Du 2 au 27 novembre 2004
suppl. du 30 nov. au 4 déc.

Arraché à ses draps à 5h du matin par deux gardes intraitables, Josef K., personnifié par Alexis Martin, est happé par une machine judiciaire qui ne lui laisse aucun répit! Il a beau argumenter, chercher à comprendre, la procédure suit son cours, le tribunal délibère, la loi s'applique. Trahi par tous, il a des visions de fornication, de tortures, de coprs souffrants bien sonores!

Le sombre employé de banque pragois Franz Kafka (1883 - 1924) s'est semble-t-il mis en scène dans ce cauchemar - publié à titre posthume, contre sa volonté, par son ami Max Brod - où toute l'humanité s'est reconnue. Coupable d'une faute qu'il ignore, Josef K. est traqué par un système concentrationnaire précurseur de toutes les horreurs de son siècle.

Texte de
Franz Kafka

Adapt. théâtrale de
Serge Lamothe

D'après la traduction de
Axel Nesme

Mise en scène de
François Girard

Assist. à la mise en scène et régie
Élaine Normandeau

Avec
Isabelle Blais, Stéphane Brulotte, Violette Chauveau, Normand Chouinard, Maxim Gaudette, Pierre Lebeau, Alexis Martin, Jean-Louis Roux
Un coeur de 8 comédiens dont Enrica Boucher, Anne Bryan, Jean Chapleau, Éric R. Loiseau, Georges Molnar, Aurélie Spooren, Yvette Thuot et Xavier J. Wilson

Les concepteurs
François Séguin, Renée April, Marc Parent, Nancy Tobin,

Le Théâtre du Nouveau Monde aux Belles Soirées
Le Procès de Franz Kafka

Le mercredi 27 octobre - Kafka et l'identité

Invité : Chaïm Vogt-Moykopf, M.A. études allemandes (Montréal) ; ancien conseiller parlementaire et juridique pour le Parti vert au parlement régional autonome de Baden-Württenberg (1989-1996) ; auteur de Les 1001 lumières de l'identité juive, Francfort (à paraître).

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Le mercredi 3 novembre - Kafka et la mémoire

Invitée : Régine Robin, Doctorat d'État ès lettres (Paris), professeure titulaire au Département de sociologie de l'Université du Québec à Montréal ; membre de la Société royale du Canada ; auteure de Berlin Chantiers. Les passés fragiles, Paris, Stock, 2001 ; Le Golem de l'écriture. De l'autofiction au Cybersoi, XYZ, 1998.

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Le mercredi 10 novembre - L'adaptation théâtrale

Invitée : Diane Pavlovic, Ph.D. lettres françaises (Montréal), coordonnatrice du programme d'écriture dramatique de l'École nationale de théâtre du Canada.


Les conférences ont lieu au pavillon 3200, rue Jean-Brillant de 19 h 30 à 21 h 30.
Pour des informations complémentaires, consultez le www.bellessoirees.umontreal.ca

 

par Julie Lacasse

Tableaux d’un procès

On l’attendait ce Procès. Mettre en scène l’œuvre de Franz Kafka est un exercice ardu vu la fragmentation du texte. Mais selon mon humble avis, François Girard n’a pas été dans la bonne direction pour créer sur scène l’ambiance un peu tordue du roman.

Avec une équipe de comédiens talentueux tels Alexis Martin, Pierre Lebeau, Normand Chouinard, Violette Chauveau et Isabelle Blais, nous étions en droit de s’attendre à tout un spectacle. D’ailleurs, leur jeu était très bon et si la pièce manquait de saveur, ils ne sont nullement à blâmer.

En fait, tout était très beau. Les décors, les costumes, le bois, l’aspect poussiéreux de ce qui traîne depuis des lustres, les tonnes de livres et de papiers partout, l’éclairage orangé et caverneux projeté par une immense horloge.
Très beau, vraiment beau. Beau comme un tableau fixé.

L’histoire de Joseph K. (A. Martin) commence très tôt le matin alors qu’il est couché dans son lit et que deux agents viennent le mettre en état d’arrestation sans lui donner le motif de l’inculpation. K. devra subir un procès dont il ne connaît pas la teneur, en attendant, il est libre d’aller et venir à sa guise. S’en suit une série de rencontres avec l’oncle (N. Chouinard), le directeur de banque (J.-L. Roux), l’avocat (P. Lebeau) et son infirmière (I. Blais), les juges et tout le bataclan juridique. K. s’insurge contre son inculpation, tente de faire la preuve de son innocence mais le système est trop fort, plus il s’insurge, plus sa condamnation est imminente. Jusqu’au jour où finalement, critiquant trop le système, on l’exécute, sans plus d’explications.

Je crois que la plus grande erreur de la mise en scène se situe dans le rythme et la surcharge esthétique. La scène est très chargée de meubles, d’accessoires et de gens. Il y a un cœur de 5 ou 6 comédiens qui sont constamment sur la scène et qui bouge lentement, sans faire de bruit, comme au ralenti. En plus, il y a toujours un bruit en sourdine, un genre de grondement de sous-marin accompagné de bruits de métal qui grince, qui renvoie aux aiguilles de l’immense horloge. Et c’est très beau au début. Mais pendant 2 heures, ça devient un tantinet agaçant.

Entre chaque chapitre présenté, un immense rideau sur lequel est projetée une page du livre descend sur la scène pour permettre le changement de décors. Sur scène on ne voit plus que Joseph K. perdu dans ses réflexions. Seulement, puisque la pièce est divisée en une dizaine de scènes (rappelant les chapitres du livre) nous avons droit à la descente dudit rideau une dizaine de fois aussi, toujours avec une bande sonore répétant les événements de la scène précédente. Je me suis demandée si cette façon de faire les choses était une conséquence obligée pour changer les décors fastidieux ou bien si on voulait s’assurer que je comprenais bien ce qui venait de se passer… Mais que ce soit l’un ou l’autre, dans les deux cas il y a assurément des temps morts. Vers la cinquième descente de rideau, on est déjà exaspéré.

C’est esthétiquement très beau, je me répète. Mais nous assistions à une pièce de théâtre et non à une installation. Deux heures de tableaux plastiques pour un texte assez riche et chargé en soi, je trouve ça beaucoup, je trouve ça long. La surdose de symboles me donnait la nausée (mais ça c’est un autre roman). Je n’étais pas la seule d’ailleurs, on entrait et sortait de la salle comme dans un moulin. La salle au complet a hésité à applaudir suite à l’exécution de K., même si le noir se poursuivait et que la fin était indéniable.

L’ambiance trop lourde, surchargée, nous empêche de nous installer dans la tourmente de Joseph K. et c’est bien dommage, vu la qualité des comédiens présents.

(rédigé le 8 novembre 2004)