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8 novembre 2010, 20h
À présent
Texte de Catherine-Anne Toupin
Mise en scène de Frédéric Blanchette
Avec Éric Bernier, Monique Miller, David Savard, François Tassé, Catherine-Anne Toupin
Récemment installés dans leur nouvel appartement, Alice et Benoît essaient tant bien que mal de retrouver une certaine quiétude après une période difficile.

Mais le jeune couple devra faire face à ses voisins de palier, les Gauche, un couple plus âgé qu’eux, et leur fils de trente-cinq ans.

S’immisçant insidieusement dans leur intimité, ce trio peu conventionnel à bien des égards bouleversera leur existence à tout jamais...

Décor : Olivier Landreville
Costumes : Marc Senécal
Éclairages : André Rioux
Musique : Yves Morin
Accessoires : Patricia Ruel

En tournée du 28 octobre au 12 décembre 2010

Une production - Duceppe
présentée en collaboration avec le Théâtre de La Manufacture

Salle Albert-Rousseau
2410, chemin Ste-Foy
Billetterie : 418-659-6710 - 1-877-659-6710

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Dates antérieures

Du 8 septembre au 16 octobre 2010 - Jean-Duceppe
Du 15 janvier au 23 février 2008, suppl. 2, 9, 16 et 23 février à 15h La Licorne

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 Critique
Critique
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par Geneviève Germain

Les questionnements fusaient de toutes parts au sortir du Théâtre Duceppe jeudi dernier. À chacun sa propre interprétation d’À présent.  Il faut dire qu’il est difficile de rester indifférent au charme étrange et provocateur qui émane de cette pièce qui fut d’abord présentée en 2008 au théâtre de la Licorne. Si vous avez manqué cette première présentation, et que vous aimez le suspense et l’étrange, je vous recommande fortement de profiter de l’occasion pour découvrir l’univers déroutant de l’auteure Catherine-Anne Toupin.

D’abord chaudement accueillie par la critique avec sa première pièce L’Envie (Théâtre d’aujourd’hui, 2004), l’actrice et auteure Catherine-Anne Toupin présente ici sa deuxième pièce et montre déjà une aisance certaine dans l’art de l’écriture, en respectant les silences des dialogues et les sous-entendus. Car ce qui est implicite ici semble d’autant plus important que ce qui est tangible. Il faut dire aussi que la mise en scène de Frédéric Blanchette aide à illustrer cette mince séparation entre ce qui est réel et ce qui ne l’est pas, cultivant le mystère jusqu’à la toute fin de la pièce. Tout comme Benoît (David Savard) qui pince Gilles Gauche (François Tassé) pour s’assurer qu’il est vraiment là, les spectateurs tentent de tirer leurs propres conclusions. Et quand on croit avoir compris, on nous sert une fin bien inattendue.

La prémisse semble simple : Benoît et Alice (Catherine-Anne Toupin) forment un jeune couple nouvellement déménagé qui tente de se retrouver suite à une période difficile. C’était sans compter l’arrivée inattendue et surprenante de leurs voisins les Gauche, un couple plus âgé qu’eux et  leur fils de 35 ans, François (Éric Bernier). S’imposant dans leur vie, le malaise est palpable. Serait-ce l’autorité et l’insistance amicale de Juliette Gauche (flamboyante Monique Miller) qui nous trouble? Ou encore le comportement déplacé et malhabile de François  qui nous rend mal à l’aise? Peu importe, car chacun reste rivé à son siège en attendant la suite.

N’ayez crainte, on rit aussi dans cette pièce! Plusieurs fois, mais pas longtemps, et parfois avec inquiétude. Éric Bernier sert habilement cet humour à double tranchant dans son rôle de François qui frôle la folie sans y sombrer complètement. Catherine-Anne Toupin joue Alice avec délicatesse et doigté, dans toute la complexité de la douleur que le personnage semble ressentir.  En fait, tous les acteurs évoluent dans cet univers particulier avec aisance, facilitant le passage de ce récit qui peut choquer par moments.

Aucun temps mort n’est alloué dans cette pièce pourtant sans entracte. On demeure intrigué jusqu’à la toute fin. De quoi vous assurer une fin de soirée aux conversations bien animées.

