Communiqué du Théâtre de l'Urd

C'EST URGENT, VITE, IL FAUT AGIR "

Notre événement est un théâtre du vivant et de l'absolu, c'est une fête.

C'est un voyage vers l'Homme à travers la tombe, la bête, l'arbre et les étoiles, un théâtre de l'Histoire comme une enquête anthropologique.

C'est un travail sur le tragique qui offre une vision renouvelée et très libre du mythe d'Antigone. Il soulève des questions concernant notre origine, notre place dans la société et la survie de notre Terre Mère.

Sans doute des gens comme Antigone n'existent plus dans notre société actuelle. Antigone a disparu et avec elle plusieurs valeurs du bien commun. Aujourd'hui, notre monde manque énormément de courage, d'amour, de poésie et de rêve…

Nous serons comédiens et spectateurs. Mais il n'y aura ni scène, ni salle, juste un espace public. Et nous chercherons ensemble, pendant deux heures, l'esprit rebelle d'Antigone voulant défendre notre identité, changer le monde et sauver l'humanité. Nous essayerons de comprendre le sens de l'existence et ses mystères.

" MAIS SAVONS-NOUS COMPRENDRE ? "

Du 12 au 30 septembre 2006
(Relâche les dimanches et lundi)

PRODUCTION :
Théâtre de l'Urd
TEXTE:
Collectif
DRAMATURGIE ET MISE EN SCÈNE: Hanna Abd El Nour
ASSISTANTE À
LA MISE EN SCÈNE:
Marie-Noëlle Béland
INTERPRÉTATION :
Sylvio-Manuel Arriola, Mathieu Campagna, Maryse Lapierre, Olivier Normand et Klervi Thienpont
DIRECTION MUSICALE :
Mathieu Campagna
SCÉNOGRAPHIE ET ÉCLAIRAGE :
Erica Schmitz et Noémi Laganière Gosselin

 

 

par Magali Paquin

Résultat d'une année d'exploration en résidence à Premier Acte, « Les Grenouilles et Les Parapluies Idées, Corps Et Voix En Quête D'une Fête Révolutionnaire Antigone Comme Spectacle Sans Fin » est l'aboutissement de deux laboratoires publics, Barbarus et Fragile, présentés au cours de la dernière année. Le Théâtre de l'Urd, sous la direction du metteur en scène Hanna Abd El Nour, introduit à un véritable théâtre-labyrinthe d'intuitions et de réflexions sur la création et la société. Mais les objectifs de cette pièce qui n'en est pas vraiment une demeurent nébuleux : aspire-t-on à l'étalement disparate d'états d'âmes et de pensées que le public est appelé à s'approprier ou à une quête commune du sens de l'existence, comme on l'annonce ? D'un côté comme de l'autre, il s'agit d'importantes ambitions difficiles à concrétiser.

Expérience que l'on ressent plutôt que l'on comprend, cette prestation, dont le titre rend bien la nature, enchevêtre des images et des idées lancées ça et là ; jetés les uns sur les autres, les mots se chevauchent comme s'entremêlent les corps. Ce que l'on attrape au vol peut susciter la réflexion comme se perdre dans les méandres de l'esprit, les images peuvent marquer intensément comme se succéder dans l'impassibilité. Or, veut-on amener le spectateur à s'approprier le propos qu'un discours figuratif aurait parfois mieux atteint ce but, plutôt qu'une poésie déchiquetée et multipliée par elle-même, aussi belle et poignante soit-elle. Toujours, tous les sens sont interpellés, de tous bords et de tous côtés, comme si les protagonistes voulaient s'approprier totalement leur public. Mais à trop vouloir aller chercher le spectateur, on peut aussi le perdre. Et sans moments de faible intensité pour mieux faire jaillir les moments forts, tout peut en venir à s'équivaloir.

Malgré tout, moments intenses il y a assurément. Si les grenouilles sont difficiles à dénicher, les parapluies se retrouvent cependant au coeur de la prestation. L'eau qui s'écrase à grosses gouttes, puis qui se déverse en cascades sur le plancher sans censure ni inquiétude pour les installations, est une image d'une force déstabilisante. L'on ne s'empêtre pas non plus des conventions lorsqu'il s'agit de l'utilisation des lieux. Le décor englobant, aux objets, ampoules et tissus suspendus, de même que la disposition hétéroclite des sièges se prêtent à tous les jeux. Se faufilant entre les parois des murs, se glissant sous les gradins échafaudés, s'introduisant dans le plafond, les personnages sont loin de s'embarrasser de la frontière divisant habituellement public et acteurs. C'est désormais tout l'espace qui leur appartient.

Or, si la division de l'espace tend physiquement à s'atténuer, la dichotomie acteur/spectateur demeure malgré tout. Bien que convié à une fête et à une quête commune, le public reste cantonné dans un cadre relativement passif, ne serait-ce que parce que l'action se déroulant devant ses yeux est si déconcertante qu'il ne saurait où s'inscrire s'il lui venait à l'esprit d'y participer. On lui offre pourtant des petits bonbons (alors qu'un acteur exècre habituellement le bruit de ces petits papiers chiffonnés), des préservatifs ou une pomme à croquer ; on souligne l'anniversaire fictif d'un spectateur ; on s'adresse parfois aux gens intimement et avec désinvolture. Cela ne suffit pourtant pas à faire de l'espace un tout, à briser le cadre théâtral, comme tel semblait le souhait. Car si la référence à Antigone s'insère dans une critique de la société, c'est aussi dans un renversement du rapport au théâtre que s'inscrit cette prestation.

Peut-être le spectateur a-t-il trop intégré son rôle passif pour permettre de chambouler les principes bien établis de la représentation théâtrale. Peut-être aussi l'approche favorisée n'est pas l'idéale pour atteindre les ambitieux objectifs que semble s'être donné le Théâtre de l'Urd. Le résultat de ce « Spectacle sans fin » est malgré tout fascinant dans le fond et la forme, ne serait-ce que parce qu'il surprend et déconcerte. Reste cependant l'impression que ce sont les comédiens qui ont le plus à en retirer, pouvant évoluer quelques soirs durant dans un environnement où tous les possibles semblent permis.

19-09-2006