/Cervantes lors de trois cents représentations. L'Homme de la Mancha fut la première comédie musicale à connaître un grand succès en France. Qui n'a jamais versé au moins une larme en écoutant La Quête de Brel?
Aimer jusqu'à la déchirure
Aimer, même trop, même mal,
Tenter, sans force et sans armure,
D'atteindre l'inaccessible étoileLe décor représente donc un donjon, avec peu de lumière vive et une seule et grande porte. Le milieu de la scène est surélevé, ce qui représente une scène sur la scène. Les éclairages aident à la compréhension du temps et du lieu, comme les grands chemins, une auberge, une cour la nuit, ou le donjon. Malgré la beauté du décor, les vrais éléments du succès sont les comédiens. Tous et toutes, sans exception, sont parfaits. Ils sont drôles, touchants, émouvants. Ils chantent tous admirablement bien, dont Jean Maheux qui interprète un Cervantes très près, probablement, de ce que Brel pouvait incarner (sa voix prend souvent les intonations du chanteur belge). Sylvain Scott donne à Sancho Pança un air comique très français, faisant penser quelquefois à Christian Clavier dans ses mimiques et ses accents. René Richard Cyr a réussi une mise en scène étrangement grandiose dans son intimité. Malgré l'ampleur du projet, on se sent dans ce donjon, puis sur les routes avec Don Quichotte à affronter les moulins à vent. La poésie qui se dégage du texte est palpable, on ressent facilement et avec délectation toute la beauté qui en ressort, toute la fragilité de l'imagination dans un monde trop réel, toute la folie dont l'Homme devrait s'imprégner pour que cette terre tourne un peu plus rond.
Drôle, touchant, L'Homme de la Mancha est un événement, un grand moment de théâtre musical, une soirée délicieuse, une pièce merveilleuse. Emballé j'ai été et emballés vous serez, si vous pouvez, bien entendu, apprécier le chant au théâtre...