18-09-2010

par David Lefebvre

Avec À présent, Catherine-Anne Toupin signe son deuxième texte pour le théâtre, après L’Envie. L’univers hitchcockien et du film noir semble encore beaucoup inspirer l’auteure et comédienne. Elle raconte ici l’histoire d’Alice (Catherine-Anne Toupin) et Benoît (David Savard), couple marié depuis 3 ans, qui ont perdu récemment un enfant en bas âge. Alice entend toujours l’enfant pleurer dans sa tête, et lutte contre le besoin d’aller vérifier dans la chambre si tout va bien. Ils font un jour la connaissance de leurs voisins de pallier, la famille Gauche, formée de Gilles (François Tassé), Juliette (Monique Miller) et du timide François (Éric Bernier). Bien qu’au départ sympathiques, les voisins deviennent carrément envahissants. Juliette veut tout voir, obnubilée par le logement, et Gilles n’a surtout pas la langue dans sa poche, imposant les décisions aux autres par des questions imparables. Leur présence bouleversera à jamais l’univers d’Alice et de Benoît.

Explorant les coins et recoins sombres de la nature humaine, À présent nous plonge dans un monde irréel répondant à sa propre logique, au fond des noirs désirs qui sommeillaient à l’intérieur des personnages, faisant soudainement irruption et les gardant sous le joug de ceux-ci : pulsions de curiosité, de domination, de sexualité. Alors que la jeune femme tente de raviver le désir chez son partenaire, elle qui sent un besoin sexuel inassouvi frustrant lui fouetter le corps, il ne pense plus qu’à sa mère qu’il n’a pas connue, pensée liée à cette voisine qui a perdu un enfant. Leurs recherches intimes les poussent vers des situations appelant l’interchangeabilité. Chaque scène, qui nous entraîne davantage vers l’intrigante fin, se succède dans un réel suspense parfois absurde, parfois érotique, mais de plus en plus déstabilisant. Les dialogues sont directs; personne ne se gêne vraiment pour dire ce qu’il pense, même si le propos est totalement blessant ou déplacé.


Crédit photos : Marlène Gélineau Payette

Évoluant dans un décor d’appartement très réaliste, conçu par Olivier Landreville, et sous les éclairages d’ambiance d’intérieur d’André Rioux, les comédiens offrent une prestation absolument convaincante. David Savard en jeune docteur et bon mari, ne rêve plus que de retrouver une mère perdue; par les actes libertins de Juliette (toujours excellente Monique Miller), il finit par se retrouver carrément sous ses jupes. François Tassé interprète avec mystère le magistral Gilles Gauche, ancien chercheur qui, en imposant ses propres réflexions sur des questionnements embarrassants, arrive toujours à ses fins, qui par hasard pointent vers Alice. Catherine-Anne Toupin joue cette Alice, visiblement dérangée, bouleversée par les changements absurdes que les événements récents occasionnent, pour arriver à ne même plus s’interroger sur ceux-ci, jusqu’à la crise finale. Éric Bernier nous offre un François au départ timide, enfant délaissé par ses parents qui lui préfère le benjamin décédé, mais qui finit tout de même par imposer sa présence indirectement chez le couple voisin.

Frédéric Blanchette, complice de longue date de l’auteure, connaît parfaitement et apprécie beaucoup l’univers de la jeune femme – et ça se sent. Sa mise en scène et sa direction d’acteur rappellent aussi le style du film noir ou encore Harold Pinter (auteur qu’il a monté à plus d’une reprise), dans lesquels les scènes s’imbriquent lentement les unes dans les autres, laissant place à l’interprétation, grâce aux silences et aux dialogues qui ne répondent pas toujours à tout, pour former une étonnante histoire de désirs refoulés, d’intense folie, de dangereuses liaisons, où la peur pousse inexorablement vers un inconnu tout aussi étrange qu’attirant. Alors que certaines d’entre elles sont teintées d’humour noir, d’autres sont passablement surprenantes, voire perturbantes. La réalité déraille alors peu à peu, pour nous bercer entre fantasme, inconscience et réalité.

20-01-2008

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