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Carrefour international de théâtre - 2, 3, 4 juin 2013, 19h30
CommerceLa grande et fabuleuse histoire du commerce
En français
Création Joël Pommerat
Collaboration artistique Philippe Carbonneaux
Avec Hervé Blanc, Patrick Bebi, Eric Forterre, Ludovic Molière, Jean-Claude Perrin

Voix unique du théâtre contemporain, l’auteur et metteur en scène Joël Pommerat bâtit, pièce par pièce, une œuvre rigoureuse. Après Les marchands, saisissante réflexion sur le travail comme obligation à vendre sa vie, présentée au Carrefour en 2009, voici La Grande et fabuleuse histoire du commerce. Depuis sa création en 2011, la pièce a fait le tour de la France et voyagé en Europe : « un spectacle salutaire », « une tragédie du temps présent », «un théâtre qui saisit par sa beauté, son sens et émeut profondément» affirme-t-on devant cette production.  

Le spectacle nous offre une incursion, en deux époques, dans la vie de vendeurs itinérants. Années 60 : des marchands expérimentés initient leur recrue au monde de la vente; années 2000 : un jeune loup tente de livrer la recette du succès à son équipe, quelques vendeurs d’âge mûr, débutant dans le métier. Convaincre, séduire, gagner, créer le désir, le besoin, voilà la litanie de leur religion.

Soir après soir, de ville en ville, les hommes se retrouvent dans une modeste chambre d’hôtel : décor aux lignes épurées, baigné de clairs-obscurs. Chacun y dresse le bilan des contrats signés, de l’argent gagné et des records battus (ou non). On découvre leurs techniques, leurs scrupules (ou non), et quelques pans de leur histoire personnelle. Le ton est léger, débonnaire, tissé d’un humour redoutable, entre drame et comédie. Jusqu’à ce que l’émotion envahisse le terrain de la performance.


Lumières et scénographie Eric Soyer
Costumes Isabelle Deffin
Son François Leymarie
Musique Antonin Leymarie
Décor et accessoires Thomas Ramon - À travers Champs
Vidéo Renaud Rubiano
Photo Elisabeth Carecchio

Création à La Comédie de Béthune, le 15 décembre 2011

Durée : 1h20

Tarif régulier : du 36$ à 46$
Foubrac : 26$
Accro : 30$
Béguin : 34$

En parallèle
Rencontre avec le metteur en scène de La grande et fabuleuse histoire du commerce, Joël Pommerat, mardi 4 juin, Café-bar Le Zinc, 336 rue du Roi

Coproduction Comédie de Béthune - Centre Dramatique National Nord Pas-de-Calais + Béthune 2011 - Capitale régionale de la Culture + Le Carré (Sainte-Maxime) + Théâtre de l’Union - Centre Dramatique National du Limousin + Le Rayon Vert (Saint-Valéry en Caux) + Théâtre d’Arles - Scène conventionnée pour des écritures d’aujourd’hui + Théâtre d’Évreux - Scène nationale Évreux Louviers + CNCDC - Centre National de création et de diffusions culturelles de Châteauvallon + Le Parvis - Scène nationale Tarbes Pyrénées + Le Granit - Scène nationale de Belfort AVEC LE SOUTIEN DE la Coupe d’Or - scène conventionnée de Rochefort

Production Compagnie Louis Brouillard


CarrefourThéâtre de la Bordée
315, Saint-Joseph Est
Billetterie : Carrefour - 418-529-1996 - 1 888 529-1996
Adresse : 369, rue de la Couronne, 4e étage, billetterie en ligne

 
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 Critique
Critique

par Odré Simard

Au sommet d'une théâtrographie qui ne cesse de s'accroître, Joël Pommerat nous convie cette fois à une fable contemporaine ayant comme prétexte la vente à domicile. La pièce est construite en deux temps : nous retrouvons à deux époques différentes divers voyageurs de commerce qui discutent de leur journée de travail, de leurs stratégies et le moins possible de leur vie personnelle. On y voit leurs rapports individualistes, malgré la semblance d'équipe et de confiance, tous prêts à abandonner le premier qui tombera, afin de se protéger. Le cynisme est au rendez-vous et nous voyons comment la logique du commerce peut faire fondre n'importe quel principe moral et éthique chez le novice qui cherche à se sauver lui-même en temps de crise, et ce, en profitant de la naïveté des gens. La grande et fabuleuse histoire du commerce est un spectacle dur, nous faisant davantage mal-aimer ce métier qui l'était déjà bien assez, mais qui se termine sur une lueur d'espoir.

La force de toute la pièce réside dans la vérité des personnages et le récit qui semble, de prime abord, plutôt banal, et qui vient nous percuter lorsqu’apparaît le pendant tragique. Fait fort intéressant, la création de la pièce s'est basée sur de véritables entretiens avec des voyageurs de commerce ; de plus, les acteurs ont pu bénéficier d'un stage avec quelqu'un du métier. La construction du récit, soit de nous présenter deux époques l'une après l'autre, nous présente l'idée cyclique que le monde de la vente a toujours usé de la même mécanique insidieuse au détriment des clients. Par contre, le passage d'une époque à l'autre n'est pas limpide : aucune référence claire n'est indiquée, seulement des chambres d'hôtel différentes, deux temps de crises. Heureusement, le programme vient un peu à notre rescousse.

Pour ce qui est de la mise en scène, il s'agit d'un théâtre réaliste très honnête, avec une direction d'acteurs très solide et bien dosée et des pointes d'humour qui atteignent leur cible. La scénographie épurée est efficace, nous présentant une chambre d'hôtel anonyme qui se module différemment selon la configuration, mais qui rend le rythme des transitions assez lourd et répétitif. L'éclairage réaliste propose de beaux clairs-obscurs. La musique prend beaucoup de place lors de chaque transition et personnellement, je me permettrais même d'interroger l'usage, par exemple, d'extraits du groupe Fever Ray (dont le nom n'est d'ailleurs mentionné nulle part), alors qu'une production de cette ampleur avec une grande tournée devant elle aurait pu miser sur une conception sonore composée pour l'occasion.

Malgré une vérité des personnages tout à fait captivante, La grande et fabuleuse histoire du commerce est, au final, très froide. Nous vivons une certaine distanciation due à l'usage de microphones portatifs, en plus de l'esthétique sobre et léchée et de la mise en scène réaliste. Nous regardons alors la pièce un peu à la manière d'une oeuvre cinématographique, ce qui peut ne pas plaire à tous, malgré les critiques dithyrambiques de cette oeuvre de Joël Pommerat. 

04-06-2013